Réunir la musique de Beethoven et les dessins d’un manga original pour créer un « space opéra immersif » d’une heure en forme de combat pour la paix : Laurence Equilbey en avait rêvé, elle l’a fait. Cet « objet musical » unique, créé il y a un an à la Seine Musicale à Paris, était proposé ce dernier samedi à deux reprises au Grand Théâtre de Provence à Aix-en-Provence avant de s’envoler vers Hong Kong où il sera donné trois fois dans le cadre du 53e HK Arts Festival.

« “Beethoven Wars” incarne les idéaux humanistes chers au compositeur et invite les spectateurs à réfléchir sur un monde meilleur malgré les défis de la guerre et de la souffrance humaine. » Aux côtés d’Antonin Baudry qui en signe la réalisation, Laurence Equilbey et son équipe du département éducation d’Insula Orchestra, ont créé cet objet musical unique que les organisateurs du festival de Hong Kong disent être accessible aux enfants de plus de 6 ans. L’occasion de diffuser un message pacifiste et écologique auprès du plus grand nombre, mais aussi d’amener les jeunes à l’audition de partitions rares, celles choisies par la directrice musicale au cœur du répertoire de Beethoven: les musiques de scène du « Roi Stéphane », des « Ruines d’Athènes » et de « Leonore Prohaska ». « De véritables perles oubliées, confie Laurence Equilbey, avec des moments de pure beauté. » Des « perles » en adéquation totale avec les images et l’action de ce manga si proche de la réalité du monde d’aujourd’hui.
Des perles musicales dont la nacre est posée sur un noyau de vie à coups d’archets, de souffle sur les hanches et de percussions sur les peaux, par les instrumentistes qui ont pris place au bas de l’orchestre, à hauteur du premier rang, ainsi que par les voix d’Accentus et des solistes, la soprano Ellen Giacone et la basse Matthieu Heim, de part et d’autre de l’écran où sont projetées les images. Le seul petit problème c’est que la qualité de ces dernières et celle de l’interprétation forcent à un choix parfois cruel de porter son attention sur les unes au détriment intellectuel des autres; certainement du fait de la visualisation de l’orchestre et des ensembles vocaux en même temps que celle de la projection.
Mais ne boudons pas notre plaisir en jouissant sans réserves de l’intelligence de ce « space opéra immersif» totalement cohérent dans sa conception, le CD consacré à la seule musique permettant de retrouver les pages peu connue du génie de Beethoven qui accompagnent le mélodrame. « Au-delà de son aspect spectaculaire, conclut Laurence Equilbey, le spectacle véhicule un message qui interpelle sur l’avenir de notre planète et redit l’importance des arts pour notre humanité. » Avec « Beethoven Wars », le message est idéalement mis en valeur et reçu, à Aix-en-Provence, par deux salles du GTP archi combles qui présentaient l’intérêt majeur de regrouper, côte à côte, très jeunes et moins jeunes…
Michel EGEA