Rafle et destruction des quartiers du Vieux-Port et de l’Opéra: ‘C’est Pétain et Vichy qui ont envoyé la police française, dirigée par l’infâme Bousquet’

Publié le 24 janvier 2022 à  17h46 - Dernière mise à  jour le 4 novembre 2022 à  12h27

Un public plus nombreux que les années précédentes se pressait ce dimanche place du 23 janvier 1943 Fortuné Sportiello puis place de l’opéra pour commémorer le 79e anniversaire de la rafle et de la destruction des quartiers du Vieux-Port et de l’Opéra . Benoît Payan, le maire de Marseille, annonce qu’une signalisation va être mise en place pour rappeler ce drame et ses victimes.

Cette cérémonie s'est tenue notamment en présence du préfet de région Christophe Mirmand, du maire de Marseille Benoît Payan, de la députée Alexandra Louis, de Caroline Pozmentier Sportich, représentant Renaud Muselier président de Provence-Alpes-Côte d'Azur et de Solange Biaggi représentant Martine Vassal, présidente du département 13 et de la métropole Aix-Marseille-Provence ©G.G.
Cette cérémonie s’est tenue notamment en présence du préfet de région Christophe Mirmand, du maire de Marseille Benoît Payan, de la députée Alexandra Louis, de Caroline Pozmentier Sportich, représentant Renaud Muselier président de Provence-Alpes-Côte d’Azur et de Solange Biaggi représentant Martine Vassal, présidente du département 13 et de la métropole Aix-Marseille-Provence ©G.G.

Entre le 22 et le 24 janvier 1943, Marseille a connu la rafle la plus importante après celle du Vél’d’Hiv à Paris et la plus importante destruction d’un ensemble urbain en France. Ordonnée par Adolf Hitler lui-même, « l’Opération Sultan » a été réalisée avec la collaboration des autorités et de la police françaises du 22 janvier au 17 février 1943. Pendant ces deux jours et tout au long des semaines qui suivirent. 1 642 Marseillais furent envoyés à Compiègne avant d’être déportés. Parmi eux, 782 juifs furent envoyés dans les camps d’extermination de Sobibor.

«Nous voilà, cette année encore, réunis pour commémorer l’un des épisodes les plus tragiques de l’histoire de Marseille. Les rafles des 22 et 23 janvier 1943 sont, à juste titre, considérées comme la catastrophe la plus effroyable que la ville ait connue depuis la mise à sac des Aragonais en 1423 et la grande peste de 1720», rappelle Bruno Benjamin, le président du CRIF Marseille Provence. Il ajoute: «Organisées à la demande de l’Occupant nazi, complaisamment exécutées par la police française qui avait pactisé avec le Mal, elles sont à jamais gravées dans la conscience collective, votre présence l’atteste».

«Marseille était un des hauts-lieux de la mémoire juive»

Bruno Benjamin, président du Crif Marseille Provence © G.G.
Bruno Benjamin, président du Crif Marseille Provence © G.G.

Pour le président du Crif : «Nul ne saurait ignorer ces faits. 79 ans après, ce sont des plaies qui ne cicatrisent pas. Les milliers de victimes, traitées comme des bestiaux, sont pour nous un fil continu qui court à travers le temps». Il rappelle que «Marseille était un des hauts-lieux de la mémoire juive. Cela irritait l’Occupant botté et casqué. Châtier la ville, c’était s’attaquer aux Juifs. Il fallait qu’ils fussent, telles des proies pourchassées, débusquées et arrêtées dans le cadre de « l’opération Sultan », conçue et élaborée par le général Karl Oberg, représentant de Himmler en France, avec le concours servile de René Bousquet, secrétaire général de la police de Vichy, et ses sous-fifres galonnés.

«C’est Pétain et Vichy qui ont envoyé la police française»

Et de lancer, ciblant sans le nommer Eric Zemmour: «Désignons franchement les vrais responsables, n’en déplaise à ceux qui tentent de disculper, sinon d’absoudre l’État français installé en 1940 sur les bords de l’Allier. C’est Pétain et Vichy qui ont retiré la nationalité française à des milliers de juifs. C’est Pétain et Vichy qui ont instauré le statut des Juifs et imposé le port de l’étoile jaune. C’est Pétain et Vichy qui, dans leur délire antisémite, ont amalgamé les Juifs aux repris de justice, aux étrangers en situation irrégulière, à toute personne indésirable ou marginale dépourvue de carte alimentaire. C’est Pétain et Vichy qui ont envoyé la police française, dirigée par l’infâme Bousquet, arracher des enfants à leurs parents désemparés, des enfants nés sur le sol français, pour les expédier dans les camps de la mort. Ainsi 782 de nos frères et sœurs ont terminé leur parcours dans le camp d’extermination de Sobibor».

«L’antisémitisme n’est pas une notion du passé»

Bruno Benjamin regrette de devoir constaté : «L’antisémitisme n’est pas une notion du passé. Soyons lucides : ce fléau permanent, constant et avec obstination désigne toujours le juif en bouc émissaire. On le rencontre parfois dans la rue, il est présent sur les réseaux sociaux, ce grand déversoir de haine où le Juif est caricaturé, insulté, menacé, Sali dans sa dignité, et Israël régulièrement condamné, nié jusque dans son existence, en toute impunité».

prix Robert Mizrahi

Au préalable Marcel Toros, neveu de Denise Toros-Marter, a lu le testament d’Auschwitz écrit par cette dernière. Un testament comme un appel: «Puisse le flambeau de la Mémoire collective, que nous vous transmettons avant d’arriver au bout de notre voyage, vous protéger à tout jamais d’un nouvel Auschwitz».
Lionel Stora, président régional du Fonds Social Juif Unifié annonce que «alors que les témoins sont de moins en moins nombreux, il importe de rendre la jeunesse active». Pour cela le Fonds, en partenariat avec la ville de Marseille, lance le prix Robert Mizrahi: «une initiative qui va encourager les jeunes à rencontrer leurs aînés». Albert Barbouth de l’association Fonds mémoire d’Auschwitz évoque les 250 familles juives du quartier de l’Opéra qui sont parties vers les camps de la mort où elles ont été exterminées dès leur arrivée.
Michel CAIRE

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Benoît Payan annonce que ces événements tragiques seront mieux signalés

Le maire de Marseille, Benoît Payan annonce que les endroits où des personnes ont été déportées ainsi que leur nom seront signalés ©ville de Marseille
Le maire de Marseille, Benoît Payan annonce que les endroits où des personnes ont été déportées ainsi que leur nom seront signalés ©ville de Marseille

Bruno Benjamin a tenu à saluer la présence, pour la deuxième fois du Maire de Marseille. «Il y a longtemps qu’un Maire n’était pas venu», insiste-t-il. Et Benoît Payan de souligner: «C’est ma place, mon rôle d’être là. L’antisémitisme et le racisme sont un poison, le négationnisme une insulte à notre Histoire. Ce n’est pas rien ce qui s’est passé. Pétain a utilisé la France, complice des nazis il a déshonoré notre République. Il a livré des hommes, des femmes, des enfants aux nazis au seul fait qu’ils étaient juifs. On n’a pas le droit d’oublier, d’autant moins que certains veulent réhabiliter la mémoire de Pétain. Dans ce cadre, en travaillant avec des historiens, des citoyens, des associations, nous allons faire vivre cette mémoire. Nous allons matérialiser les immeubles des Vieux quartiers qui ont été détruits, signaler les endroits où des personnes ont été déportées ainsi que leur nom».
M.C.)]

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