Théâtre du Gymnase de Marseille: ‘Le Cabaret des absents’ de François Cervantes pour ne pas oublier

Publié le 26 septembre 2021 à  9h25 - Dernière mise à  jour le 1 novembre 2022 à  16h30

«Le cabaret des absents» au Théâtre du Gymnase jusqu’au 30 septembre, un hommage -juste avant une fermeture pour travaux- à ce lieu et à ceux qui le sauvèrent dans les années 80.

Destimed le cabaret des absents photo par c christophe raynaud de lage copie
Imaginez une succession de personnages qui se croisent, se parlent, se répondent et présentent des morceaux de music-hall. C’est «Le cabaret des absents». On entendra une version émouvante de «Vivant poème», avec la voix de Barbara en personne, de «Comme ils disent» revue et recréée, on croisera un magicien jouant avec des ficelles, une fermière allant vendre des œufs, un siffleur d’oiseaux, un couple convié dans un théâtre, et d’antihéros soucieux de voyager. Une foule de personnages parfois héros de théâtre détachés de leurs histoires. La féérie est totale, l’intelligence et le brio constant, on est émus, éblouis, et nous entrons dans ce «Cabaret des absents », avec non pas une volonté de raconter une simple histoire mais témoigner d’une réalité sociale et historique. Celle du théâtre du Gymnase de Marseille qui va fermer ses portes pour travaux, et qui offre donc un dernier tour de piste avant réaménagement. L’auteur en est François Cervantes qui signe aussi la mise en scène et qui présente ainsi son projet lié au sauvetage réel du vrai Théâtre du Gymnase.

Sauvetage du théâtre du Gymnase.

«Ce spectacle, explique François Carvantes, est une fable que j’écris à partir d’une histoire vraie que je trouve magnifique et qui répond à la question de savoir comment le théâtre du Gymnase fut sauvé de la destruction par Armand Hammer.»

Il raconte : «Dans les années 70. Gaston Defferre, maire de Marseille, contacte Armand Hammer pour la construction du site pétrolier de Fos-sur-Mer. A la fin du rendez-vous, Armand Hammer dit au Maire :
– Je voudrais visiter le Théâtre du Gymnase.
– Celui là spécialement ?
– Oui.
Le théâtre est à l’abandon depuis plusieurs années, destiné à la destruction. On court après les clefs, on trouve un éclairage de fortune. Au milieu des gravats, Armand Hammer explique à Gaston Defferre : « A la fin du 19e siècle, mes parents ont fui la Russie. Ils ont embarqué à Odessa sur un bateau de fortune qui a dû s’arrêter à Marseille pour réparations. Mes parents n’avaient pas d’argent et ils passaient leurs journées à marcher dans la ville. Un jour, ils ont été surpris par un orage, et ils se sont réfugiés sous le balcon de ce théâtre. Une dame leur a proposé d’entrer au chaud, et ils ont assisté à « La dame aux camélias ». Et c’est ce soir là, en rentrant dans le bateau, qu’ils m’ont conçu. Alors je vous offre l’argent nécessaire pour restaurer ce théâtre.
»

Le Théâtre du Gymnase est restauré, et au moment de l’inauguration, pour faire plaisir à ce mécène, «La dame aux camélias !» est remontée. Armand Hammer assiste au spectacle, et avant de reprendre son avion pour New York, il dit : «Je me demande comment on peut avoir envie de faire l’amour après avoir vu une pièce comme celle-là… » «Cette histoire est une belle parabole sur la place de l’art dans nos vies, sur la place que peut prendre un théâtre dans une ville et dans le monde. A partir de cette histoire commence la fable que j’écris», dévoilera François Cervantes

Comédiens magiques

Et nous voilà portés par le jeu des six comédiens (quatre hommes et deux femmes), qui alternent les morceaux. Drôle parfois émouvant, un hymne au Théâtre et à ses ambassadeurs artistiques. Dominique Bluzet rappelle que ce spectacle aurait dû rencontrer le public l’année dernière: «Nous nous réjouissons de pouvoir enfin vous présenter ce spectacle qui raconte la résurrection en 1984 du Théâtre du Gymnase. L’occasion pour nous aujourd’hui de faire nos adieux à cette salle, de saluer tous les fantômes qui se promènent sous les cintres, de respirer une dernière fois l’odeur de la salle pleine, d’entendre les rires, de voir courir les émotions.» Pour Dominique Bluzet « Le Cabaret des absents »: «C’est un sourire extraordinaire à l’histoire de ce bâtiment. Et ainsi le voir fermer avec l’histoire de sa réouverture». Le public à cette fête des sens, de l’intelligence et de l’art du jeu qui est aussi une émouvante réflexion sur la transmission, les racines, l’exil et la résilience.
Jean-Rémi BARLAND
Au théâtre du Gymnase, jusqu’au 30 septembre à 20 heures. Plus d’info et réservations: Les théâtres

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