Primaires citoyennes : pas de foire d’empoigne lors du dernier débat avant le premier tour

Publié le 7 octobre 2013 à  23h00 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  16h24

C’est au Parc Chanot, au cœur de la Foire internationale de Marseille dont la 89e édition vivait ses dernières heures ce lundi 7 octobre, que les six candidats à l’investiture socialiste pour les municipales de mars 2014 ont débattu une dernière fois avant le premier tour de dimanche. Des échanges qui ont surtout permis à chacun de décrire la manière dont il souhaitait incarner la fonction de maire.

La dernière photo des six candidats en lice avant le premier tour des Primaires ce dimanche. (Photos Philippe MAILLÉ)
La dernière photo des six candidats en lice avant le premier tour des Primaires ce dimanche. (Photos Philippe MAILLÉ)

La disposition des candidats et l'ordre des prises de parole avaient été tirés au sort.
La disposition des candidats et l’ordre des prises de parole avaient été tirés au sort.

Christophe Masse, ici aux côtés d'Henri Jibrayel, a rappelé qu'il voulait être le maire de la
Christophe Masse, ici aux côtés d’Henri Jibrayel, a rappelé qu’il voulait être le maire de la

Marie-Arlette Carlotti, ici aux côtés de Patrick Mennucci, souhaite que les électeurs lui donnent une légitimité dès le premier tour des Primaires.
Marie-Arlette Carlotti, ici aux côtés de Patrick Mennucci, souhaite que les électeurs lui donnent une légitimité dès le premier tour des Primaires.

Eugène Caselli, ici aux côtés de Samia Ghali, a défendu pied à pied sa gestion de la propreté à la communauté urbaine.
Eugène Caselli, ici aux côtés de Samia Ghali, a défendu pied à pied sa gestion de la propreté à la communauté urbaine.

A six jours de la tenue du premier tour des Primaires citoyennes, ce dimanche 13 octobre, les six candidats à l’investiture socialiste pour les municipales de mars 2014 à Marseille, Patrick Mennucci, Marie-Arlette Carlotti, Eugène Caselli, Samia Ghali, Christophe Masse et Henri Jibrayel, se sont retrouvés ce lundi 7 octobre pour un second débat à l’initiative de LCM, France Bleu Provence, La Provence et La Chaîne Parlementaire (LCP). Après un premier face à face où ils s’étaient retrouvés dans les studios de France 3 Méditerranée, l’auditorium du Parc Chanot était le théâtre de leurs ultimes retrouvailles avant le premier tour. Enregistré à 16h, le débat a ensuite été diffusé à 19h30 sur les antennes des médias concernés. Tout juste pouvait-on regretter qu’au cœur de l’effervescence du dernier jour de la 89e édition de la Foire internationale de Marseille, seuls des invités triés sur le volet étaient en droit d’assister aux échanges. Si bien que l’auditorium sonnait particulièrement creux, cinquante personnes tout au plus, essentiellement des journalistes et des membres du staff des différents candidats. L’occasion semblait pourtant belle de voir les citoyens, présents en nombre dans les allées de la Foire, s’emparaient de la question des Primaires citoyennes… D’où cette interrogation : pourquoi avoir choisi un tel lieu au cœur de la foule si c’était pour lui fermer les portes du débat ?
On ne pouvait également que regretter le timing choisi pour rythmer ce débat appelé à durer 90 minutes. Entre les relances des journalistes des différents médias organisateurs et les reportages pour introduire les différentes séquences, le temps de parole des six prétendants était réduit à peau de chagrin. Neuf minutes et trente secondes de parole chacun, auxquelles se sont ajoutées une minute d’introduction et une minute de conclusion, c’est bien peu pour aborder des thèmes aussi riches que les enjeux politiques des primaires à Marseille, le vivre ensemble dans la cité phocéenne et le développement économique et l’emploi !
Cela n’empêchait pas les six prétendants d’entrer d’emblée dans le vif du sujet au cours d’une minute d’introduction où ils étaient appelés à exprimer les ressorts de leur motivation à l’heure de briguer la mairie de la deuxième ville de France.

Pourquoi faut-il voter pour eux ?

Vainqueur du tirage au sort, Henri Jibrayel, député des Bouches-du-Rhône et conseiller général, a été le premier à se lancer. « J’ai une envie de faire changer Marseille, de sortir cette ville de l’ornière du chômage, de la précarité, avec 30% de la population qui vit au-dessous du seuil de pauvreté, des transports inadaptés », détaille-t-il. Et de promettre d’être « un maire à plein temps » aux antipodes du maire sortant Jean-Claude Gaudin (UMP) qui, après 19 ans à la tête de la Ville, laisse, selon lui, Marseille « à la traîne de l’ensemble des grandes villes françaises et des métropoles européennes ». « J’ai envie de donner un nouvel élan pour cette ville », résume Henri Jibrayel.
Pour Christophe Masse, vice-président du conseil général, conseiller municipal et conseiller communautaire, cette candidature est le fruit d’une mûre réflexion. « Je me suis posé trois questions : qui peut dessiner Marseille à l’horizon 2030 ? Qui peut rassembler sa famille politique ? Qui peut battre Jean-Claude Gaudin ? J’ai analysé mon parcours et je me suis dit que je n’étais pas le plus mal placé. Et le fait que je sois la bonne surprise de cette élection semble démontrer que je n’avais pas tort », assure-t-il.
Eugène Caselli, président de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole (MPM) et conseiller municipal, met en avant sa différence. « Je suis le seul à n’avoir qu’un seul mandat, à avoir passé 30 ans dans un grand établissement bancaire, à n’être entré en politique qu’en 2004, à n’avoir été élu qu’en 2008. Je dirige la communauté urbaine, 18 communes soit plus d’un million d’habitants, et je m’appuie sur une majorité d’idées, pas sur un camp ni sur un clan. Et j’ouvrirai mes listes à 50% à la société civile : c’est ce qui permettra de battre la Droite », plaide-t-il.
Alors que les Marseillais sont, selon elle, « conscients de ce rendez-vous historique » que constituent les municipales de 2014, Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée aux Personnes handicapées et à la Lutte contre l’exclusion et conseillère générale, veut quant à elle « porter une vision sur la ville ». Elle souhaite ainsi en finir avec « la corruption, le clientélisme » qui « polluent la politique publique », rompre avec « l’immobilisme de Jean-Claude Gaudin qui a baissé les bras depuis deux mandats » et est déterminée à ce que « Marseille ne soit pas le laboratoire du FN ».
Patrick Mennucci, député-maire du premier secteur de Marseille, s’appuie pour sa part sur « un programme, une volonté ». « Je veux changer le destin de Marseille, avec une réponse de gauche globale pour la ville. Je veux en finir avec le système clientéliste et les vieux réseaux. Il faut rétablir l’autorité municipale, créer 50 000 emplois salariés privé et donner la priorité à l’école alors que Jean-Claude Gaudin a abandonné l’école communale dans cette ville », étaye-t-il.
Enfin, Samia Ghali, sénatrice-maire du huitième secteur de la cité phocéenne, estime que la « ville en souffrance » qu’est Marseille « a besoin d’un maire qui a du courage, d’un maire à temps plein ». Pour incarner ce premier magistrat-là, celle qui ne sera plus sénatrice si elle est élue s’appuie sur « un programme riche élaboré avec les Marseillais » et sur son expérience de maire des 15e et 16e arrondissements. « Maire de secteur, c’est gérer une commune de 100 000 habitants. Et quand on a géré les 15e et 16e arrondissements, les difficultés de la ville on les connaît, et je saurai les aborder », promet-elle.

Quand on en revient à Jean-Noël Guérini…

Après cette introduction, place au premier thème du débat qui concerne les enjeux politiques de ces Primaires à Marseille. Et dans la lignée de l’intervention d’Harlem Désir il y a quelques jours dans la cité phocéenne, la première question a porté sur Jean-Noël Guérini : l’ombre du président du conseil général des Bouches-du-Rhône plane-t-il sur ce scrutin ? Entre ceux qui jouent l’indifférence, Henri Jibrayel – « Le passé, le présent, le futur de Jean-Noël Guérini ne m’intéresse pas » – et Christophe Masse – « Les clivages autour de Jean-Noël Guérini sont dépassés » -, celui qui estime qu’il a œuvré pour réduire cette influence, à savoir Eugène Caselli – « J’ai plaidé pour ouvrir ces primaires car si cela avait été des primaires socialistes, Jean-Noël Guérini pouvait brouiller les cartes. Si les citoyens vont voter massivement, il n’y aura pas d’interférence » -, ceux qui se livrent à une attaque en règle contre celui qui a porté les couleurs de la gauche en 2008, Marie-Arlette Carlotti – « Oui, il fallait l’exclure (du PS). Oui, je souhaite que Jean-Noël Guérini quitte la présidence du conseil général. Je le dis quoi qu’il m’en coûte » – et Patrick Mennucci – « Je suis le seul à avoir eu à combattre le système Guérini dans une élection lors des législatives de 2012 » -, Samia Ghali fait entendre sa différence. « Si on ne voulait pas que Jean-Noël Guérini soit à la tête du conseil général, il ne fallait pas voter pour lui en 2010 alors que l’enquête était déjà lancée », assène la sénatrice avant de rappeler que « Jean-Noël Guérini n’a pas repris sa carte du PS ».
La maire des 15e et 16e arrondissements fera encore entendre ses divergences à l’heure d’analyser l’échiquier politique phocéen, où, dans le sillage des résultats partiels des cantonales de Brignoles dans le Var, les dernières études semblent montrer que le FN est le premier parti de Marseille devant l’UMP. Là où chacun plaide pour une large union à gauche, pour certains même dès le premier tour, Samia Ghali rappelle qu’« il faudra déjà rassembler la famille socialiste ». Et d’asséner que si le FN en est là, « c’est qu’on a laissé la place » alors que ledit sondage est à ses yeux « au-dessous de la réalité ».

Qui prêche le FO entre Patrick Mennucci et Eugène Caselli ?

Mais c’est bel et bien le thème du clientélisme, si cher à Patrick Mennucci dont la cible préférée est, outre Jean-Noël Guérini et Jean-Claude Gaudin, le syndicat FO, qui a donné lieu à la plus belle passe d’armes du débat. « Je ne mets pas en cause FO mais un petit groupe de dirigeants du syndicat des territoriaux » dont le rôle « est permis par le maire de Marseille », précise le député-maire du premier secteur. Et de promettre que s’il est maire « c’est moi qui déciderai, pas une organisation syndicale ». Quoi qu’il se passe à la Ville de Marseille, Eugène Caselli tenait à rappeler qu’il y a « un patron à la communauté urbaine, c’est moi, pas FO ».
Mais cette affirmation était contestée par Patrick Mennucci. « Quand Eugène Caselli a retiré sa délégation de la propreté à Antoine Rouzaud, il me l’a proposée. J’ai longuement réfléchi, et j’ai dit « oui », tout en posant mes conditions, notamment la fin du fini-parti. Et Eugène Caselli m’a dit que FO ne souhaitait pas ma nomination. Pourtant, si j’étais patron de la propreté, la ville serait plus propre aujourd’hui », assène-t-il.
Une dernière phrase qui faisait réagir Eugène Caselli. « Je crois réentendre « Marseille sera propre en six mois » », ironise le président de la communauté urbaine, un slogan dont Jean-Noël Guérini avait un de ses axes forts de campagne en 2008. Ce qui permettait à Eugène Caselli de renvoyer dos à dos Patrick Mennucci et… son « meilleur ennemi ». Avant de répondre sur le fond : « C’est Patrick Mennucci qui m’a demandé de prendre la Propreté et j’ai refusé car il était trop clivant. J’ai nommé une commission de quatre élus et nous suivons ses orientations à la lettre. Les résultats sur la propreté commencent à être visibles. Et avec les agents qui travaillent la nuit, le fini-parti a pris du plomb dans l’aile », poursuit-il.
Une version contestée par Patrick Mennucci. « Dans le blanc des yeux, dommage que tu n’acceptes pas la vérité. Ça grandit de dire la vérité », rétorque-t-il. « Alors dis-la », réplique aussitôt Eugène Caselli. « Mais je la dis. C’était l’époque où Elie-Claude Argy dirigeait encore le syndicat FO », insiste Patrick Mennucci. « Ça, c’est ta version », balaye définitivement Eugène Caselli.
Ni les différentes visions du vivre-ensemble à Marseille, ni le développement économique et l’emploi, où les solutions prônées par les uns et les autres peuvent apparaître comme complémentaires, ni la future métropole que chacun appelle de ses vœux, ne donnèrent lieu à des échanges d’une telle intensité.

Six visions de la fonction de maire

Ne restait plus que le mot de la fin pour tenter de se démarquer une ultime fois aux yeux des électeurs. Eugène Caselli était le premier à ouvrir le bal. « Je suis un homme de gauche mais avant tout libre et réaliste. Nous faisons tous référence à Jaurès qui disait pragmatique que « pour aller vers l’idéal, il faut passer par le réel ». Marseille a besoin de solidarité, de rigueur, d’égalité. Il faut en finir avec le clientélisme et faire appel à la société civile. Marseille a besoin d’un maire qui s’engage, qui soit différent : c’est ce maire que je veux être », souligne le président de la communauté urbaine.
Samia Ghali se dit quant à elle « prête à être maire de Marseille » pour « diriger cette ville dans l’équité et la fraternité » et « la faire passer dans la modernité ». « J’ai le courage et la volonté. Il ne manque plus que les Marseillais », conclut-elle.
Marie-Arlette Carlotti veut pour sa part renouer le lien qui unit Marseille à ses habitants. « Je veux que les gens disent : « Marseille je l’aime comme je l’ai jamais aimée » », image-t-elle. Et d’en appeler à la mobilisation dès ce dimanche 13 octobre. « Donnez-moi la légitimité pour dire « non » à un système dont vous ne voulez plus, dont je ne veux plus », martèle-t-elle.
Christophe Masse déplore quant à lui la longueur du règne de Jean-Claude Gaudin en observant qu’« un jeune qui va voter pour la première fois n’aura connu qu’un seul maire ». Pour rompre avec l’équipe sortante, il plaide pour un « maire sérieux » qui fasse preuve de « rigueur », d’« inventivité », préoccupé par la « conquête économique ». « Il faut un maire audacieux, de son temps, qui s’occupe exclusivement de sa ville. C’est ce maire que je veux être », résume-t-il.
Patrick Mennucci propose quant à lui aux Marseillais « d’écrire vous-mêmes votre histoire (…) en votant pour le candidat qui a eu le courage de s’opposer au système, qui a un programme complet ». « Il faut concrétiser cette ambition en votant pour moi, pour rétablir l’autorité communale, le budget de la ville en diminuant le train de vie de la mairie et pour créer 50 000 emplois privés », étaye-t-il.
Enfin, le fils d’immigrés libanais qu’est Henri Jibrayel veut que « cette ville qui lui a donné la chance d’être parlementaire » cesse de « se détériorer ». Il a ainsi l’ambition d’être « celui qui impulsera une dynamique à cette ville, l’espoir à tout un chacun ». « Je veux rendre à cette ville ce qu’elle m’a donné. Que ceux qui veulent que cette ville avance, qu’ils votent Henri Jibrayel », conclut-il.
La parole est désormais aux Marseillais dès ce dimanche 13 octobre.
Serge PAYRAU

Articles similaires

Aller au contenu principal