Publié le 19 juillet 2022 à 14h34 - Dernière mise à jour le 11 juin 2023 à 19h10
Un titre : «Heureux soient les fêlés» inspiré par la phrase sans doute apocryphe de Michel Audiard : «Heureux soient les fêlés, car ils laisseront passer la lumière.» Un comédien pour l’incarner : François Mallet qui, diplômé de Sciences Po Lyon en journalisme en 2017 a fait ses débuts sur scène quelques mois plus tard. Un artiste désopilant à la bouille incroyable qui se définit comme bipolaire, gay, patineur artistique, et qui précise qu’il nous offre de sa jeune existence rythmée par cette perpétuelle urgence de vivre des morceaux choisis où, dit-il: «Folie et sensibilité forgent un quotidien nourri de personnages délirants, mais toujours criants d’amour et de vérité.»
Rencontre avec un voltigeur de mots, doublé d’un irrésistible acteur. Pour un spectacle fin, intelligent, brillant, enlevé, qui est aussi un hymne à la tolérance, l’acceptation des différences de chacun, le besoin d’entraide, et de respecter autrui.
Quel est votre parcours artistique ?
Je n’ai pas débuté par le théâtre ni l’humour mais par la danse sur glace à l’âge de 8 ans, sur le plateau du Vercors. C’est tout de suite le feu sur la glace et cette passion m’emmène jusqu’à mes 18 ans où j’arrête pour privilégier les études, faute d’être retenu pour faire partie de l’équipe de France.
En sortant de Sciences Po, je me rends compte que je ne veux pas vraiment être journaliste et je commence des ateliers de comédie dans les pentes de la Croix Rousse à Lyon. S’en suit une participation au concours d’humour Kandidator sur Paris et Lyon puis ma première programmation au « Boui-Boui » à Lyon en septembre 2019. Après deux années et demi passées sur les planches de Rhône-Alpes, me voici au festival d’Avignon Off pour la première fois avant de monter sur Paris à la rentrée prochaine.
Comment vous est venue l’idée de ce spectacle ?
Le spectacle s’est construit progressivement à partir du concours Kandidator. Je créais des nouveaux sketches tous les mois et je me suis rapidement retrouvé avec trente minutes de matière. J’ai senti que l’envie d’écrire et de partager grandissait. Alors pour construire le spectacle, j’ai affiné progressivement ma création autour du thème central de la sensibilité. Je ne peux vraiment pas dire que j’avais toujours rêvé de monter sur les planches et de raconter des tranches de vie, c’est venu petit à petit avec l’épreuve de la scène.
Quelles sont les idées fortes du spectacle ?
Au commencement, il y avait cette notion de sensibilité, voire d’hypersensibilité qui traversait le spectacle mais avec beaucoup de digressions et de sketches qui finalement sortaient du cadre. Depuis un an, j’ai vraiment décidé de me livrer sans complexe au sujet de ma bipolarité et de ce qui l’accompagne, de ce que ça me fait au quotidien et de la beauté qui en résulte. Avec évidemment des sujets annexes qui font aussi qui je suis comme le patinage et qui viennent consolider le fil rouge du spectacle.
Comment Nicolas Vital, votre metteur en scène, a travaillé avec vous sur ce spectacle ?
J’ai d’abord travaillé avec Félix Le Braz que j’ai rencontré pendant le concours Kandidator à Lyon. On a collaboré pendant presque 2 ans en faisant en sorte que le spectacle ait une unité et qu’il prenne un côté universel. Depuis avril dernier, je suis mis en scène par Nicolas Vital qui travaille avec Bérengère Krief, ou Laura Felpin, et on a mis l’accent sur la subtilité du message que je fais passer sur scène en naviguant constamment entre la frénésie du spectacle et la sensibilité qui va de paire. On a aussi resserré la structure pour plus de clarté. C’est une collaboration qui me ravit car Nicolas a tout de suite été intéressé par le sujet de la bipolarité et par la pluridisciplinarité du spectacle, entre adresses au public, personnages et danse.
Quel est votre rapport au public ?
Pour être honnête, j’ai toujours été à l’aise sur scène avec moi-même mais l’appréhension du public a parfois été difficile. Au départ, je n’étais pas vraiment dans une dynamique d’échange réel avec les spectateurs dans le sens où l’improvisation me terrifiait. Réagir aux réactions spontanées de ceux-ci et les prendre en compte m’était difficile. Et puis plus j’ai pris confiance en mon spectacle, plus j’ai cru au message que j’ai envie de faire passer. Plus l’échange s’est instauré et même s’il s’agit d’un spectacle où la délivrance du message reste prédominante sur l’interaction avec la salle, il y a des petites sorties de route qui sont agréables.
Qu’est-ce que représente le Off d’Avignon pour vous ?
Le Off d’Avignon, c’est un aboutissement de ces 3 premières années passées dans la région lyonnaise à roder le spectacle, à expérimenter, à rencontrer les personnes qui m’ont permis de progresser sur scène et en dehors. Je ne vois pas Avignon comme une finalité mais comme un tremplin où je présente mon spectacle pour susciter l’envie à la fois chez le public et chez les professionnels de revoir ce seul en scène très prochainement un peu partout.
Une petite anecdote concernant cette première avignonnaise ?
J’ai croisé Elsa Guedj qui joue Apolline dans la série Drôle, juste à côté de la Tâche d’Encre où je joue et ça faisait longtemps que je n’avais pas autant souri en une demi-seconde. J’étais presque aussi content que ma performance sur scène ce soir là.
Propos recueillis par Jean-Rémi BARLAND
«Heureux soient les fêlés» par François Mallet. A 22h30 – Au théâtre La tache d’encre. 1, rue de la Tarasque. 84 000 Avignon. Relâche les 18 et 25 juillet. Tarifs 16€; 11€ ; Réservations au 04 90 85 97 13 ou sur latachedencre.com