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< >[Billet] Pourquoi Macron va gagner les législatives
lundi 8 mai 2017
- (Photo Robert Poulain)
Emmanuel Macron vient de gagner les législatives et cela pour plusieurs raisons : il vient premièrement, d’être largement élu président de la République avec plus de 65% des voix devant Marine le Pen. Alors, contrairement à ce qu’un certain nombre de politiques et de commentateurs estime, les Français ne sont pas stupides et ils lui donneront une majorité. D’ailleurs, lorsque l’on regarde l’histoire de la Ve République on mesure à quel point le suspens est intolérable puisque tous les Présidents élus, tous, ont eu derrière une majorité législative. Et ce vieux pays de France va se réveiller, réjoui d’avoir élu un jeune Président. Sa communication, l’image qu’il a construite, est une réussite.
Emmanuel Macron a gagné parce qu’il vient de réussir, une première, non pas un mais deux discours le soir même de son élection. Il n’a pas manqué d’évoquer, avec gravité : « La colère, l’anxiété, le doute qu’une grande partie a exprimé ». Il s’inscrit dans l’histoire de ce pays : « Nous sommes les héritiers d’une grande Histoire, du grand message des Lumières, auxquels il s’agit de donner une sève nouvelle ». Il se veut protecteur « de la France et de l’Europe » car, insiste-t-il : « C’est notre civilisation qui est en jeu ». Affiche une ambition, celle « de retisser des liens entre les citoyens et le peuple ». Et puis la symbolique miterrandienne, cette marche, seul, dans la cour du Louvre, devant la pyramide, avec l’Hymne à la joie. Rupture totale avec le Président "normal". Et là, il refuse que soit sifflé le nom de Marine le Pen avant de lancer : « Je ferai tout pour qu’ils (les électeurs de MLP ) n’aient plus de raison de voter pour les extrêmes ». Et de lancer qu’il entend défendre les libertés, les opprimés, mettre en place une France avec plus de développement, de justice, d’écologie. Enfin, comment ne pas voir que cette élection, le mandat de François Hollande, les primaires qui ont tué PS et LR -alors qu’ils croyaient s’en servir pour étouffer les autres forces- modifient tout. Le PS implose. LR explose, entre sa droite filloniste et ses courants centriste et gaulliste. Le candidat Mélenchon vise à tuer à la fois le PS et le PCF, pas sûr que ces deniers l’entendent ainsi. Et, son attitude jusqu’au-bout ni-niste devrait, certes, structurer son électorat mais aussi lui faire perdre des voix. Le FN, pour sa part, va connaître des jours difficiles entre le courant national-socialiste, au sens premier du terme, de Marine le Pen -qui affirme vouloir changer le nom du parti, s’ouvrir à tous ceux qui, de la Droite traditionnelle mais aussi d’abstentionnistes et d’électeurs de gauche, pourraient glisser jusqu’à elle- et, un courant d’extrême-droite symbolisé par Marion Maréchal-le Pen qui, elle, vise l’aile droite, traditionaliste, des fillonistes. En revanche, et là l’Histoire est loin d’être écrite, reste à Emmanuel Macron de réussir son mandat, de faire avancer l’éducation, reculer le chômage, construire une Europe... si tel n’est pas le cas, il n’aura pas fait reculer les votes extrêmes, tout au contraire.
Michel CAIRE
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Messages
La peau de l’ours, 9 mai 2017, 17:35, par Pierre Borie
Non seulement l’histoire du mandat est loin d’être écrite, mais il faut aussi faire en sorte de permettre qu’elle puisse l’être, car les législatives ne sont pas encore gagnées, loin de là ! Entre les anarchistes qui défilent déjà en vociférant "Macron démission", les professionnels patentés qui s’inscrivent déjà dans l’opposition avant de savoir contre quoi ils vont devoir s’opposer, et les "patriotes" qui ne songent qu’à réduire la Patrie à une peau de chagrin, il va falloir aux républicains en marche une sacrée dose de clairvoyance et de sens tactique pour faire une majorité, et pour emporter l’adhésion aux réformes.
Tactique, mais aussi stratégie : vouloir simplifier le code du travail, c’est peut-être du bon sens, mais est-ce très opportun de vouloir commencer par ça sans faire en sorte avant de prouver aux intéressés qu’une telle réforme s’inscrit dans un cadre plus général de revalorisation du facteur travail dans le processus de production ? Que la contre-partie du surcroît de flexibilité, c’est non seulement moins de chômage, mais aussi la reconnaissance que les travailleurs auront leur place dans le capital de l’entreprise, tout comme l’environnement. Les convaincre que leur intérêt de classe est à défendre dans les conseils d’administration plutôt que dans la rue en bloquant le pays, pour cogérer et prétendre récupérer une meilleure part de leur valeur ajoutée. Créer un objet social "étendu" qui associe les parties prenantes des entreprises aux apporteurs de capitaux, c’est une réforme qui intéresse le code civil plus que le code du travail, qui devrait en soi susciter l’intérêt de tous ceux qui ne pensent qu’à extérioriser leur colère pour leur donner envie de tenter l’expérience.
Être "En Marche", c’est une façon de sortir du cadre pour entrer dans le 21ème siècle, d’ouvrir la fenêtre sur des horizons prometteurs, de changer de perspective pour mieux renaître, de saisir les mains qui se tendent au dessus des frontières. C’est accepter de changer de paradigme sociétal tout autant qu’économique, et de faire ce qu’il faut pour susciter les envies et l’adhésion. Mais ne vendons pas la peau de l’ours ..., et ne mettons pas la charrue avant les bœufs.