Provence Studios : Si Martigues devenait le Hollywood européen ?

Publié le 14 mars 2021 à  12h36 - Dernière mise à  jour le 31 octobre 2022 à  15h31

Alors qu’ils accueillent le tournage de la série américaine Serpent Queen, Provence Studios prouvent toute l’étendue de leur potentiel. Sur les bords de l’étang de Berre, à deux pas de la Méditerranée, tout est réuni pour que les infrastructures martégales aspirent à un avenir doré. Olivier Marchetti, le fondateur et président de Provence Studios, revient sur une montée en puissance de tout un territoire.

Provence Studios, des installations uniques en France ©Provence Studios
Provence Studios, des installations uniques en France ©Provence Studios

Destimed: «Provence Studios» est l’un des fleurons de l’industrie cinématographique française, malgré cela peu de monde connaît la portée de votre travail. Pourquoi ?
Olivier Marchetti: Cette discrétion faisait partie, en quelque sorte, de notre stratégie de développement. Nous avions le souhait de monter un projet fort et d’attendre qu’il soit à maturité pour commencer à communiquer. Peut-être aussi que nous avions le savoir-faire, mais pas trop le faire-savoir.

Quel a été le déclic qui vous a poussé à vous ouvrir vers l’extérieur ?
L’arrivée de Micke Ristorcelli dans notre équipe a changé les choses ou plutôt les a accélérées. Avec son œil neuf, il est venu un jour et il nous a dit : «Les gars c’est fou ce qui se passe ici et nous devons le raconter !» Il nous a bougés, nous en a fait prendre conscience et nous le remercions pour cela. il nous a permis de faire évoluer les choses plus vite.

Un carnet de réservation complet jusqu’en novembre 2021

Pourtant, vos studios accueillent des tournages de très grand calibre…
Nous devons également cette discrétion aux productions, qui refusent souvent que nous parlions d’un tournage en cours, pour éviter d’éveiller la curiosité. Cela fait tout de même 7 ans maintenant que nous participons à des grandes productions comme Taxi 5. D’ailleurs, nous allons accueillir la série « Serpent queen », d’avril à septembre prochain. Elle est produite par Francis Lawrence, le même qui avait fait Hunger Games. C’est quelque chose de vraiment énorme. Nous ne sommes pas encore entrés dans la phase de tournage, nous sommes en pleine préparation. D’ailleurs, la star des décorateurs, qui travaille avec Luc Besson, est souvent chez nous en ce moment et il ne cesse de nous dire que nous avons un potentiel énorme. Que quelqu’un de son niveau puisse penser cela est une réelle fierté pour nous.

Quel est l’état de santé de Provence Productions au cœur de la crise sanitaire ?
Cette situation a forcément impacté notre business, mais au final pas autant que l’on aurait pu l’imaginer. L’activité dans les studios est vraiment très forte et nous n’avons absolument pas le temps de nous ennuyer. Le carnet de réservations est complet jusqu’en novembre 2021, à l’exception de deux petits studios.

Comment expliquez-vous ce dynamisme ?
Nous avons mis en place des protocoles sanitaires vraiment très stricts. Il faut dire que nous n’avions pas vraiment le choix, si nous voulions travailler dans des conditions optimales de sécurité. Nous testons plusieurs fois par jour l’ensemble des personnes évoluant dans l’enceinte. Nous avons une équipe médicale, dans nos locaux, et nous faisons des contrôles de température à chaque entrée de bâtiment. Bien évident, il y a les bornes pour le gel, les masques… Sur les plateaux, l’air est ventilé en permanence. Le plus important reste de ne pas laisser entrer le virus et pour cela nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir.

Une volonté de créer un pôle de l’industrie du cinéma en région Provence-Alpes-Côte d’Azur

S’il fallait faire un classement des studios au niveau national, quelle serait votre position ?
En France, nous sommes je pense dans le top 3 (rires). Bon allez, dans le top 2. Il y a bien évidemment Bry-sur-Marne, en région parisienne, qui est un complexe d’une toute autre envergure. Dans le Sud, je pense notamment à La Victorine du côté de Nice, mais je ne préfère pas les voir comme des concurrents, plus comme des coéquipiers.

Un complexe de taille à deux pas de Martigues ©Provence Studios
Un complexe de taille à deux pas de Martigues ©Provence Studios

Pouvez-vous détailler les relations qui vous lient à La Victorine ?
La Région sud a une volonté de créer un réel pôle de l’industrie du cinéma sur notre territoire. Dans cet optique, Christian Estrosi et Renaud Muselier nous ont demandé de collaborer pour optimiser notre travail. Du coup, nous travaillons main dans la main et nous échangeons vraiment très souvent. Nous souhaitons tous qu’il y ait un hub de studios en Paca. Nous discutons également avec les studios de la Belle de mai, à Marseille, avec qui je pense il existe un sentiment de fraternité. D’ailleurs, nous ne remercierons jamais assez les équipes de Plus belle La vie.

Quel est le rapport entre Provence Studios et «Plus belle la vie» ?
Ils sont très souvent critiqués. Mais que l’on n’aime ou pas la forme, le travail accompli par les équipes au niveau technique nous a permis de bénéficier d’une formation formidable. C’est une superbe machine, tant au niveau économique qu’au niveau de l’expérience de l’ensemble des métiers. Nous sommes donc en mesure de piocher dans un vivier étonnant, sans avoir à aller chercher des experts dans d’autres régions.

L’accompagnement de la Région, la Métropole et la CCI

Comment se porte le secteur de l’emploi dans l’industrie cinématographique, dans les Bouches-du-Rhône ?
Aussi étrange que cela puisse paraître, je dirais qu’il est en tension dans notre région. Nous avons de plus en plus de productions qui viennent chez nous et nous cherchons à recruter pour couvrir nos besoins grandissants.

Échangez-vous avec les institutions au sujet de cette problématique ?
Nous sommes accompagnés par la Région, la Métropole et la CCI, qui mettent en place des filières de formation dans l’industrie cinématographique. A proximité, Il y a à Arles une très bonne école, mais les jeunes pour le moment préfèrent partir à l’étranger, dès la fin de leur cycle. Nous souhaitons les garder sur notre territoire et leur proposer des projets d’envergure.

Pensez-vous qu’il y ait une possibilité de détrôner la région parisienne, qui est la référence en France ?
Cela semble vraiment compliqué. Nous sommes dans un État jacobin ou la centralisation n’est pas une vague idée. Tourner à Paris est tellement plus simple, notamment pour les acteurs qui sont, pour la plupart, localisés dans la zone. Mais, de plus en plus, cette région est saturée et les maisons de production cherchent des alternatives. Nous sommes la solution ! Chez nous la lumière est inégalable, tellement plus belle. D’ailleurs de nombreux professionnels nous confessent qu’elle est la même qu’à Los Angeles. Il ne faut pas oublier que de nombreuses scènes se tournent en extérieur.

Dix-neuf euros de retombées pour un euro investi

Existe-t-il une économie qui découle de l’industrie cinématographique dans le département ?
Sans conteste ! Rien qu’au niveau de l’hôtellerie, les retombées atteignent le million d’euros pour une saison de tournage. Une étude d’Atout France a récemment montré que pour un euro investi, nous dégageons 19 euros de retombées. De plus, il faudrait prendre en compte d’autres revenus, notamment au niveau touristique que nous ne sommes pas en mesure d’évaluer clairement.

Qu’entendez-vous par là ?
Je discutais récemment avec des personnes qui venaient du Nord de la France et qui m’expliquaient qu’ils avaient décidé de venir en vacances près de Martigues pour voir où était tournée Camping Paradis. C’est assez fou quand on y pense !

Propos recueillis par Mathieu Seller

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