Tout à coup l’horreur, Paris est attaqué, tombent sous les coups des anonymes, des gens de la vie de tous les jours, parmi eux, il en est qui croyaient au ciel, d’autres qui n’y croyaient pas. «Et leur sang rouge ruisselle – Même couleur même éclat – Celui qui croyait au ciel – Celui qui n’y croyait pas», disait Aragon, appelant à l’union de la résistance, célébrant les résistants Gabriel Péri, Honoré d’Estienne d’Orves, Guy Môquet, Gilbert Dru…
Ceux qui sont tombés dans la nuit du 13 au 14 novembre, sont des héros anonymes du quotidien. Ils tombent parce qu’ils sont allés au restaurant, au spectacle, parce qu’ils étaient à Paris, parce qu’ils étaient au mauvais endroit au mauvais moment. Avec ces attentats, nous apprenons que, quel que soit le lieu, quel que soit le moment, il peut toujours être le dernier. Daesh en a décidé ainsi.
Et c’est la guerre ou plutôt une guerre, quotidien de l’Irak, de la Syrie, qui pousse sa corne jusqu’en France. Qui tue, aveuglement, salement… Une guerre qui impose des combats; une aide accrue à ceux qui, tels les Kurdes, luttent sur le terrain, en Irak, en Syrie. Cela impose une résistance, ici, partout, contre Daesh, mais aussi contre toutes les formes de racisme et d’antisémitisme, contre les tentations de repli sur soi, de rejet de l’Autre, contre l’islamophobie. Il ne faut, en effet, pas tomber dans le piège tendu par les terroristes, visant à faire des musulmans des boucs émissaires. Des musulmans qui sont les premières victimes de ce mouvement qui exploite, pervertit, trahit, une religion à ses propres fins, son propre délire totalitaire.
Guerre, résistance, on ne peut oublier que, pendant les combats, la Résistance forgeait en même temps un projet politique, un nouveau pacte social. C’est sur les failles, les mal-être, que Daesh distille son poison, sa haine, crée des béances. Face à cela la réponse doit être sécuritaire, militaire mais, surtout, elle doit être politique en s’appuyant sur cette communauté de destin qu’est la Méditerranée. Civilisation, barbarie, l’enjeu est là, et la civilisation ne peut l’emporter que si chacun est conscient que la barbarie n’est pas que chez l’Autre; un Autre dans lequel on mêlerait le bourreau et la victime. L’éducation, l’espoir d’une vie meilleure, sont les plus efficaces des armes; liberté, égalité, fraternité, la plus belle des réponses au « viva la muerte» de tous les totalitarismes, les sectarismes.
Michel CAIRE