Aéroport Marseille Provence : 2019, l’année des records

Publié le 6 février 2020 à  9h33 - Dernière mise à  jour le 9 juin 2023 à  22h13

Cela faisait un moment que l’Aéroport Marseille Provence (AMP) lorgnait sur ce cap, il l’a désormais franchi. Avec plus de 10 millions de passagers accueillis en 2019 sur le tarmac, l’aéroport provençal récupère sa place de 3e régional, concédée l’année dernière à Blagnac. Mais cette embellie ne doit pas être déconnectée de l’urgence environnementale, alors qu’ici et là, entre consommateurs et plus récemment sur la scène politique, on stigmatise de plus en plus les nuisances dues au trafic aérien.

L'Aéroport Marseille Provence (Photo Philippe Maillé)
L’Aéroport Marseille Provence (Photo Philippe Maillé)
Jean-Paul Ourliac, Philippe Bernand, Julien Boullay ont présenté le bilan 2019 de l'Aéroport Marseille Provence  (Photo AMP))
Jean-Paul Ourliac, Philippe Bernand, Julien Boullay ont présenté le bilan 2019 de l’Aéroport Marseille Provence (Photo AMP))
C’est un record qu’il ambitionnait de battre et comme on dit : ça, c’est fait. L’aéroport Marseille Provence a passé, le 26 décembre dernier, la barre des 10 millions de passagers, faisant par la même de l’année 2019 un très bon cru. Et cela, alors qu’une des compagnies œuvrant sur le tarmac de façon autrefois dynamique, à savoir Aigle Azur, a déposé le bilan en septembre dernier. Pour autant le «manque à gagner de 80 000 passagers n’ayant pas opté pour une autre destination ou reporté leur projet de voyage sur une autre compagnie», comme l’a précisé le directeur du marketing Julien Boullay, n’a pas empêché AMP de reprendre à Toulouse Blagnac la place de 3e aéroport régional que ce dernier lui avait ravie l’année dernière. Ainsi, Jean-Paul Ourliac, président du conseil de surveillance, se frotte les mains. «Hausse de 8,1% par rapport à 2018, plus forte embellie depuis 2012 : 2019 a confirmé une dynamique de croissance durable, ce dans un contexte national et international très difficile». La raison en est imputable, peut-être, aux nombreux projets structurants mis en œuvre in situ pour multiplier et faire croître les divers revenus financiers de l’aéroport, «qui ne bénéficie d’aucune aide de l’État», a tenu à rappelé le président. Outre l’activité passagers, il y a le fret qui a lui aussi battu un record d’activité en 2019 avec près de 60 000 tonnes traitées (+5,3%), notamment le fret traditionnel, connaissant une hausse de 13%, «un rythme trois fois plus rapide que le fret express». C’est dû aux nouvelles lignes lancées depuis deux ans, spécifiquement aux longs courriers sous l’égide de compagnies telles qu’Air Canada, Air Austral… Ou Aeroflot avec «son hub de Moscou qui fonctionne bien, pas tant sur le sol russe, frappant les produits occidentaux d’embargo alimentaire, mais grâce aux imports chinois», reprend Julien Boullay. Il y a également deux petits nouveaux, Air Senegal et Ethiopian airlines, qui offrent en la matière de belles perspectives. On peut évoquer encore les revenus offerts par les parkings relais, qui devraient logiquement s’accroître avec la livraison des nouveaux P3 et P4, agrémentés d’ombrières couvertes de panneaux photovoltaïques… Une façon bienvenue de rationaliser les coûts, la facture énergétique de l’aéroport étant forcément conséquente.

L’international toujours locomotive

Et puis, last not least, l’activité passagers qui a donc cette année le vent en poupe. Pour Philippe Bernand, président du directoire, «AMP se positionne plus que jamais comme la porte d’entrée internationale du Sud-Est de la France». Car la tendance déjà observée précédemment ne se dément pas : c’est bel et bien les vols extérieurs, en croissance de 11,1% par rapport à 2018 (versus 4,5% pour les vols nationaux) qui tirent cette croissance vers le haut. «Ils pèsent de plus en plus lourd, soit 62% de l’activité passagers», évalue Julien Boullay. De fait, c’est sur ce segment que mise la stratégie d’AMP, avec la poursuite de trois objectifs : «Continuer de développer le maillage de l’Europe et des pays méditerranéens en vols directs, mais aussi l’accessibilité aux grands hubs internationaux ainsi que l’activité des longs courriers». Parmi lesdits Hubs, il y a Moscou, et force est de constater que les ambitions placées sur la Russie sont couronnées de succès. La manne de ces touristes de l’Est, c’est 24 M€ de retombées économiques, cinq vols hebdomadaires avec un fort coefficient de remplissage et 37 140 passagers l’année dernière. «Le village des marques de Miramas a enregistré une hausse des dépenses des touristes russes de l’ordre de 12%, avec un panier moyen de 438€, tandis que l’office de tourisme métropolitain en a accueilli 40% de plus cette année. Par ailleurs 10% d’entre eux font aussi une croisière en Méditerranée», détaille Julien Boullay. Stratégie gagnante, donc, et qui démontre une fois encore la façon dont l’activité de l’aéroport bénéficie au territoire et contribue de fait à l’économie locale. Plus généralement, cette croissance devrait se poursuivre, sous l’effet de l’ouverture de 17 nouvelles lignes. Au total, ce sont 124 destinations et 158 lignes régulières qui sont prévues à ce jour. De quoi continuer à faire caracoler le chiffre d’affaires, s’établissant pour 2019 à 158,5 M€ (+7% par rapport à l’année précédente).

Le subtil équilibre entre la croissance et le durable

Bref, il ne semble pas y avoir de perturbations au-dessus du tarmac… au bémol près que la croissance à tout crin, cela peut porter en soi ses propres contradictions. Une activité aérienne décuplée, ce sont des nuisances en plus et donc potentiellement au final, un retour de bâton pour le moins négatif. En effet, à l’heure où les Suédois donnent dans le néologisme et qualifient de « flygskam» leur « honte de prendre l’avion», à l’heure aussi où l’on parle au sein-même de l’Hexagone de suppression de vols intérieurs au profit du train, moins polluant, il est d’ores et déjà plus que nécessaire de «se repenser», martèle Philippe Bernand. Mais cela fait un petit moment qu’AMP œuvre sur ce chantier-là, avec « une démarche RSE totalement intégrée à l’ensemble des décisions prises tous les jours ». Actions pour préserver les riverains des nuisances sonores, signature d’une charte de coopération économique et sociale avec les communes alentours, protection de la biodiversité sur les zones naturelles contiguës à l’aéroport, maîtrise des émissions atmosphériques et adhésion à Atmosud, atteinte du niveau 3, dit «optimisation», dans la démarche Airport Carbon Accreditation et volonté de tendre vers la neutralité et le 3+, telles sont quelques uns des chantiers mis en place. Toutefois, on le comprend entre les lignes, il appartient à tous, et non pas aux seules infrastructures de travailler ces sujets-là de façon responsable. Ainsi les compagnies doivent-elles se doter «d’avions moins bruyants, plus propres », à la capacité d’accueil plus importante. Et ce dernier point, associé à une amélioration du taux de remplissage concourt à une diminution des mouvements d’avion. C’est justement le cas sur Marseille Provence, puisque lesdits mouvements ont chuté de 3% par rapport à l’année dernière. Julien Boullay note de son côté la multiplication des Airbus A320néo. «En 2019, nous avons enregistré un doublement de ces vols, ce qui a généré une baisse de 30 à 40% des nuisances sonores et de 15 à 20% de carburant». Enfin, outre les aéroports et les compagnies, l’État aussi a sa part à accomplir, souffle encore Philippe Bernand. Notamment pour financer l’émergence d’éco-carburants, piste qui permettraient aux acteurs de l’aérien de s’engager davantage dans la voie vertueuse.
Carole PAYRAU

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