Théâtre de la Criée de Marseille. Rencontre avec Roland Auzet, metteur en scène de ‘Adieu la mélancolie’ pièce donnée jusqu’au 26 novembre

Publié le 25 novembre 2022 à  12h36 - Dernière mise à  jour le 8 décembre 2022 à  12h01

Comment représenter l’inconcevable ? Des artistes français et chinois se retrouvent, réveillent, évoquent la terrifiante Révolution culturelle en Chine. Peut-on parvenir à la réconciliation à l’apaisement après ce violent bouleversement des êtres et des consciences ? Vastes questions posées dans ce spectacle intitulé «Adieu la mélancolie» donné à La Criée jusqu’au 26 novembre à 20 heures.

Destimed adieu
On peut définir «Adieu la mélancolie» comme «une fresque multilingue née de la rencontre entre Roland Auzet et le poète chinois Luo Ying, qui a participé activement à la Révolution culturelle. Il a rapporté son expérience dans «Le Gène du garde rouge», ouvrage interdit en Chine. De ce texte adapté par la cinéaste Pascale Ferran (Lady Chatterley), Roland Auzet tire un spectacle choral rassemblant 30 interprètes (professionnel·les et amateur·ices) venu·es de Chine, France ou Taïwan. Ce moment terrible de l’Histoire traverse ici une troupe de comédien·nes qui oscille entre souvenirs de la Révolution et réflexions sur ses prolongements aujourd’hui.

Dans un décor qui évoque la dictature chinoise, les voix et les récits individuels s’entrecroisent via un dispositif mêlant vidéos live et préenregistrée. Les singularités se font jour au rythme de la musique rock interprétée en direct. Une nouvelle histoire, empreinte d’humanité et de combats communs, s’écrit sur scène. «Je suis parti six mois en Chine. J’ai essayé durant ce voyage de comprendre un monde loin de nous, et réunir des artistes chinois et européens et percer ce qu’il y a de nous en eux, et de eux en nous», confie Roland Auzet, metteur en scène très investi par rapport aux problèmes d’identités des peuples.

Cette pièce «Adieu la mélancolie» raconte l’histoire d’une troupe de théâtre, et s’intéresse à savoir comment pour les Chinois évoquer la révolution culturelle, ce qui est interdit là-bas, et comment on trouve chez les Français des traces du maoïsme. Et d’établir un dialogue entre ces deux civilisations. Cette pièce est un projet épique, une sorte de Shakespeare des temps modernes.

Sur le plateau on trouve Yann Collette, Thibault Vinçon, Angie Wang, Haoyang Wu, Chun-Ting Lin, Yves Yan, Yillin Yang, Lucie Zhang, Ina Ich, Aurélien Clair, et Jin Xuan Mao, acteur et danseur d’exception que l’on a vu l’an dernier à la Criée sur le «Tartuffe» de Macha Makeïeff. «C’est un bel acteur, il est Chinois, il est sensible, il s’est vite imposé», dit Roland Auzet. Complicité intellectuelle, avec les uns et les autres, acteurs, techniciens, l’auteur Luo Ying, qui n’est pas sur le plateau, Roland Auzet signe un spectacle où l’on s’écoute, s’entend, se devine. «Je crois qu’un metteur en scène est un médiateur, et je veux ici faire passer l’idée qu’il faut mettre des gens autour d’une table et essayer de comprendre la Chine par rapport à la parole des poètes. (notons derrière lui que c’était le cas déjà avec « Nous l’Europe » qui célébrait « L’estaca », la chanson de Lluis Llach, reprise en polonais par les grévistes de Solidarnoc)», souligne le metteur en scène qui considère qu’il faut «arrêter d’être dans la mélancolie d’un monde passé et regarder devant».

Le metteur en scène, Roland Auzet ©DR
Le metteur en scène, Roland Auzet ©DR

C’est, ajoute Roland Auzet : «Une fête théâtrale, un moment d’optimisme, un grand spectacle de théâtre, c’est là-dessus qu’on a travaillé. Une grande épopée pour comprendre le monde un peu énigmatique. Le théâtre étant là pour dénouer et avoir la curiosité de l’Autre. Partir du politique pour aller vers l’intime.» On le voit le théâtre de Roland Auzet a la curiosité de l’autre. La beauté des décors sur scène la puissance des acteurs pour rappeler le travail admirable de Roland Auzet, que l’on peut définir comme «un écrivain de plateau» au service de grandes idées humanistes présentées avec intelligence, émotion, humour, et un sens aigu de la compassion.
Jean-Rémi BARLAND

A la Criée jusqu’au 26 novembre à 20 heures – Plus d’info et réservations: theatre-lacriee.com

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