Publié le 11 septembre 2021 à 22h24 - Dernière mise à jour le 1 novembre 2022 à 14h55
Fabriqué aux États-Unis dans le cadre de la contribution américaine à ITER, le premier des six modules de l’aimant le plus puissant du monde, le solénoïde central du Tokamak ITER, vient d’être réceptionné sur le site de construction de l’installation, à Saint-Paul-lez-Durance (13). Le solénoïde central peut être considéré comme le «cœur battant » d’ITER, la machine expérimentale conçue pour reproduire les réactions de fusion de l’hydrogène qui se produisent au cœur du Soleil et des étoiles.
La collaboration internationale ITER rassemble 35 pays ou groupe de pays : l’Union européenne (plus le Royaume-Uni et la Suisse), la Chine, l’Inde, le Japon, la Corée, la Russie et les États-Unis. L’essentiel de la contribution des membres d’ITER se fait « en nature », en fournissant les éléments de la machine et de l’installation. Cette formule permet aux établissements industriels d’étendre leur expertise dans le domaine des technologies avancées que la fusion requiert.
«Le programme de recherche international ITER est la collaboration scientifique la plus large et la plus complexe de toute l’histoire», estime Bernard Bigot, le directeur général d’ITER Organization. «Sur trois continents, des industriels ont su réaliser des composants d’une nature inédite, dont la fabrication a représenté un immense défi. Sans cet engagement à l’échelle du monde, ITER n’aurait pu voir le jour. Dans cet effort collectif, chacune des parties rentabilise ses investissements et s’enrichit de ce qu’elle apprend des autres.»
Haut de 18 mètres, large de 4,25 mètres et pesant 1 000 tonnes, le solénoïde central génère un champ magnétique d’une intensité telle qu’il pourrait soulever un porte-avions (13 Tesla, soit près de 300 000 fois le champ magnétique terrestre). Ses structures d’ancrage sont dimensionnées pour résister à l’équivalent de deux fois la poussée d’une navette spatiale au moment du décollage
[(Pour créer les champs magnétiques dans un tokamak, trois agencements d’aimants sont indispensables : des bobines externes, verticales, génèrent le champ magnétique toroïdal et confinent le plasma à l’intérieur de la chambre à vide ; des bobines annulaires ceinturent la chambre à vide et contrôlent la forme et la position du plasma Au centre du Tokamak, le solénoïde central génère le courant qui circule dans le plasma. Le mouvement des ions au sein de ce courant crée un deuxième champ magnétique (poloïdal) qui renforce le confinement du plasma et le chauffe. L’intensité du courant plasma dans le tokamak ITER sera de l’ordre de 15 millions d’ampères. Les matériaux supraconducteurs utilisés pour les aimants d’ITER sont produits dans neuf usines de six pays. Le composé de niobium-étain requis pour le solénoïde central (43 km de bobinage) a été fourni par le Japon.)]
Les modules du solénoïde central sont fabriqués au Centre des technologies magnétiques de General Atomics à Poway, près de San Diego, en Californie, sous la direction de l’agence américaine pour ITER (US ITER) et du Laboratoire national de Oak Ridge (ORNL). Le premier module sera livré le 9 septembre ; un deuxième a pris la mer à Houston (Texas) au début du mois, quatre autres, plus une rechange, sont à divers stades de finalisation. «La fabrication du solénoïde central d’ITER compte parmi les réalisations les plus importantes, les plus complexes et les plus exigeantes jamais entreprises dans le monde des électro-aimants», explique John Smith, le directeur de l’ingénierie et des programmes chez General Atomics.
Les promesses de la fusion
Pour créer les champs magnétiques dans un tokamak, trois agencements d’aimants sont indispensables : des bobines externes, verticales, génèrent le champ magnétique toroïdal et confinent le plasma à l’intérieur de la chambre à vide ; des bobines annulaires ceinturent la chambre à vide et contrôlent la forme et la position du plasma.
Au centre du Tokamak, le solénoïde central génère le courant qui circule dans le plasma. Le mouvement des ions au sein de ce courant crée un deuxième champ magnétique (poloïdal) qui renforce le confinement du plasma et le chauffe. L’intensité du courant plasma dans le tokamak ITER sera de l’ordre de 15 millions d’ampères. Les matériaux supraconducteurs utilisés pour les aimants d’ITER sont produits dans neuf usines de six pays. Le composé de niobium-étain requis pour le solénoïde central (43 km de bobinage) a été fourni par le Japon.
Produire de l’énergie à partir de la fusion de l’hydrogène présente de multiples avantages. Les combustibles (isotopes de l’hydrogène) sont disponibles en abondance ou seront générés dans l’enceinte même de la machine. Le seul « sous-produit » de la réaction est l’hélium.Comme une centrale électrogène au gaz, au charbon, ou une centrale nucléaire, une centrale de fusion fournit une quantité d’énergie massive et constante. La fusion toutefois ne produit ni gaz à effet de serre, ni déchets radioactifs à vie longue. La réaction de fusion est intrinsèquement sûre – si le confinement du plasma est perdu, la réaction de fusion s’arrête instantanément.
Dans le cadre des accords conclus en 2006, les membres d’ITER partagent la totalité des technologies développées dans le cadre du programme, tout en ne contribuant qu’à une fraction de son coût. Membre-hôte du programme, l’Europe assure 45% du coût de construction, les autres membres contribuent à hauteur de 9%.
ITER sera la première machine de fusion qui produira une quantité d’énergie nette (la réaction de fusion générera plus d’énergie thermique qu’il n’en aura été injectée dans le plasma pour créer les conditions de température propices à la réaction). ITER sera également la première installation capable de maintenir un plasma de longue durée et produira 500 MW thermiques, soit plus de trente fois le record établi dans les années 1990 par le tokamak européen JET au Royaume-Uni.
Bien que le tokamak ITER ne soit pas conçu pour produire de l’électricité, il constituera un banc d’essai pour l’intégration des technologies, pour les matériaux et les régimes de plasma requis pour la production industrielle d’électricité. Le retour d’expérience d’ITER formera la base sur laquelle sera conçue la première génération de centrales de fusion commerciales.
La rédaction
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