Publié le 29 octobre 2019 à 9h14 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h24
Non, ils ne compteront pas pour des prunes. L’ensemble de la sphère économique du territoire a en effet décidé de faire entendre sa voix pendant les élections en impulsant une démarche contributive, destinée à porter les attentes et les besoins des entrepreneurs, salariés et autres organisations syndicales et professionnelles. Son nom: Tous Acteurs Municipales 2020.
Jamais campagne électorale n’aura autant poussé à l’action et insufflé l’éveil citoyen que ces municipales marseillaises. Société civile, associations, organisation diverses et à présent monde économique se lèvent les uns après les autres pour, tout au moins pointer du doigt les lacunes phocéennes, les urgences, si ce n’est poser des attentes. Voire même des propositions concrètes. C’est un peu l’idée de Tous Acteurs Municipales 2020, démarche contributive lancée officiellement le 13 juillet dernier par le monde entrepreneurial, portée notamment par la CCIMP, et faisant aujourd’hui plus d’un pas supplémentaire dans le concret. Et il s’agit d’une mobilisation de belle ampleur, illustre Jean-Luc Chauvin, président de la Chambre : «Les prochaines échéances auront une importance majeure, nous sommes à un tournant. Ce qui nous intéresse, c’est de proposer le projet des représentants économiques, des salariés, des différentes zones d’activité. En somme, des 105 000 entreprises du territoire dans leurs composantes larges», expose-t-il. Ainsi, une trentaine de structures a déjà rejoint le mouvement… «d’autres vont nous rejoindre». Quelques dizaines d’organisations, dont des patronales… sauf que le logo de l’UPE13 n’apparaît pas encore parmi les parties prenantes. Retard d’engagement lié à la «nouvelle gouvernance», s’interroge Jean-Luc Chauvin, puisque le Medef local a vu Philippe Korcia prendre la présidence par intérim, remplaçant au pied levé Johan Bencivenga, justement candidat à l’investiture pour le parti présidentiel… D’autres ne s’embarrasseront pas de la diplomatie, à l’instar d’un André Bendano fustigeant l’absence de l’organe patronal, au motif qu’«il y a eu sans doute des problèmes d’embouteillages entre le 16, place Charles de Gaulle et le Palais de la Bourse», situé à … quelques mètres plus loin sur la Canebière. L’avenir dira vite de toute façon si ralliement il y aura.
Une démarche «apolitique»
Une chose est sûre pour le président de la Chambre, ce rassemblement est crucial, la nécessité de gagner en attractivité l’est plus encore. Car même si Marseille Provence et ses outils institutionnels ont progressé, «la compétition permanente entre territoires oblige à se doter d’infrastructures modernes. Et puis, pendant que nous sommes montés en gamme, les autres territoires ont eux aussi accompli des pas en avant». Ne surtout jamais mollir, donc. Tout retard serait forcément préjudiciable. Ainsi pour aider à garder le cap, la sphère économique, via la démarche Tous Acteurs Municipales 2020, entend-elle «poser sa vision, comme on sait le faire dans nos entreprises. Une projection du territoire à 2040, à 2050». Toutefois, Jean-Luc Chauvin précisera par ailleurs le caractère «apolitique» de la démarche, puisque ceux qui le voudront seront libres de s’emparer du fruit de ces contributions…ou non. Elle se veut également «ouverte et contributive», via la mise en ligne d’une plateforme numérique éponyme. Car chacun peut y déposer une idée, non seulement les organisations professionnelles, les entrepreneurs, les salariés, mais aussi tout citoyen. Le site est ainsi accessible à tous… Et partout. Puisque tous les secteurs de Marseille Provence sont représentés, notamment via l’implication de nombreuses associations de zones d’activités. De La Ciotat (Athélia) à Aix-en-Provence (Plan de Campagne, Gepa) en passant par Aubagne (Pole Alpha, Les Paluds), Marseille (Cap au Nord, Marseille Centre, Vallée de l’Huveaune…), «nous couvrons tous les territoires». Ne reste plus qu’à contribuer, donc…
Les grandes priorités déjà connues
Il sera possible de le faire sous cinq grandes thématiques: «rêver grand» pour proposer une vision à 30 ans d’un territoire qui serait «business et connecté», «attirant les talents et sachant les garder», «ouvert au monde, accueillant », et enfin, «innovant, précurseur de la transition écologique». Et d’ores et déjà, de premières attentes se dessinent. Et ce ne sont pas des scoops, mais des revendications hélas récurrentes sur Marseille Provence. Alain Comba (FO), associé à la démarche pour «apporter la vision des salariés», dévoile ainsi sa priorité, tournant autour de la corrélation entre la mobilité et l’emploi. «Parfois, les personnes se trouvent rayées du Pôle Emploi parce qu’elles refusent une offre du fait de l’impossibilité de se rendre sur ce lieu de travail via les transports en commun. Et tout cela ne se dit pas comme cela devrait se dire», appuie-t-il, sous-entendant que l’interprétation de cet état de fait est encore très largement imputé au salarié et à son soi-disant manque de motivation. Mais pour autant, cette problématique préoccupe aussi les patrons, renchérit Robert Abela, (Association des commerçants de Plan de Campagne). «La priorité, c’est le transport. Pour le patron, il est synonyme d’économie. Pour le salarié, il est gage de travail. Et les deux se rejoignent. Faute de ça, de nombreux emplois sont non pourvus sur la zone ! » Or, Plan de Campagne, c’est 600 entreprises et 7 000 salariés… Richard Pagnon (UIMM) rebondira dans le même sens, liant quant à lui question des déplacements et formation, puisque «celles et ceux qui veulent développer leurs compétences doivent pouvoir le faire en rejoignant les centres idoines. La mobilité est la clé, les élus en ont en partie la solution», avance-t-il. Et de souligner l’enjeu lié à cette mobilité, non seulement sur le plan social, mais aussi environnemental. «Quand il n’y a pas de bus, on prend sa voiture, avec les impacts que l’on connaît en matière de pollution».
Restitution prévue mi-décembre
Prenant la parole à son tour, Sylvie Plunian (FCE), relie cette question à une autre, tout aussi prioritaire : «Mon siège social est dans le 1er arrondissement, mon entrepôt dans le 15e. Et je compte 80% de femmes parmi mes collaborateurs. Donc ma problématique, c’est la sécurité. On a besoin de bus, de métros, de trams, mais aussi et surtout de pouvoir emprunter ces moyens de transports en toute quiétude».
Gérald Bollon (CPME13) rappelle tout d’abord que la Confédération a lancé préalablement à Tous Acteurs Municipales 2020 une grande consultation numérique. «60 000 questionnaires ont été envoyés, 8 000 nous ont été retournés remplis pour l’instant». Avec quels résultats ? «Des préoccupations fortes ressortent déjà, relatives tout d’abord à la question de l’environnement», outre celles évoquées plus haut. Une mise en lumière logique, sachant que «90% des personnes qui nous ont répondu ont considéré que l’entreprise a un rôle sociétal ». Enfin, André Bendano (U2P) met en avant une dernière priorité : «Demander aux élus de penser petit. Puisque les règles établies pour les gros peuvent difficilement être suivies par les TPE. Tandis que dans le cas inverse, les groupes auront toujours les moyens de s’aligner» sur ces dernières… alors qu’elles représentent entre autres «3 millions de personnes, des emplois non délocalisables, des contributeurs de l’impôt, des porteurs de l’apprentissage, la consolidation d’un lien social. Sans les artisans, Marseille serait un désert !». Le message est donc passé. Pour ce qui est de la restitution proprement dite, elle aura lieu à la mi-décembre, et verra l’ensemble des acteurs émettre «des ambitions et des propositions concrètes». Rendez-vous donc sous ces échéances.
Carole PAYRAU