Optitec : les recettes du succès

Publié le 18 juillet 2013 à  6h00 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  15h58

La table ronde sur le thème « Les leviers de croissance des PME du secteur photonique du Sud-Est de la France », organisée par le pôle Optitec au Palais de la Bourse à Marseille, a été l’occasion pour les entreprises présentes de livrer les clés de leur succès.

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Outre la présentation des perspectives de croissance remarquables du pôle de compétitivité Optitec, spécialisé dans la photonique, la table ronde sur le thème « Les leviers de croissance des PME du secteur photonique du Sud-Est de la France », qui s’est tenue le 19 juin au Palais de la Bourse à Marseille, a également permis aux entreprises présentes de livrer les recettes de leur succès. A commencer par Jean-Claude Noack qui a ôté pour l’occasion sa casquette de président du pôle Optitec pour endosser celle de directeur scientifique de la société Bertin Technologies, une entreprise de taille intermédiaire d’environ 480 salariés basée à Aix-en-Provence. « C’est une société qui travaille dans le domaine de l’optique. Or, avec l’évolution économique qui produit sans arrêt des crises et des remises en crise, pour des entreprises de transfert technologique comme la nôtre, il y a obligation de se diversifier. Quand on développe une application pour un marché donné, il faut voir si on ne peut pas l’appliquer à d’autres secteurs », explique-t-il.
Bertin Technologies a ainsi notamment mis au point une application défense pour l’armée, « un marché qui se raréfie, en stagnation », applicable au marché de la sécurité des personnes, qui est en revanche en plein développement. « La technologie est diffusée à l’export pour la sécurité des grands événements, en Chine pour l’exposition universelle, en Pologne pour l’Euro 2012 et nous sommes en négociation avec le Brésil pour la Coupe du Monde 2014 », précise le directeur scientifique. Et de souligner que « le danger, c’est de trop se diversifier, surtout pour une TPE ». « Se diversifier demande une étude de marché, réclame du temps. Le rôle du pôle est d’accompagner les TPE avec des experts afin de les aider à se diversifier », indique celui qui a alors repris sa casquette de président du pôle Optitec.
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« Il faut investir en R&D pour conserver des parts de marché : il faut courir vite et choisir les bons partenaires scientifiques »

Antoine Bourely, directeur scientifique de la société Pellenc Selective Technologies (Pellenc ST), basée à Pertuis dans le Vaucluse, insiste pour sa part sur l’importance d’être une entreprise innovante. « Nous faisons du tri optique, un mot qui n’existait dans l’industrie il y a 15 ans. Quand nous avons lancé la société en 2001, nous étions la seule en France dans ce secteur d’activité. Aujourd’hui nous ne sommes qu’une quinzaine », précise-t-il. Pellenc ST qui comptait alors un effectif de 7 personnes emploie désormais 125 personnes et réalise 75% de son chiffre d’affaires à l’export. « En 2003, nous trions 25 000 spectres à la seconde, 100 000 en 2006 et 400 000 aujourd’hui. On a beau être peu d’acteurs, la course à l’innovation est bien réelle. Il faut investir en R&D pour conserver des parts de marché : il faut courir vite et choisir les bons partenaires scientifiques », souligne Antoine Bourely.
25 à 30% des effectifs de la société vauclusienne, soit une trentaine de personnes, est ainsi dédié à la R&D. « Il est important d’être le meilleur dans son domaine : il faut être identifié comme le meilleur dans un domaine de l’offre et être capable sur les autres domaines », appuie-t-il.
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« Il est important d’être présent de façon systématique sur tous les salons »

La société Savimex, basée à Grasse dans les Alpes-Maritimes depuis 1981 après être née à Saint-Claude dans le Jura en 1954, est une PMI qui a connu plusieurs vies avant de se spécialiser dans l’étude et la fabrication de composants optiques en matériaux polymères. « Nous faisons de l’optique avec des produits polymères car en grande série, cela coûtera beaucoup moins cher que l’optique minérale. Il y a 50 ans, l’entreprise fabriquait des verres de lunettes. Aujourd’hui, on en fabrique plus qu’un et on vend un million de paires de lunettes de bricolage », explique Laurent Coyon, PDG de Savimex qu’il a rachetée à ses fondateurs en 2006, après avoir effectué une partie de sa carrière dans la branche optronique de Sagem.
La société, qui emploie 80 personnes pour un chiffre d’affaires de 10 M€ dont 70% est réalisé à l’international, est actuellement présente sur deux principaux marchés : les écrans de haute qualité optique pour la protection individuelle et les composants et les ensembles optiques. L’entreprise avoue « avoir des idées de diversification » dans certains marchés industriels comme l’automobile. Un développement qui doit permettre de porter à près de 80% la part du chiffre d’affaires réalisé à l’export dans 10 ans. Mais pas question de s’éparpiller. « On est sûr de notre technologie, on reste bien dessus : il ne faut pas se disperser mais être les leaders sur l’optique polymère », explique le PDG de Savimex.
Pour y parvenir la société a développé des outils de communication, dont un site Internet référencé sur la première page Google, et « fait travailler (ses) consultants pour se faire ouvrir des portes ». « Il est important d’être présent de façon systématique sur tous les salons pour montrer à tous les clients qu’on est là et promouvoir nos technologies sans pour autant présenter beaucoup de matériel », indique Laurent Coyon. Des salons que la société fréquente sous le pavillon Optitec dans l’Hexagone, sous le pavillon français hors de nos frontières. « Vu de l’étranger, la France reste un pays technologique, et même technologique d’avant-garde », souligne-t-il.
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« Il faut amener de la R&D et mettre en face des grands groupes »

« Chasser en meute » en travaillant « ensemble sur des guichets » n’est en revanche pas l’essentiel aux yeux de Marc Ricci, l’un des deux fondateurs de Crosslux, une jeune TPE marseillaise née au sein de l’incubateur Impulse il y a maintenant deux ans. « On a développé un procédé pour intégrer dans du vitrage une fine couche photovoltaïque qui produit de l’énergie pour le bâtiment. C’est différent du modèle photovoltaïque qui atteint ses limites pour des problèmes de financement », explique-t-il.
Pour Crosslux, qui nourrit de grandes ambitions, se financer est également le nerf de la guerre. Mais la société phocéenne a pour l’heure réussi à trouver les fonds nécessaires à son développement, via Oséo, le crédit impôt recherche ou les financements réservées aux entreprises innovantes. « La France est un des rares pays au monde à financer les R&D initiales. Il existe des financements au niveau du cluster, il y en a beaucoup, le tout est de frapper à la bonne porte », indique Marc Ricci. La TPE phocéenne, qui emploie 5 salariés en CDI dont deux ingénieurs qu’elle vient de recruter, est ainsi parvenue à se faire financer et à financer en fonds propres sa première machine. Elle est également en train de boucler une levée de fonds dans laquelle elle a fait une deuxième fois appel à Oséo. « Cela doit nous amener sur le champ de bataille fin 2014 avec des produits à un certain niveau de développement et en ayant tout de suite une vision internationale », précise celui qui a travaillé dix ans pour une société taïwanaise.
Un développement qui va conduire Crosslux à quitter ses locaux marseillais à la fin de l’année pour installer sa première ligne de production à Rousset. « On va y amener un géant du verre, un façadier et des PME puisqu’il y aura toute une phase électronique autour du produit. Nous allons mettre le projet en phase avec un consortium. Il n’y a pas 50 manières de faire : il faut de l’envie, prendre le risque et enchaîner les étapes », résume Marc Ricci.
D’une manière générale, le fondateur de la TPE marseillaise estime que la clé de la réussite est d’« amener de la R&D et mettre en face des grands groupes ». « L’Etat en termes de volonté politique doit mettre le projet en phase afin d’intéresser des grands groupes car le financement au final doit être privé », conclut-il.
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« Notre appareil est la référence aux Etats-Unis en matière de dépistage du cancer du sein »

Si l’aventure de Crosslux débute à peine, la société d’imagerie médicale SuperSonic Imagine, implantée à Aix-en-Provence, jouit déjà pour sa part d’une très belle renommée internationale. « On sait mesurer la dureté du tissu. Notre appareil est la référence aux Etats-Unis en matière de dépistage du cancer du sein. Ce n’est pas le cas en France », explique Jacques Souquet, fondateur et PDG de la société.
Créée en 2005, SuperSonic Imagine emploie aujourd’hui 120 personnes. Son échographe, mis au point en 2009, a déjà été distribué à 600 exemplaires, 85% du chiffre d’affaires étant réalisé à l’export. La société aixoise qui connaît depuis 2009 une croissance de 50% par an en moyenne, a déjà réussi à lever 99 M€ en trois levées de fonds. « On a finalisé la dernière fin mars pour 28,5 M€. Le Fonds stratégique d’investissement (FSI) a mis la moitié, soit 14 M€. Cette levée de fonds a deux visées : poursuivre l’innovation sur le cancer du sein ou le cancer de la prostate, et renforcer notre empreinte commerciale. Nous avons ainsi ouvert fin décembre un bureau de représentation en Chine car à l’horizon 2020, elle représentera 25% du marché mondial dans notre domaine », précise le PDG. Une démarche d’autant plus nécessaire que de nouveaux acteurs mondiaux rentrent actuellement sur ce marché. « On assiste à une passation de pouvoir entre les leaders General Electric (groupe américain), Philips (néerlandais), Siemens (allemand) et Samsung qui rachète des sociétés à droite et à gauche (NDLR : le groupe sud-coréen qui s’est offert NeuroLogica, un spécialiste des solutions d’imagerie médicale au mois de janvier, investira près d’1 Md€ dans l’électronique médicale d’ici 2020) », indique Jacques Souquet.

« La mairie de Paris nous a proposé des logements insalubres avec des loyers hauts défiant toute concurrence »

Quant à l’ancrage de SuperSonic Imagine en région PACA, elle correspond à un choix comme le souligne son fondateur. « Nous avons été approchés par la mairie de Paris : elle nous a proposé des logements insalubres avec des loyers hauts défiant toute concurrence, se souvient-il. A contrario, avec l’aide de Provence Promotion, nous avons rapatrié 10 Français qui travaillaient à l’étranger. Ici, ça rappelle l’entreprise de Palo Alto (NDLR : une ville californienne dans le comté de Santa Clara au sud de la péninsule de San Francisco, dans le Nord de la Silicon Valley, qui accueille les sièges de nombreuses entreprises de technologies de pointe, dont Facebook, Hewlett-Packard et VMware) des années 1970 : avec la qualité de vie, il n’y a pas de problèmes pour trouver des gens de qualité. »
Provence Promotion s’est ainsi mis en quête des écoles bilingues et a su donner les bons tuyaux, qui aller voir, à qui s’adresser, pour résoudre tous les aléas du quotidien. « C’est ça le souci quand on a une famille de trois enfants, pas de savoir si le boulot sera intéressant car ça, les personnes concernées le savaient », résume Jacques Souquet ;
Dotée d’un plan de croissance à 5 et à 10 ans, la société aixoise commence à présent à former en interne pour répondre aux problèmes de nouvelles compétences.

Serge PAYRAU

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