Tribune libre de Marc La Mola : Mise à mort …

Publié le 17 décembre 2016 à  13h09 - Dernière mise à  jour le 29 octobre 2022 à  13h45

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Octobre 2012

Une bombe ne devait pas tarder à exploser au sein de la police Marseillaise, elle devait faire d’énormes dégâts et être le début de la fin d’une police dite à «la Marseillaise», elle devait surtout permettre à un tout nouveau ministre de l’Intérieur ambitieux de marquer ses différences avec son prédécesseur agité. Quoi de mieux qu’une affaire de flics ripoux balancés par des chevaliers blancs auto-proclamés pour entamer un règne à la Place Beauvau ? Et tant pis si les flics concernés sont émérites et si les Serpico de pacotille souffrent d’une mythomanie pathologique !

Tout démarre par des infos mensongères portées à la connaissance d’un préfet aux attitudes et méthodes plus proches de celles des cow-boys que d’un membre de l’honorable corps préfectoral. Il écoute et boit même les paroles de deux mythomanes connus de tous les flics Marseillais pour leurs débordements et leurs attitudes «borderline».
Tous deux ne font plus partie des effectifs, ils en ont été révoqués … Il aurait pourtant suffit qu’il mette les pieds dans le moindre commissariat de la ville et prononce leurs noms pour que même le petit ADS (adjoint de Sécurité) éclate de rire et lui précise la réputation de ces deux accusateurs, l’informe que la probité de ces deux hommes n’était pas la qualité première que l’on aurait fait figurer à la tête de leurs états de service. Mais c’est tout de même ainsi que cette affaire débuta …

Très vite les flics de la BAC Nord furent placer en Garde à vue et rapidement les officiers de l’Inspection Générale des Services -convaincus de diligenter LES investigations qui allaient les faire sortir de l’ombre- allaient effectuer des perquisitions et procéder à des auditions parfois farfelues et souvent bricolées pour faire entrer les déclarations des mis en cause dans un entonnoir préconisé par la place Beauvau.
L’ambition n’a pas de limite et ne connaît pas la modération surtout lorsqu’elle est portée par une foultitude de sbires désireux de plaire et de satisfaire ce nouveau ministre ne supportant pas la contradiction.
Et les banderilles vinrent se planter dans une échine tendre, dans l’échine de ces flics incapables de comprendre la tourmente qui allait les emporter vers une mise à mort administrative et sociale, bien incapables de saisir qu’ils allaient inéluctablement servir de fusibles et d’exemples et être sacrifier sur l’autel des ambitions personnelles de leurs propres dirigeants politiques ou policiers.

La meute fut lâchée et elle s’acharna sur une brigade moribonde pour lui arracher, en place publique, les derniers lambeaux d’une chair tendre de naïveté et de sentiment d’intouchabilité. Ils ouvraient dans des quartiers où plus personne ne souhaite aller, où peu de flics ont encore le courage de se rendre. Ils n’avaient pas peur, ils n’avaient d’ailleurs peur de rien et même pas d’une procédure à leur encontre qu’ils ne pouvaient pas imaginer, pas envisager. Ils étaient si efficaces et leur hiérarchie avait tant besoin d’eux. Mais les bassesses et les turpitudes des ambitieux cupides allaient faire fi de ces compétences et de cette force indispensable que les flics de la BAC Nord proposaient. Ils allaient prononcer leur mise à mort !

C’est au quartier V.I.P que sept des leurs furent incarcérés et c’est là qu’ils allaient crever professionnellement pour ne pas pas crever tout court … Mais avant que les lourdes portes de métal ne viennent se fermer sur les visages marqués de ses sept hommes à la carrière exemplaire, toujours plus de banderilles vinrent se figer dans leur dos déjà voûté. Un procureur ne vacilla pas lorsqu’il affirma que les pratiques de ces policiers avaient gangrené toute la brigade et même toute la police Marseillaise, l’IGS ne déclara pas que les sonorisations des voitures de patrouille furent bidouillées pour correspondre à ceux qu’ils en attendaient, BFM ne manqua pas de s’essuyer les pieds sur les faces des policiers incarcérés et cracher allégrement sur une présomption d’innocence ne semblant pas avoir cours pour cette affaire et le ministre, tel un Don Quichotte, prononça la dissolution de la BAC Nord. Fin de l’histoire ou plutôt fin du premier épisode !

Décembre 2016.

Nous les avons oubliés. Que sont-ils devenus, que font-ils aujourd’hui ? Se cachent-ils pour oublier ce qu’ils ont été, pour se faire oublier de ceux qui les ont lynchés sans connaître le dossier et son contenu ? Ils ont capitulé. Certains ne sont plus policiers, d’autres ont repris du service car ils en sont contraints mais sans la motivation, avec la crainte que cela recommence.

La bombe annoncée n’a toujours pas explosé. Elle n’a fait aucun dégâts exceptés chez les flics concernés. Les enquêteurs de l’IGS ont été mutés, les juges aussi et souvent avec des promotions. Le ministre n’a fait que passer pour poursuivre son ascension vers le sommet, il a certainement oublié cette affaire et ces flics qu’il a anéantis. Après tout que valent les carrières de quelques flicaillons comparées à l’ambition politique d’un ministre ? Rien, absolument rien !

Le dossier doit prendre la poussière sur une étagère d’un bureau d’un juge d’instruction de Marseille. Ils doivent se le refiler comme l’on s’envoie une patate chaude en espérant que leur successeur aura le courage de prononcer un non-lieu ou une ordonnance de renvoi devant le tribunal. Ce tribunal qui, eu égard aux infractions initiales, devait être la cour d’assises puis le Tribunal de Grande Instance et à ce jour ne mériter même pas le tribunal de police tant les infractions relevées sont putatives, dérisoires, minables … inexistantes !

L’affaire d’Outreau à la sauce Bouillabaisse !

Plus de quatre ans après l’affaire n’est toujours pas jugée, le sera-t-elle un jour autrement que pour justifier les ratés d’une enquête minable et les sanctions actives de révocation déjà prononcées ? Les médias sont passés à autre chose, les accusateurs aussi. Nul n’est venu dire qu’il était compliqué de travailler dans de tels secteurs et qu’il pouvait parfois être difficile de ne pas se salir lorsque l’on a au quotidien les mains dans la merde. Personne n’est resté pour dire qu’il ne s’agissait pas d’une affaire de flics ripoux mais de flic tout court, d’aucuns n’a précisé les dérapages incontrôlés de journalistes et d’auteurs de livres à sensations. Pas de vol, pas de détournement constatés. Seulement quelques entorses au code de déontologie, ce code qui semble n’avoir court que dans cette corporation. Personne n’a daigné savoir ce que sont devenus les policiers de l’ex BAC Nord. Le mal a été fait, ils n’ont plus qu’à crever !

A lire aussi de Marc La Mola [[Marc La Mola a été flic durant vingt-sept années. Après des débuts à Paris il rejoint sa ville natale, Marseille et choisit les quartiers nord pour y exercer. C’est aussi là qu’il a grandi. Officier de Police Judiciaire à la tête d’un groupe d’enquête de voie publique il a traîné dans ces quartiers pour en mesurer les maux. Il a touché du doigt la misère et la violence de ces secteurs de la Ville. Marc La Mola a sans doute trop aimé son métier et c’est en 2013 qu’il décide de mettre un terme à sa carrière «après trop de saloperies brassées et surtout trop de turpitudes d’une hiérarchie devenue inhumaine car aux ordres d’une politique abjecte». Marc décide de retourner à la vie civile pour écrire. Il est aujourd’hui auteur, romancier et scénariste. Chez Michalon Éditions il a publié : «Le sale boulot, confessions d’un flic à la dérive», «Un mauvais flic, lettre ouverte à Manuel Valls », «Quand j’étais flic …». Ces trois témoignages relatent les moments forts de sa carrière et ses différentes prises de position. C’est chez ce même éditeur qu’il publiera en mars 2017, «Police, Grandeur et Décadence» dans lequel il explique comment la police en est arrivée à descendre dans la rue pour manifester son mécontentement. Marc est encore romancier. Il publie chez Sudarenes Éditions un polar à l’accent Marseillais, «Le sang des fauves». En juin 2017 le personnage de ce premier polar revient dans «Vallis Clausa», deuxième volet des enquêtes de son personnage Randy Massolo, un flic torturé. Il est aussi scénariste et a signé l’écriture de plusieurs synopsis optionnés par des maisons de production. Il enseigne aussi l’écriture de scénarios à l’école supérieure du cinéma Cinemagis de Martigues (13)]]

Manifestations policières, légitimes ou pas ?

Déshabillons Pierre pour habiller Paul !

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