Provence Alpes Côte d’Azur : la région débloque 3 millions d’euros pour l’accueil des migrants

Publié le 15 septembre 2015 à  9h43 - Dernière mise à  jour le 29 octobre 2022 à  13h44

Face au drame qui se déroule en Méditerranée, les élus régionaux se sont réunis en Assemblée plénière extraordinaire ce lundi 14 septembre. Une seule question à l’ordre du jour : la solidarité avec les migrants. Ainsi, la mise en place d’un fonds de 3 millions d’euros a été voté. Il va venir en aide à la politique d’accueil conduite par les communes volontaires ainsi que par des associations. Dans ce cadre, des maires ainsi que des représentants du tissu associatif étaient présents dans l’Hémicycle. Le Président Vauzelle est revenu sur les enjeux, a rappelé son combat, depuis de nombreuses années afin que soit pris en compte le fait que la Méditerranée est une communauté de destin. Un rapport voté par la majorité de gauche alors que la droite s’abstenait, après une intervention très critique envers le gouvernement de Pierre Paul Leonelli, et un autre, tout aussi critique de Chantal Eymeoud, mais qui prenait en compte la question des migrants au point que des intervenants d’ EELV et du PS lui ont rendu hommage. Quant au FN, ces deux intervenants ont prouvé que ce parti n’avait en rien changé, le premier, T de la Tocnaye, a traité les migrants de «couards», le second, Hubert de Mesmay, de critiquer les propos du Pape, le PS, la Droite, d’évoquer un million de migrants à venir… Finalement le FN ne prendra pas part au vote. Par ailleurs le 04.91.57.55.55 se met en place pour donner tous les renseignements aux associations, aux personnes qui le souhaitent.

(Photo Robert Poulain)
(Photo Robert Poulain)
(Photo Robert Poulain)
(Photo Robert Poulain)

Michel Vauzelle, le président de la région rappelle: «Depuis le début de l’année ce sont environ 350 000 migrants d’une grande diversité de nationalités Syriens, Afghans, Libyens, Érythréens, Irakiens, Somaliens, Soudanais… qui ont atteint les frontières de l’Union Européenne pendant que plusieurs autres milliers ont trouvé la mort au bout de leur périple désespéré». «Il aura fallu, poursuit-il que les pays européens se retrouvent face à la réalité de cette crise humanitaire, à la détresse des populations et à la mort de plusieurs milliers d’adultes et d’enfants à quelques encablures de leurs côtes, pour que la Commission européenne se décide à coordonner des mesures exceptionnelles à l’échelle de l’Europe».

La France s’engage à accueillir 24 000 réfugiés pour 65 millions d’habitants

(Photo Robert Poulain)
(Photo Robert Poulain)

Dans ce cadre la France s’engage à accueillir 24 000 réfugiés pour 65 millions d’habitants. Le président rappelle son désaccord avec l’Europe : «La Méditerranée n’est pas une politique de voisinage mais une communauté de destin. Et, contrairement à ce que certains se complaisent à dire nous ne sommes pas menacés par des hordes mais nous avons à accueillir des hommes, des femmes, des enfants, qui fuient des situations de guerre. Et comment ne pas rappeler, ici, que c’est l’Armée d’Afrique qui a libéré notre région». Évoque l’esprit du 11 janvier : «Lorsque la France a été victime d’attentats djihadistes, 4 millions de personnes sont descendus dans la rue pour dire non à la haine, oui à la France des droits de l’Homme, et des dizaines de chefs d’État sont venus manifester à Paris, à leur côté. Preuve que, au-delà du poids économique, la France restera une grande Nation tant qu’elle restera le pays des droits de l’Homme, de la liberté, l’égalité et la fraternité». Puis de dénoncer : «On n’adhère pas à l’Europe pour rejoindre l’Otan, pour l’Euro, on adhère à l’Europe sur le fondement moral des Pères fondateurs, sur le plus jamais ça. Malheureusement ça se reproduit, c’est cet enfant mort dont la photo a produit un choc et qui n’a pas été tué par Daesh mais parce que l’on n’a pas su l’accueillir. C’est aussi les images terribles qui nous viennent de Macédoine, de Hongrie». L’actualité s’impose, avec la position de l’Allemagne de fermer ses frontières après les avoir largement ouvertes : «Elle a été victime de sa générosité. Mais la frontière n’est pas fermée définitivement, il s’agit de permettre à la Bavière et à l’Allemagne de s’organiser».

«De nombreux français réalisent que la peur n’est pas une solution»

Il n’omet de signaler qu’il n’a pas attendu une photo, terrible, pour se mobiliser. « En Mai dernier je me suis rendu en Sicile avec les représentants des Régions méditerranéennes d’Europe pour lancer la campagne « Nous sommes tous Méditerranéens » et pour discuter des défis liés aux tragédies migratoires en Méditerranée».
Sophie Camard, EELV, indique à son tour que voilà plusieurs mois que la région se mobilise «et nous étions bien seuls». «Actuellement, poursuit-elle, l’Allemagne ferme ses frontières, preuve que la solution n’est qu’européenne, or l’Europe est absente. Et on ne doit pas ignorer que notre pays est l’un des plus durs en matière d’accueil des réfugiés, 75% des demandes d’asile sont rejetées et ce droit ne donne aucune aide». Elle apprécie le fait que «de nombreux Français réalisent que la peur n’est pas une solution. Oui, la réalité rattrape les politiques, de Droite comme de Gauche et il était grand temps. Notre responsabilité, maintenant, est de coordonner les élans de générosité».
C’est un tout autre discours que tiendra l’intervenant suivant, Thierry de la Tocnaye (FN) qui dénoncent les migrants : «Je suis choqué que des gens préfèrent fuir que résister à Daesh». Et de jouer sur les peurs : «Il y a parmi les migrants des dizaines d’agents de Daesh et nous allons avoir des attentats à répétition».
«Urgence il y a et elle ne peut pas, n’en déplaise au Front National, être réglée uniquement dans les pays concernés»
Chantal Eymeoud (LR) se réjouit de la tenue de cette plénière «car urgence il y a et elle ne peut pas, n’en déplaise au Front National être réglée uniquement dans les pays concernés, ce serait trop simple et trop facile». Pour elle : «Nous savons, et l’Histoire l’a démontré, que les mouvements de population sont inévitables, tant il y a de régions dans le monde dévastées par des guerres, des pays démolis par des guerres civiles, par la misère qui concerne tant de peuples sur une planète menacée par le réchauffement climatique et où les inégalités entre riches et pauvres se creusent dans des proportions indécentes». Elle considère: «Aujourd’hui, il y a urgence car la guerre en Syrie, la situation en Irak, la progression barbare et exterminatrice de Daesh et un terrorisme meurtrier nous met au pied du mur. Notre pays, notre Région au carrefour de la méditerranée ont à la fois le devoir moral et l’obligation éthique d’apporter des solutions.»
Puis de dénoncer la politique de la région, de l’État: «La posture du verre à moitié plein ou à moitié vide confondant ainsi les compromis -voire compromissions- des congrès du Parti socialiste, les substituant au courage que demande l’engagement de la France dans la gestion des affaires du monde». «Oui, Monsieur le Président, nous devons exprimer la solidarité de la France envers les peuples opprimés. La première expression de celle-ci est militaire et ne relèvent pas de notre compétence mais nous savons que c’est par l’emploi de la force que passe la résolution de cette crise. La seconde est l’impérieuse réforme du droit d’asile, aussi bien dans sa définition que dans son traitement». Pierre Paul Leonelli (LR) critiquera la Région et «l’État (qui) se défausse sur les collectivités locales pour faire porter le fardeau d’une politique d’accueil qu’il ne maitrise ni à Paris ni à Bruxelles».

«Lorsque quelqu’un se noie on ne cherche pas à savoir qu’elle est sa religion»

Si Gérard Piel, Front de Gauche, exprime son accord avec la délibération, il déplore que «d’autres régions n’aient pas pris la même initiative». Dénonce «les réponses tardives de la France et de l’Europe» et exprime son opposition à des frappes militaires en Syrie : «Le gouvernement français doit bloquer l’escalade dans ce pays». Jugeant : «Lorsque la France se prononce pour l’accueil de 24 000 réfugiés c’est dérisoire». Jacques Lerichomme, Front de Gauche, considère: «Les historiens diront plus tard si nous vivons des moments historiques. Mais ce qui est sûr c’est que le Moyen-Orient vit la barbarie, que des milliers de réfugiés sont sur les routes. C’est cette horreur que nous devons prendre en compte. Car, comment être heureux lorsque des hommes, des femmes, des enfants, se noient. Et, lorsque quelqu’un se noie on ne cherche pas à savoir qu’elle est sa religion, on le sauve. Nous sommes dans une société en crise où il est plus facile d’attiser les haines que d’aller vers la solidarité. Alors, je tiens d’autant plus à saluer le travail des associations. Et la belle initiative que nous prenons aujourd’hui montre qu’il est possible d’avoir une ambition politique et cela peut permettre à d’autres de se mobiliser. L’Europe s’est construite après deux barbaries, elle n’est pas celle des murs, des matraques, elle est celle des solidarités. Il est temps que l’ensemble des démocrates se ressaisissent».
Jean-Louis Joseph, PS, revient à son tour sur la politique méditerranéenne conduite depuis 3 mandats avant d’affirmer : «La France est toujours grandie lorsqu’elle ne craint pas de s’ouvrir».
En marge de la plénière, le recteur de l’académie d’Aix Marseille Bernard Beignier, indique : «Nous avons reçu des consignes, tous les enfants mineurs qui arrivent sur notre territoire doivent être scolarisés. Nous avons pour cela le dispositif Casnav adapté à l’accueil des enfants qui ne parlent pas le français. Et, si le besoin s’en fait sentir, nous pourrons faire appel à de jeunes retraités» . Emmanuel Ethis, le recteur de Nice, ajoute : «L’accueil de la maternelle à l’université est une consigne, c’est aussi un devoir». Cécile Helle, Maire d’Avignon : « J’étais à la réunion de Paris avec les Maires, le Premier ministre et le ministre de l’Intérieur car nous sommes d’accord pour accueillir des migrants et, donc, la question est maintenant de savoir comment les accueillir». Pour Christophe Castaner, député maire de Forcalquier, tête de liste PS pour les prochaines régionales : «La politique s’honore quand elle est cohérente dans la durée et fait preuve d’exemplarité» et de rendre hommage à la politique conduite par Michel Vauzelle, avant d’expliquer qu’il n’a aucun doute sur le fait que la population de sa commune viendra en aide aux réfugiés. Pierre Aschieri, le maire de Mouans-Sartoux (Alpes-Maritimes) accueillera des réfugiés: «C’est une tradition pour nous, 500 Harkis ont rejoint le village en 1962 alors que la commune ne comptait que 2 500 habitants et cela c’est bien passé. Là, il va en aller de même d’autant que nous comptons des associations dynamiques qui sont prêtes à se mobiliser ».
Michel CAIRE

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