Tourisme en Provence : un lancement de saison en mode aigre-doux

Publié le 29 mai 2019 à  10h39 - Dernière mise à  jour le 29 octobre 2022 à  13h47

Au milieu des buffets, le top départ de la saison touristique a été officiellement donné au Nhow Hotel en ce mois de mai. Si tout le monde a foi en MPG2019, année de la gastronomie en Provence, gare à la crise, et pas seulement de foie, pour l’actuelle majorité.

Danielle Milon entourée du chef Gérald Passedat parrain de MPG2019 et de Martine Vassal (Photo Robert Poulain)
Danielle Milon entourée du chef Gérald Passedat parrain de MPG2019 et de Martine Vassal (Photo Robert Poulain)

Le lancement de la saison touristique provençale au Nhow Hotel en (large) compagnie de nos aînés -contribuables seniors qui ont eu les honneurs de cette présentation… et de la profusion d’un petit-déjeuner tout en viennoiseries dont ils ont été très amateurs- aurait dû se dérouler sous les meilleurs auspices. C’est vrai, la greffe du tourisme sur le sol du Sud est une vaste entreprise qui ne connaît pas la crise. Plutôt la croissance au vu des chiffres, avancés ce matin-là par la présidente de Provence Tourisme et maire LR de Cassis Danielle Milon. Ainsi en 2018, le nombre de nuitées départementales s’élevait-il à 6,4 millions, soit une hausse de 4 % par rapport à 2017, les Bouches-du-Rhône prenant la place de 4e département le plus fréquenté derrière Paris, la Seine-et-Marne et les Alpes-Maritimes. Un dynamisme accru dû notamment à la hausse de la fréquentation étrangère, estimée à 11 % pour l’ensemble de l’année. Parmi les pays friands de Provence, les États-Unis (+ 23 %), l’Allemagne (+ 8 %) ou encore le Royaume-Uni (+ 10 %), preuve que les campagnes menées à grands renforts de marques monde, visant justement ces trois pays-là, ont rempli leur office. En 2019, une autre clientèle, venue de l’Est quant à elle, devrait à son tour jouer les leviers de croissance, rappelle Martine Vassal, présidente LR du Département des Bouches-du-Rhône et de la Métropole Aix-Marseille Provence. Les acteurs du tourisme regardent en effet avec beaucoup d’appétit vers Moscou, reliée à présent de façon directe à Marseille Provence via les vols de deux compagnies, Aeroflot (dont l’inauguration accompagnant le premier vol aura lieu ce samedi 1er juin) et Aigle Azur, déjà opérationnelle depuis ce printemps. Ainsi c’est acté, l’office de tourisme métropolitain compte désormais dans ses documentations des flyers et plans en langue russe destinés à cette nouvelle clientèle… Elle est donc attendue de pied ferme.

2019 s’annonce bien

Et 2019 semble s’annoncer sur le même mode, d’autant qu’elle devrait être boostée par MPG2019, dont on faisait aussi – et surtout ! – la promotion lors de ce lancement de saison. Car ces événements «sont de véritables catalyseurs pour notre notoriété. MP 2013, c’était 11 millions de visites sur l’ensemble des sites concernés, MP 2018, 1,228 million de visites. Depuis lors, l’offre touristique s’en est trouvée diversifiée, ce qui représente un vrai levier de croissance », analyse Danielle Milon. Et déjà, les premiers retours de 2019 sont positifs. Les chiffres du 1er trimestre pour l’hôtellerie provençale affichent encore des résultats à la hausse en termes de nuitées, supérieurs à ceux de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et à ceux de l’ensemble de l’Hexagone, soit + 6 %, versus + 2 % et – 1,3 %, le territoire français marquant, lui, carrément le recul. Même sens de la marche pour les résidences de tourisme, qui se prévalent elles aussi de résultats en hausse sur janvier et février. Dans la foulée, «le printemps a bien démarré, les premiers événements, donc la Feria d’Arles, ont fait le plein. Les ponts ont un peu cassé cette dynamique avec les fériés en milieu de semaine et le temps maussade, mais les musées ont su tirer leur épingle du jeu, enregistrant de belles fréquentations.»

MPG mon amour

Ainsi la saison s’annonce de façon idéale et «MPG2019 s’inscrit dans une dynamique qui porte le territoire depuis 2013». Cette thématique n’a pas été choisie par hasard. «La gastronomie provençale, identifiée comme liée à la mer par les touristes, fait partie de notre territoire. Marseille est la 3e destination gastronomique de France, derrière Paris et Lyon.» Pour donner raison aux papilles des touristes, MPG2019 sera «un grand temps de fête et de saveurs dès le mois de juin. Le week-end du 28 au 30 juin lancera le festival, on embrayera ensuite en juillet sur les dîners insolites organisés par exemple à la digue du large ou aux carrières de lumière des Baux-de-Provence. On comptera également quatre nouveaux lieux éphémères pour expérimenter MPG…» Une logistique permise grâce aux partenariats avec les chefs du territoire, voués à s’ancrer dans le temps. «Ce n’est qu’une année de lancement, on va continuer à travailler à côté de tous les chefs, producteurs, agriculteurs, citoyens», formule Danielle Milon, bien décidé à appuyer le développement de ces filières. Martine Vassal abonde dans le même sens, évoquant «AOP, IGP, Vins de Provence qui montent en gamme et dont on doit pérenniser l’embellie».

La colère ne s’éteint pas

Soigner le tourisme, c’est aussi une question de stratégie, avance la présidente du Département et de la Métropole, à l’origine de cette année consacrée au goût. «Aujourd’hui, il nous faut mettre le bon en avant, il va nous permettre de trouver des solutions pour se relever du moins bon. Il y a beaucoup de très bonnes choses qui sont faites, mais on ne le dit pas assez. Et le tourisme est un de ces moteurs vers l’excellence… » Mais là, le discours laissera certains de marbre. Bien sûr, la soirée chocolats maintenue dans la foulée de l’effondrement des immeubles de la rue d’Aubagne a laissé des traces, et les élus de la majorité ont compris la leçon : faire passer la pilule du festif en sous-entendant que l’on n’oublie pas, faire profil bas, toujours. Ainsi, dans ce «moins bon» évoqué par Martine Vassal, chaque auditeur aura bien compris qu’elle sous-entendait problématiques d’habitat indigne, sans toutefois en prononcer le nom. Cela n’apaise pas pour autant la colère des collectifs investis sur ces questions, dont celui du 5 juillet – cheval de Troie du 5 novembre sans doute – rassemblant des «touristes en colère», bien décidé à aider Martine Vassal dans sa quête de toits pour les délogés. Un collectif mené par une certaine Britney Hammerson, anglo-saxonne «ayant œuvré à la BBC », mentionne sa toute récente page sur les réseaux sociaux. Laquelle a vraisemblablement un peu gâché la fête des élus présents au Nhow Hôtel… Intervenant en fin de présentation avant que tous ne migrent vers un nouveau buffet, elle a rappelé le sort des délogés à l’aube d’une saison touristique, dont on sait, au vu de chiffres, qu’elle sera synonyme d’hôtels souvent complets, déjà pris sous l’assaut des réservations… Rebondissant quelques instants plus tard sur cette question précise lors d’un point-presse, notre confrère de La Marseillaise se sera vu opposer une fin de non-recevoir, Martine Vassal allant même jusqu’à stopper prématurément les échanges. Mais ce n’est pas par le silence que l’on rompra avec la vindicte. Las, la présidente à double casquette aura sans doute au moins appris une chose, si elle ne le savait déjà : le «bon» n’éclipsera pas le «moins bon», ses effets positifs pourront difficilement ruisseler sur les plaies de Noailles, ou en tout cas pas avant longtemps. Et les gravats de la rue d’Aubagne resteront gravés, eux aussi pour des lustres, dans la mémoire des Marseillais. Telle une marque au fer rouge sur l’échine de l’actuelle majorité… que les résultats des dernières Européennes ne doivent pas rassurer.
Carole PAYRAU

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