Publié le 1 février 2016 à 13h34 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h44
Le débat sur les orientations budgétaires -qui vont signer la feuille de route de la nouvelle majorité en 2016- a mis en exergue un choix que la présidente (LR ) Martine Vassal qualifie de «courageux et ambitieux». La levée de bouclier de l’opposition (de gauche) sur des «économies» qu’elle considère «injustes» s’est traduite par des échanges courtois et constructifs.
C’est le rapporteur du budget Didier Réault qui présentera les grandes lignes de ces orientations budgétaires. Soulignant en prélude de son intervention que depuis la réforme de la taxe professionnelle, «le département ne dispose plus que d’un pouvoir fiscal réduit», limité à la fixation du taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB). Annonçant: «Et, on s’engage à ne pas augmenter les impôts». «En face, poursuit-il, si on n’augmente pas les impôts et que l’on nous ponctionne nos dotations, il faut faire des économies». Un choix des économies qui sera au cœur du débat.
Il rappelle que la «situation économique nationale est très dégradée» et que «l’emploi impacte les politiques publiques». Évoque notamment la position de certains départements «qui se sont retrouvés dans l’impossibilité de payer le 12e mois aux allocataires». L’occasion de pointer les dépenses sociales obligatoires du département avec les trois allocations individuelles de solidarité (AIS) que sont le revenu de solidarité active (RSA), «avec un montant qui a progressé de 2%»; l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et la Prestation de compensation du handicap (PCH) «qui sont en hausse de près de 5%». Le nombre d’allocataires, après une forte croissance en 2014 est en retrait en 2015. Plus de 77 000 au mois de janvier 2015 , il était à la fin de l’année d’un peu plus de 75 000 «grâce à l’accroissement des contrôles et à une orientation favorisant le retour de l’emploi», indique l’élu en charge du budget. Les dépenses de personnels (environ 17% des charges) connaissent une progression d’environ 2,2M€ soit 0,7%. Ainsi pour faire face à ces augmentations incompressibles, les autres politiques publiques (environ 20% des charges) ont été réduites pour un total de 6M€. A l’intérieur, si certaines sont en baisse, d’autres progressent : transports (+3,6%), SDIS (+6,8%)… En ce qui concerne les dépenses d’investissement, «elles sont reconduites». Le rapport indique qu’en 2015 les dépenses d’investissements hors dette sont encore importantes. Celles-ci sont passées de 437,5M€ en 2012 à près de 490M€ en 2015. Cinq secteurs, l’aide aux communes (152M€), les routes (119M€), l’Éducation (72M€), les transports (40M€) et l’économie/ recherche (28M€) représente 85% de l’investissement. Pour financer les 490M€ de crédit de paiement d’investissement, le département a dégagé une épargne pour 60% des besoins et a eu recours à l’emprunt pour 40% .
En ce qui concerne 2016, «Nous sommes face à une incohérence des politiques du gouvernement et nous ne voulons pas nous retrouver comme nos collègues en cessation de paiement et devoir remettre les clefs de l’institution au préfet. Dix départements en France sont dans ce cas». Didier Réault d’avancer comme exemple: «Les 2% d’augmentation imposés par le gouvernement sur le RSA représentent 10M€.»
Les orientations du budget 2016
Le budget 2016 qui s’élève à 2,6 milliards d’euros «sera l’outil de la mise en action du programme de la nouvelle majorité». il est avancé que le diagnostic issu des États généraux de Provence a conforté de mettre en priorité : l’amélioration de l’attractivité économique et le rayonnement du territoire, au service de l’emploi et de la création de richesse; l’exigence sociale pour une solidarité envers les personnes qui en ont le plus besoin; la solidarité pour tous les territoires à travers les politiques du logement, des transports ou de l’aide aux communes ; la jeunesse, en améliorant les politiques de l’éducation, de la santé, de la culture ou encore du sport et en donnant à tous les clés de l’autonomie.
Le rôle du département est d’être un véritable bouclier social
Gérard Frau (Groupe PC et partenaires) de revenir sur les décisions modificatives (MD) de la majorité au rang desquelles : «La suppression des ordinateurs dans les collèges alors que nous proposions l’équipement de tablettes numériques de l’ensemble des collégiens du département; la suppression de la prime de Noël remplacée hypothétiquement par une prime de 50 euros par enfant; la réduction des conditions de la gratuité des transports pour les bénéficiaires du RSA.» «Ces décisions, poursuit-il, en direction des publics les plus fragiles pour l’essentiel mais également de tous les publics pour les ordinateurs peuvent être considérées comme des marqueurs de votre action en matière sociale.» Rappelant : «Notre budget sera le premier à être exécuté sous l’empire des lois NOTRe et Maptam et donc, la mise en place de la métropole Aix-Marseille-Provence qui est plutôt en ce moment une métro-pâle.» «Néanmoins, ajoute-t-il, notre Département garde des marges suffisantes pour mener à bien ses politiques sans agir avec l’obsession permanente de l’économie et de la réduction de la dépense. Il doit permettre de faire des choix clairs qui ont pour base la compétence première du département « chef de file d’aide sociale, d’autonomie des personnes et de solidarité des territoires »» Et d’insister : «Le rôle du département est d’être un véritable bouclier social ». Considérant : «S’il est de bonne guerre de « hurler au loup » sur la situation d’une collectivité territoriale issue de la gestion de son prédécesseur, le constat et le rapport le rappelle à plusieurs reprises, est que le département n’est pas en faillite, qu’il dispose de marges claires et que l’épargne et l’endettement sont à niveau acceptable». Et d’avancer quelques chiffres: «La dette par habitant est de 323€ dans les Bouches-du-Rhône pour 825€ dans Alpes Maritimes et 180€ dans les Hautes-Alpes ou encore 810€ dans le Var…»
Le maire de Fos-sur-Mer, René Raimondi (groupe socialiste) réclame pour sa part: «Des précisons sur la stratégie proposée». Considérant que les rapports ne sont pas définis «sur le long terme». «Seuls des travaux vont jusqu’en 2018 et cela est insuffisant», s’insurge-t-il avant de pointer: «Les choix budgétaires « courageux » annoncés par la majorité ne sont-ils pas liés à la suppression des transports gratuits aux bénéficiaires du RSA ou encore la surprime de Noël… ? Ces choix ne correspondent pas à notre vision de l’action publique du département». Et d’interroger : «L’impact économique et sociétal a-t-il bien était mesuré ? Remettre les bénéficiaires sur le chemin de l’emploi -plus de 77 000 en janvier 2015 , 75 000 fin 2015-, en quoi ont consisté les contrôles et permis un retour à l’emploi ?» Et de poursuivre en ironisant sur la communication du département où le nom de la présidente Martine Vassal a été décliné sur nombre de supports. «Est-ce utile dans une telle période?»
Des orientations de fer dans un rapport de velours
Michèle Rubirola (Groupe Socialiste écologiste) parle pour sa part «d’orientations de fer dans un rapport de velours. Difficile de serrer plus la vis.» Lisette Narducci (Les Indépendants) se réjouit : «On ne touche pas la fiscalité, nous l’approuvons. On parle du nombre de bénéficiaires du RSA qui a explosé, nous attachons une attention particulière au fait qu’on les amène sur le chemin de l’emploi.» Et d’évoquer les politiques facultatives qui sont «des enjeux majeurs. Le monde associatif est vecteur de très nombreux emplois. C’est aussi du lien social, il faut maintenir des efforts dans ce secteur.»
«On ne regarde pas ce qui a été fait mais ce qui reste à faire»
Pour Gérard Gazay (Les Républicains-UDI), il s’agit «de la nouvelle façon de faire de la politique avec une obligation de résultats. Au niveau de la solidarité active, il est temps d’aider ceux qui en ont vraiment besoin.» D’énumérer nombre d’actions :
un plan numérique de 36M€ sur ces 6 ans «pour en finir avec les zones blanches». French Tech avec the Camp 6M€ ; 300M€ sur 5 ans pour le transport ; la construction de 3 000 logements «pour les habitants du territoire» (…) «Nous ne sommes pas, précise-t-il, dans le satisfecit. On ne regarde pas ce qui a été fait mais ce qui reste à faire pour une Provence terre de croissance, d’accueil et d’innovations».
Lionel Royer-Perreaut (Les Républicains-UDI) citera Pierre de Coubertin : «Voir loin, parler franc, agir ferme». Ce qui permet à l’élu de soutenir les orientations de la majorité: «Nous assumons nos convictions et cette devise est notre axiome politique. Être de droite ce n’est pas s’occuper des gens en difficultés? Mais, qu’est-ce que c’est que faire du social, être socialiste? C’est réhabiliter certaines cités et pas d’autres? (…) On peut faire du social et être juste. Le social est à partager entre tous. Nous n’acceptons plus ce débat manichéen à gauche la main sur le cœur et la droite sur le portefeuille». Le maire de Miramas, Frédéric Vigouroux (Groupe Socialiste) considère que ces «orientations budgétaires sont stratégiques». Soulignant que «la baisse des dotations ne datent pas d’hier. Alors monsieur Réault il ne faut pas se cacher derrière la baisse des dotations de l’État mais parler d’un choix sur les économies. j’alerte la majorité sur un manque de cohérence des projets. Un écart entre ce qui est annoncé et ce qui est arrivé.». A l’instar de René Raimondi, il revient sur la communication de la présidente évoquant «une dichotomie entre la nécessité d’un marketing territorial et ce type de communication».
«Notre politique s’adresse à tout le monde et nous allons tendre la main aux classes moyennes»
Didier Réault de reprendre la parole: «Le social est la première des politiques du département». Revient sur l’activité économique: «Quels moyens avons-nous pour pousser à la création de richesses? C’est participer aux investissements, travaux d’infrastructures, facilité la vie de ceux qui vivent ou viennent dans ce département. Et ensuite c’est notre capacité à mettre des crédits à la disposition de ceux qui sont privés d’emploi, par la formation, facilité l’accès à l’emploi; la capacité d’investissement dans le logement (…). Pour répondre à René Raimondi, il explique: «Dites-moi comment une collectivité peut prévoir des recettes, une vision des choses sur 6 ans avec un gouvernement qui change sans cesse ses programmes. C’est déjà du courage de le faire sur 3 ans. Il s’agit donc d’aller plus vite, plus fort et éviter d’aller dans le mur comme d’autres départements». Précisant: «Sur un budget de plus de 2 milliards plus de 1,3 milliard est affecté à la politique sociale. On revoit tout. On évalue les politiques publiques qui sont appliquées depuis 50 ans avec objectivité et transparence. Nous assumons nos choix.»
La présidente Martine Vassal réagira aux quelques banderilles plantées à propos de sa communication. Ironise: «Je vois que cela a fait le buzz, c’est que la Com est bonne. Je tiens à vous rappeler que, Anne Hidalgo a fait pareil avec sa mairie». Expliquant cette action notamment par la mise en avant d’un changement de majorité. Et annonce que le budget Com «va baisser de 25% en 2016». Regrette que l’opposition« n’ait pas eu l’honnêteté de souligner aussi ce qui va dans le bon sens». «Nous voulons, affirme-t-elle, que le budget soit courageux et ambitieux». «Une majorité est élue sur son programme et peut-être, ajoute-t-elle nous faisons ce que nous disons». Revient sur «le succès des États-Généraux de Provence» forts de 6 000 contributions. Et d’insister: «Notre politique s’adresse à tout le monde et nous allons tendre la main aux classes moyennes».
Patricia MAILLE-CAIRE