Région de Gendarmerie Paca : prévention, sécurité, état d’urgence… entretien avec le Chef d’Escadron Pascal Couvert

Publié le 8 juillet 2017 à  23h30 - Dernière mise à  jour le 29 octobre 2022 à  13h46

En cette période de départs en vacances, le chef d’escadron Pascal Couvert, adjoint au Chef du bureau de la section sécurité publique et de la sécurité routière pour la Région de Gendarmerie Paca dévoile la mise en place des dispositifs de sécurité routière, s’inscrit dans la prévention mais n’omet pas pour autant la répression «pour les infractions génératrices d’accidents». Revient sur les récentes réglementations, évoque la hausse des accidents et parle «d’une attention particulière portée aux deux-roues motorisés pendant toute la saison». Aborde la situation d’état d’urgence et les missions inhérentes… Entretien.

Le Chef d'escadron Pascal Couvert, adjoint au Chef du bureau de la section sécurité publique et de la sécurité routière pour la Région de Gendarmerie Paca (Photo P.M.-C.)
Le Chef d’escadron Pascal Couvert, adjoint au Chef du bureau de la section sécurité publique et de la sécurité routière pour la Région de Gendarmerie Paca (Photo P.M.-C.)

Que représente pour la Gendarmerie cette période estivale?
Pour la Gendarmerie et notamment pour la Région Gendarmerie de Provence-Alpes-Côte d’Azur, c’est un dispositif d’ampleur qui est mis en place chaque année. Un dispositif de surveillance circulation est renforcé lors des grands transhumances comme ce week-end.

Un week-end classé rouge?
Le premier gros flux est parti hier et, ce samedi est classé rouge sur toute la France.
La densité est très forte car tout arrive chez nous de l’autoroute A6, A7 voire A8. Et cela va prendre toute la façade méditerranéenne: le 13, le 83, le 06 mais cela influe également sur une partie du 84 puisqu’il il y a souvent des ralentissements au niveau de Orange avant l’arrivée au péage tant connu de Lançon-de-Provence où il peut y avoir un temps certain d’attente pour pouvoir le traverser.

Quelle organisation est mise en place par la Gendarmerie?
Quotidiennement la Gendarmerie est sur le terrain en ce qui concerne la sécurité routière. Lors de ces journées, on mobilise, notamment sur la région Paca, près de 2 000 militaires répartis sur l’ensemble des 6 départements. Tout cela toujours dans un contexte terroriste avéré sous le cadre de l’état d’urgence, ce qui génère un renforcement et une vision plus globale et plus sécuritaire. Les effectifs sont donc multipliés par trois. Déjà dans le cadre du Dispositif Estival de Protection des Populations (DEPP) nous avons plus de 500 gendarmes qui viennent renforcer les effectifs de la région Paca. Ils sont déployés sur l’ensemble de la côte et sur le 04 et le 05. Ces militaires sont déjà partout et les jours de grande transhumance, comme ce samedi, tous les gendarmes qui sont à l’extérieur font partie du dispositif. Que les gens ne soient pas étonnés de voir des gendarmes n’importe où…

Comment intervenez-vous?
Dans un premier temps ce dispositif d’ampleur n’a pas à vocation à être répressif. On n’est pas là pour embêter les gens. On se recentre surtout sur la prévention voire la répression des infractions génératrices d’accidents: la vitesse, l’alcool, la conduite sous stupéfiant, le téléphone, la ceinture, les casques, les surcharges, les dépassements par la droite et, la circulation sur la voie centrale de l’autoroute. A ce propos, on s’aperçoit que les gens circulent sur les deux voies de gauche et il n’y a jamais personne sur les voies de droite. Si tout le monde se mettait sur la voie de droite ce serait beaucoup plus fluide et cela passerait beaucoup mieux.

Quelles sont les zones d’intervention de la Gendarmerie?
Les routes et les autoroutes, qui sont concédées par l’État, sont sur le domaine de la Gendarmerie nationale que ce soit des Pelotons d’autoroute des PA ou des PMO des Pelotons motorisés. Ce sont des unités spécialisées qui interviennent sur les autoroutes avec des véhicules sérigraphiés mais aussi des véhicules et motos banalisés. Et dans ces cadres de grands départs, on renforce le dispositif avec des ETM (Équipements de terrain mobiles), c’est ce qu’on appelle la voiture radar embarquée. Elle s’insère dans le flot de circulation et elle prend les vitesses excessives dans les deux sens de circulation.

Et plus largement, quel est le périmètre de vos compétences?
On est compétent sur l’ensemble du territoire national. Mais on a nos zones. Il y a la ZPN (Zone de police nationale) et la ZGN (Zone gendarmerie nationale), mais maintenant, qui plus est avec le risque terroriste, on intervient partout et on travaille ensemble.

Quels conseils donnez-vous en cette période des départs?
Plusieurs vérifications concernent le véhicule: le contrôle des organes mécaniques, les niveaux d’eau, d’huile, de carburant; la visibilité des phares et des vitres; le contrôle de toutes les lumières et très important, il faut vérifier aussi la pression des pneumatiques. Par temps de grosses chaleurs, les personnes peuvent même ajouter 0,3 bar par rapport à la préconisation du constructeur automobile. Si on leur dit la pression est de 2.4, ils peuvent mettre 2.7. Il vaut mieux un véhicule avec des pneus légèrement surgonflés que sous-gonflés pour éviter l’éclatement. Pendant le voyage, il faut avoir une carte ou un GPS. Attention avec le GPS, les informations peuvent être erronées car, la réglementation sur le terrain peut être modifiée. On peut avoir des sens interdits, des déviations qui ne sont pas nécessairement mis en place ou intégrés dans le GPS. Notamment si vous possédez un ancien GPS qui n’a pas été mis à jour. Il ne faut pas suivre à l’aveugle les décisions du GPS. Ensuite, Il faut respecter la règle de la pose toutes les deux heures; de bien penser à emporter une bouteille d’eau dans la voiture car on peut rester très longtemps sur la route et toutes les voitures n’ont pas la climatisation. Et une attention particulière est à porter aux enfants et aux personnes âgées. Sur l’autoroute, il est conseillé d’écouter le 107.7 qui permettra à l’automobiliste de quitter l’autoroute avant de se retrouver dans un gros bouchon. Attention également au chargement, à la surcharge. On a vu des chargements atteindre deux mètres de hauteur et parfois, 70% de poids supplémentaires par rapport à la voiture. On part là pour un éclatement assuré des pneus. Et enfin une petite astuce, pensez à mettre la roue de secours en dernier, après les bagages, pour éviter de tout ressortir en cas de crevaison. En ce qui concerne les plaques d’immatriculation, clignotants et feux, ne pas les masquer avec les vélos.

Des nouvelles réglementations?
Oui, notamment en direction des deux-roues motorisés. On va porter une attention particulière à cette population qui est malheureusement surreprésentée dans l’accidentologie, notamment en région Paca. On va s’en occuper, on va les contrôler, les orienter tout au long de la saison estivale. En ce qui concerne les nouvelles réglementations, depuis novembre 2016, il y a une obligation de porter des gants pour les deux-roues motorisés avec une amende de 68 € et un point de moins pour l’omission. Il ne faut pas oublier que, depuis le 1er janvier 2017, la vidéo-verbalisation permet la répression de nouvelles infractions dans la circulation, l’arrêt, le stationnement sur les bandes d’arrêt d’urgence, le chevauchement, le franchissement des lignes continues, le port du casque. Cela veut dire que les gens ne sont pas nécessairement arrêtés mais recevront une contravention plus tard chez eux. La video-verbalisation existait déjà mais les infractions sont renforcées depuis cette date. Depuis le 22 mars 2017, le port du casque à vélo est obligatoire pour les enfants qui ont moins de 12 ans. Les parents doivent penser à acheter un casque adapté et bien fermé. S’il est légèrement lâche cela ne sert à rien. Et depuis le 1er juillet 2017, la plaque d’immatriculation doit être en conformité de taille (21cm x13cm) sinon c’est une amende de 135€. Il y a un délai de six mois pour se mettre en conformité en sachant que l’on a énormément de plaques dans la Région qui sont très petites et donc non conformes.

Et qu’en est-il de la circulation en interfiles?

une expérimentation de la circulation en interfiles pour les deux-roues motorisés dans 11 départements dont les Bouches-du-Rhône (Photo Hagay Sobol)
une expérimentation de la circulation en interfiles pour les deux-roues motorisés dans 11 départements dont les Bouches-du-Rhône (Photo Hagay Sobol)

Elle est strictement interdite. Mais à la demande de certaines associations, la Direction interministérielle de la sécurité routière a lancé en février 2016 une expérimentation de la circulation en interfiles pour les deux-roues motorisés dans 11 départements dont les Bouches-du-Rhône. Cette autorisation concerne la circulation sur autoroute et route avec au moins deux fois deux voies séparées par un terre-plein central où la vitesse autorisée est comprise entre 70 et 130 km/ h. Lorsqu’il y a trois voies de circulation les deux roues motorisés peuvent circuler entre la deuxième et la troisième voie, la vitesse étant limitée à 50 km/h.Il faut surtout adapter sa vitesse au condition de circulation. Pour rappel la circulation interfiles est interdite en ville. Après, on verra si cette expérimentation débouchera sur une autorisation généralisée dès 2020 ou pas.

Et le téléphone au volant?
Il faut savoir que 31% des conducteurs déclarent lire des SMS au volant, 61% des conducteurs de moins de 35 ans lisent leurs SMS en conduisant et ce qui est de plus en plus dommageable, c’est que les Français perçoivent de moins en moins le danger de téléphoner au volant. En 2004, ils étaient 90% à le penser, en 2013, ils ne sont plus que 76%. Téléphoner au volant multiplie par 23 le risque d’accident et, un accident corporel sur 10 est lié au téléphone.

Depuis le 1er juillet le permis à points a 25 ans…
C’est bien de le rappeler. Contrairement à l’idée très répandue, on a 8 Français sur 10 qui ont encore leur capital complet de 12 points. Seule une minorité 1 sur 10 a perdu tout son capital de points. Et grâce au permis à points en un quart de siècle on peut avoir une équivalence de près de 85 000 vie sauvées sur les routes.

Est-ce la peur de perdre les points qui influe?
Oui tout à fait. Si on regarde à la mise en œuvre au 1er juillet 1992, on déplorait 9 000 morts par an, en 2016, on est à 3417 tués sur les routes de France. La preuve en est que 77% des conducteurs ont leur 10 points et même 85% d’entre eux ont 10 points ou plus.

La Région Paca est-elle bonne élève?
Quand on est sur la route on conduit et on ne fait rien d’autres. On note beaucoup d’incivilités en Paca, on roule à droite à gauche, on utilise son smartphone, on klaxonne, on ne met pas le clignotant, etc. La route est un partage à faire, elle n’appartient à personne, la route appartient à tout le monde. En ce qui concerne le casque, ils ont du mal à comprendre que c’est la seule carrosserie qu’à un cyclomoteur, un scooter ou autre. Bras nues, tongs, shorts, il faut penser malheureusement que les sanctions sont immédiates et irréversibles pour certains. On rape sur le bitume et la peau n’est pas adaptée à résister. Il faut être conscient, l’accident n’arrive pas qu’aux autres.

On annonce une hausse des accidents après des années de baisse. Pour quelles raisons?
Depuis le début de l’année 2017, la région enregistre une forte hausse de l’accidentologie. Depuis deux ans, c’est la tendance nationale. Selon moi, il faut prendre en compte le terrorisme. Les gens partent moins à l’étranger, moins sur la façade méditerranéenne. On a vu les touristes se recentrer sur la France. La région Paca fait partie des destinations phares des saisons estivales. Avec une météo favorable, on roule plus souvent, plus longtemps. En Paca, pour le six premiers mois de l’année on a une hausse des accidents de plus de 36%, des tués de plus 11% , des blessés de plus 23%. Et les deux-roues motorisés représentent un tiers des tués sur la Région. C’est pour cela que l’on va porter une attention particulière aux deux-roues motorisés pendant toute la saison. Il faut par exemple savoir que la moto ce n’est pas comme une voiture on ne la reprend pas aussi facilement après un temps d’arrêt, il faut se réadapter. Même les motards de la Gendarmerie, lorsqu’ils rentrent de vacances, ils ont un ou deux jours de réadaptation. Puis, le vrai motard roule toute l’année mais on n’a pas que des vrais motards, on a des gens qui ne roulent que lorsqu’il fait beau. Et ces gens là, lorsqu’ils recommencent au mois d’avril, oublient parfois d’assurer la moto, parce qu’ils veulent l’essayer tout de suite; oublie de vérifier la pression et de se réadapter à la machine. Les sensations, on le ne les retrouve qu’au bout de 48 heures, on ne les retrouve jamais tout de suite en moto. Il ne faut pas se dire, après une période d’arrêt que l’on va redémarrer tout de suite, c’est faux. Et ensuite les bons motards sont équipés, ils ont la tenue même en plein été. Ils savent les vrais dangers. Alors une petite phrase pour les motards : « on ne naît pas motard on le devient ». Il faut être humble.

Vous surveillez la route mais en ce qui concerne l’état d’urgence quels sont vos missions?
On surveille la route mais au cours de la saison estivale, il y a des manifestations festives. Le Tour de France, par exemple, au niveau de la Gendarmerie, nous avons trois étapes et une course contre la montre à Marseille. On met en place des équipes spécialisées : hélicoptères, antenne du GIGN et des chiens spécialisés dans la détection d’explosif dans la foule. On a toutes les grosses manifestations, pour le Festival d’Avignon, il y a une sécurisation renforcée; on a aussi les commémorations du 14 juillet à Nice avec la venue du Président de la République… Toutes les manifestations sont prises en compte et dans ce cadre, au niveau national, et notamment en région Paca, on a ce que l’on appelle un Plan de relance tourisme avec des lieux ciblés pour un renfort de militaires de la Gendarmerie. On peut citer, entre autres, les Baux-de-Provence, les villes côtières qui connaissent une forte affluence de touristes.
Qu’est-ce qu’impose pour vous l’état d’urgence?
Plus de patrouilles, plus de sécurité dans les manifestations. Les élus dès qu’ils mettent en place une manifestation doivent prendre attache avec la Police ou la Gendarmerie pour pouvoir dresser un bilan sécuritaire. A partir de là, on évalue s’il faut garder ou non la manifestation. On peut annuler certaines manifestations car malheureusement la Police et la Gendarmerie ne peuvent pas être partout. Au vu de toutes les manifestations, il faut cibler à un certain moment. C’est pour cela que l’on demande fortement aux administrations voire salles de spectacle, cinémas, de prendre aussi en compte la sécurité privée. Mais la gendarmerie est toujours là pour renforcer en cas de besoin, les dispositifs particuliers.

Et au niveau des effectifs que représentent la Gendarmerie?
Au national on est 102 000 et sur le territoire Paca, on compte 4 800 militaires répartis sur les 6 départements, c’est l’une des plus grandes régions de Gendarmerie.

Propos recueillis par Patricia MAILLÉ-CAIRE

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