Cinéma : »The Birth of the Nation » un film à hauteur d’homme

Publié le 20 décembre 2016 à  15h11 - Dernière mise à  jour le 28 octobre 2022 à  15h46

Le rappeur Abd Al Malik prête sa voix à l’esclave noir Nat Turner dans la version française du film de Nate Parker « The Birth of a Nation » présenté en avant-première à Aix-en-Provence

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De Nat Turner, et de sa révolte à la tête d’un groupe d’esclaves noirs qui avait, en août 1831, jeté la terreur parmi les Blancs dans une région écartée du sud-est de la Virginie, l’écrivain William Styron avait tiré un roman en forme de confession intime par lequel il dénonçait l’attitude raciste des possédants terriens et, ce, bien avant la Guerre de Sécession. C’est avec le film de Nate Parker, présenté en avant-première au cinéma aixois Le Renoir que l’on peut en cette période troublée, se refamiliariser avec l’histoire de cet homme incroyable au courage physique exemplaire, et à la foi inébranlable dans les valeurs du sacré, de la fraternité, de la solidarité. «The birth of the nation» est une de ces œuvres coup de poing dont on sort secoués, mais qui, loin de tout manichéisme, invite chacun à réfléchir sur les valeurs que nous transmettons à nos enfants concernant les valeurs morales fondamentales. Lutte armée ou non-violence face aux agresseurs ? Question centrale que pose le film non sans une succession d’images fortes, puissantes, dans des scènes toute conçues comme des tableaux. Au centre de ce projet on trouve le cinéaste Nate Parker, qui interprète également un Nat Turner plus vrai que nature. Franchement on obtint parfois un oscar pour moins que ça. Il ne joue pas l’esclave noir. Il est devenu celui-ci, si bien que l’on se prend à se dire qu’il s’agit d’un film à hauteur d’homme réalisé par un humain de bonne volonté. De plusieurs humains soyons justes, tant l’acteur-cinéaste se trouve entouré d’une équipe exceptionnelle où chacun semble concerné. On peut parler de compagnonnage ici, de symbiose entre les membres techniques et les comédiens.

Magnifique version française


Pour preuve cette manière dont le rappeur français Abd Al Malik s’est investi dans ce projet, en prêtant sa voix à Nate Turner-Parker. Il est lui aussi tout entier concerné par le message du long métrage. «J’ai voulu rencontrer le réalisateur quand on m’a présenté l’idée de lui donner la voix française et surtout dès que j’ai vu son terrible film», a-t-il répété assez ému au public du Renoir d’Aix venu à l’avant-première de «The birth of the nation». «Nous sommes devenus amis, et complices même», ajoute-t-il aussitôt. Cela s’entend sur l’écran, et voilà pour le coup, une fois n’est pas coutume, une version française d’une valeur égale à celle originale. Sans trahir, mais en faisant un vrai travail d’interprétation Abd Al Malik enrichit son personnage de son expérience envers la défense des faibles. Lui, grand lecteur de Camus trouve dans le travail de Nate Parker un nouveau manuel de résistance et de révolte. Tout ce que le film hyper violent brasse, tous ces portraits bouleversants de femmes noires, (la mère de Nate, et son épouse), voire quelques uns de compagnes de blancs totalement en désaccord avec ce que l’on fait subir aux esclaves, sans oublier le message sur la dangerosité du fanatisme religieux, (ici s’incarnant dans des catholiques intégristes américains), Abd Al Malik le transmet à son tour de sa voix personnelle, s’imposant comme un passeur d’émotions et de vérité. Et puis constatons-le «The birth of the Nation» demeure une œuvre cinématographique à part entière à ranger entre le romantisme de «Autant en emporte le vent» et la radicalité de «Malcom X». C’est dire à quel niveau d’intransigeance et d’exigence morale autant qu’artistique on se situe.
Jean-Rémi BARLAND
Sortie dans les salles le 11 janvier 2017
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