On a vu au Théâtre du Gymnase de Marseille André Marcon dans un « Malade imaginaire » de haute tenue

Publié le 15 octobre 2015 à  22h54 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  20h09

André Marcon dans le Malade imaginaire  (Photo D.R.)
André Marcon dans le Malade imaginaire (Photo D.R.)

On monte souvent au théâtre «Le malade imaginaire» en privilégiant une vision burlesque des scènes successives où le héros de Molière y apparait grotesque, vaniteux et stupide. L’occasion pour les acteurs de donner la pleine mesure d’un jeu virevoltant, clownesque avec grimaces en bandoulière et voix portée à un son extrême. Cela donne le meilleur (Michel Bouquet) comme le pire (par charité on ne citera aucun nom) mais on reste dans quelque chose de connu, voire d’attendu. Pas de cela dans la mise en scène de Michel Didym telle que nous pouvons l’applaudir en ce moment au Théâtre du Gymnase de Marseille. Son remarquable travail nous laisse entrevoir un Argan plus sobre que d’habitude, totalement irrésistible cependant, ce qui a l’avantage tout d’abord de laisser respirer le texte et d’en goûter toutes les subtilités. La deuxième force de son travail est d’équilibrer ainsi le traitement réservé à tous les autres protagonistes, n’en mettant aucun de côté et n’en rendant aucun secondaire. Avec, en prime une vision féministe du monde de Molière, la servante Toinette s’imposant ici comme le symbole même de la résistance à la bêtise de son maître et à travers lui aux êtres masculins avides de pouvoir. Car l’aspect politique du propos de Molière n’est pas négligé, les faux médecins en prenant pour leur grade et les gens de cour y apparaissent en filigrane dans un décor assez lumineux, où une sorte de rideau en lamelles tendu sur la scène cache les pièces de la maison. Au centre l’incontournable fauteuil de ce Malade acariâtre, éternel enfant gâté, capricieux et injuste envers sa fille qu’il veut marier à Thomas Diafoirus, le fils d’un médecin assez peu scientifique au demeurant. Les costumes qui ne sont pas d’époque permettent par leur classicisme de ne pas être datés. Et puis il y a dans le rôle du malade imaginaire le très remarquable André Marcon. Lui que l’on a vu en rôle de père de Gallienne dans «Guillaume et les garçons à table» et, plus récemment aux côtés de Catherine Frot dans «Marguerite» de Xavier Gianolli, lui le spécialiste de l’œuvre de Novarina campe ici un exceptionnel Argan, tout en finesse et rouerie, laissant respirer les silences comme peu y parviennent. Nora Krief, complice de François Morel en chansons, est ici une Toinette, tout feu tout flamme, trépidante, et irrésistible. Didier Sauvegrain que l’on a connu en méchant dans les films de Delon, et qui a incarné un grand «Électeur» dans «Le Prince de Hombourg» joué au Théâtre Vitez d’Aix en avril 2009 dans la mise en scène de Marie-José Malis, donne du frère d’Argan une vision du rôle plus intelligente que d’habitude. Un spectacle réussi, avec en final le ballet dansé avec des masques rappelant par instants ceux d’Omar Porras. Une réussite absolue.
Jean-Rémi BARLAND
Ce vendredi 16 octobre au Théâtre du Gymnase de Marseille à 20h30 – Avec, André Marcon (Argan) – Norah Krief (Toinette) – Jeanne Lepers (Angélique) – Catherine Matisse (Béline) – Bruno Ricci (Le notaire, Thomas Diafoirus, Monsieur Fleurant) – Jean-Marie Frin (Polichinelle, Monsieur Diafoirus, Monsieur Purgon) – Barthélémy Meridjen (Cléante) – Didier Sauvegrain (Béralde) – Sixtine Kieffer / Agathe Helluy / Katalina-Jehanne Villeroy de Galhau (Louison) en alternance – et le Quatuor Stanislas (Laurent Causse, Jean de Spengler, Bertrand Menut, Marie Triplet).

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