Publié le 25 juin 2016 à 21h02 - Dernière mise à jour le 29 novembre 2022 à 12h31
Avec 51,9 % pour la sortie de l’Union européenne, c’est un désaveu populaire vis-à-vis de l’UE néolibérale. Je l’interprète comme un appel à construire une union des peuples et des nations libres, souverains et associés, tournée vers le progrès humain et la justice sociale. Ainsi l’aventure référendaire du très libéral David Cameron s’est retournée contre lui comme un boomerang mais surtout, contre le peuple britannique et contre les peuples de l’Union européenne.
Aventure, car le Premier ministre anglais, champion de l’austérité trouvant lui-même l’Europe trop sociale, visait un objectif politique avant les élections législatives : contenir la poussée de la gauche, elle-même divisée sur le sujet et surfer sur le thème de la xénophobie en fustigeant les populations immigrées afin de maitriser la frange europhobe de son propre parti. Je qualifie d’aventure, non pas que je sois opposé à une consultation populaire, mais dans la circonstance la question posée «in ou out» (rester ou sortir de l’UE) était un piège.
«In ou out» était une fausse et dangereuse alternative, entre l’enfoncement dans la crise sociale et l’autoritarisme, ou la dislocation sur fond de rivalités nationalistes. En effet, c’est un piège pour le peuple pas pour la finance, car contrairement à l’analyse faite par certains, brandissant des menaces d’effondrement de la bourse de la City, ce n’est qu’un jeu de yoyo pour apeurer les peuples. Car pour le capital il n’y a pas de frontière à la circulation de la finance virtuelle. Piège toujours par une campagne des forces réactionnaires divisées entre elles, personnalisées par Cameron d’un côté et l’ancien maire de Londres Boris Johnson de l’autre. Guéguerre entre libéraux faisant oublier que les politiques européennes sont d’abord décidées par les Chefs d’État et de gouvernements des pays membres. C’est un vrai bal de «faux-culs» quand les dirigeants des pays, la France en tête, font porter la responsabilité à Bruxelles, alors qu’ils en sont les premiers responsables. Piège encore par le fait que ce référendum a servi d’exutoire, que je comprends et qu’il faut entendre, à tous ceux qui galèrent et subissent les inégalités, la précarité, la pauvreté, conséquences des politiques ultralibérales du Royaume Uni sacralisées par Bruxelles. Piège enfin par de mauvais arguments avancés par les partisans de chaque camp, ne posant que rarement les vrais enjeux : quelle politique mener à l’échelle européenne pour répondre aux besoins et aux aspirations sociales et démocratiques des peuples composant l’Union européenne ? Le seul à l’avoir vraiment posé est le dirigeant travailliste Jeremy Corbin pour qui la Grande Bretagne devait rester dans l’UE pour la changer. Car aujourd’hui, comment construire des convergences de luttes des travailleurs et des peuples pour conquérir des avancées dans l’intérêt général ? Comment faire en sorte que les moyens financiers mis au pot commun de l’UE soient mis au service du progrès social et non pour la spéculation financière sous la domination de l’Allemagne. Il est d’ailleurs peu souvent rappelé que le siège de la Banque Centrale Européenne (BCE) se situe à Francfort.
Il serait ainsi présomptueux de dire ce qui va maintenant se passer. L’heure n’est pas aux pronostics mais à l’action. Nous voyons l’extrême droite dans tous les pays de l’UE se sentir pousser des ailes pour réclamer partout des référendums afin d’obtenir le même résultat. Nous voyons les partis de droite et sociaux-libéraux très embarrassés par le résultat de cette consultation et appelant à des changements. Mais lesquels sur la forme pour mieux faire passer la pilule néolibérale ? Jusqu’au-boutisme libéral de l’Europe et dopage de l’extrême droite, voilà à quoi conduisent le mépris vis-à-vis du référendum de 2005 sur le Traité constitutionnel européen et le coup d’État financier contre la Grèce. Aujourd’hui la question est donc moins de savoir ce qui va se passer, en laissant les mêmes dirigeants libéraux décider d’une « refondation » à la place des citoyennes et des citoyens. L’Europe se délite, le Royaume Uni est menacé de dislocation par l’Écosse et l’Irlande et cela fait le jeu des pays dominants néolibéraux comme les États-Unis, la Russie ou encore la Chine pour rester ou devenir le leadership mondial.
L’Europe se délite et c’est dangereux pour le rôle positif qu’elle devrait jouer au niveau économique en termes de coopérations, d’échanges mutuellement avantageux, en terme de paix, en terme d’accueil des réfugiés des guerres…
L’Europe se délite au détriment du rapport des forces nécessaire à construire avec les forces progressistes françaises, espagnoles, portugaises, italiennes, grecques, irlandaises, belges…
L’urgence est de sortir de l’austérité et de la soumission aux marchés. Contre l’Europe unie de la finance, il est urgent de mener une grande campagne politique pour mener la seule bataille qui vaille, celle d’une Europe des peuples unis pour des politiques de développement social, économique et écologique, respectueuse des souverainetés nationales. Plusieurs rendez-vous électoraux ont lieu comme dimanche en Espagne et en 2017 en France, pour décider de son destin.
Jean-Marc Coppola – Conseiller municipal Front de Gauche de Marseille