On a vu au Grand Théâtre de Provence : un Orfeo & Euridice électrisant et romantique

Publié le 19 avril 2015 à  20h00 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  18h49

Les artisans du succès de cet
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Une semaine ou presque, après les derniers accords du Festival de Pâques, le Grand Théâtre de Provence faisait à nouveau le plein, samedi soir, pour l’ultime représentation de «Orfeo & Euridice» de Gluck, en version concert, sous la direction de Laurence Equilbey. Née en 2013, cette production a pas mal tourné avant de faire l’objet d’un enregistrement en «live», il y a peu, pour Deutsche Grammophon. Ce qui remplit de joie les mélomanes qui savent qu’une trace de cet Orfeo passera à l’histoire avec cet enregistrement. Autant le dire d’emblée, ce que nous avons entendu samedi soir était d’une beauté et d’une perfection rares. A commencer par la direction, pour le moins inspirée, de Laurence Equilbey qui, de concert en concert, affirme la maîtrise de sa direction d’orchestre tout en poursuivant dans le domaine d’excellence qui est le sien depuis des années, celui de directrice de chœur. Samedi, face aux siens réunis dans leur totalité puisque Accentus et Insula orchestra étaient sur scène, la dame a eu l’occasion de démontrer, une fois de plus, la dimension de son talent, parfois sautillant, toujours lumineux, en détaillant avec élégance les beautés d’une partition qui mérite une lecture attentive et passionnée tant elle est l’illustration parfaite du génie d’un compositeur qui s’appelait Gluck. En un peu moins de trois ans, Laurence Equilbey a hissé Insula orchestra au niveau des meilleurs ensembles jouant sur instruments d’époque. Tous les pupitres sont beaux, depuis les cordes, soyeuses et colorées, jusqu’aux cuivres précis et puissants. Les vents sont mélodieux et chaleureux et l’ensemble obtient un son qui propose du volume, de la finesse et une patine séduisante. Quel beau travail ! Quant au chœur, dire du bien de lui est redondant avec tout ce que nous avons pu écrire sur lui depuis des années. Ici aussi, précision et couleurs sont au rendez-vous. Quel travail sur la scène des furies, entre autres ! Puis il y a les solistes… Il eut été dommage de déséquilibrer le plateau avec un trio vocal qui n’aurait pas épousé la qualité d’ensemble. Écueil évité avec la présence de voix en parfaite adéquation avec la demande artistique de Laurence Equilbey. Emmanuelle de Negri est un Amore qui, pour être espiègle, n’en est pas moins très présente. Une ligne de chant agréable, toute de délicatesse et de gaieté.
Malin Hartelius, elle, est une Euridice de grande classe. Voix bien placée, précise, veloutée, elle donne vie à une héroïne entre vie et royaume des ombres, tellement belle, mais tellement féminine, aussi, dans sa quête amoureuse du regard de son Orféo… Du grand art. Puis il y a le héros, désespéré, volontaire, inquiet, fort et fragile à la fois, qui affronte le peuple des enfers et ne peut résister à l’appel de sa belle. Toute ces situations sont vécues, et chantées, par un contre-ténor exceptionnel, Franco Fagiolo, qui arrive à faire oublier, par sa ligne de chant, sa virtuosité et sa puissance, ceux qui l’ont précédé dans ce rôle. Il est un Orfeo romantique à souhait, procurant âme et de la chair à un personnage trop souvent falot et larmoyant, plus occupé à penser à son chant qu’aux situations vécues par le héros. Sa technique est remarquable et la dimension de sa tessiture assez surprenante. Une énorme prestation saluée triomphalement par un public plus que conquis, totalement subjugué par ce qu’il venait de vivre. Un moment d’une intensité rare, exceptionnel !
Michel EGEA

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