Publié le 26 octobre 2022 à 11h15 - Dernière mise à jour le 13 décembre 2022 à 12h34
La charte de la construction durable vient de souffler sa première bougie. Critiquée par une partie des acteurs de l’immobilier qui y voyaient un ensemble de freins, elle fait son chemin et bouscule des habitudes voire des certitudes. Réunis à la maison de l’architecture, élus, promoteurs et architectes ont pu dresser un bilan. Tous ont pris conscience du changement de paradigme. La municipalité, par la voix de Mathilde Chaboche, pilote la politique de développement urbain de la ville malgré les fortes oppositions avec la Métropole.
Mieux que prévu
La charte signée en 2021 a tellement bousculé les choses que les promoteurs n’ont eu de cesse de dénoncer les embûches et la chute de la construction de logements. Finalement cahin-caha elle a repris et Mathilde Chaboche s’est dit surprise par le nombre de logements construits. «On tablait sur environ 3 000 on est à 3 400. C’est que ça ne va pas si mal. La charte a fermé la porte aux critiques avec son socle clair et la qualité des opérations menées. Elle évoluera encore. Nous aurons une V2 ».
Promoteurs et architectes au diapason
Cette charte est un changement de paradigme tant côté mairie que des promoteurs. «La réflexion n’est plus sur l’îlot qu’on construit mais sur ce qu’on peut proposer aux voisins et pas uniquement sur notre construction», confirme Aymeric De Alexandris d’Icade promotion. «Cela prend plus de temps, c’est aussi moins rentable dans un premier temps. Il va falloir que tout le monde fonctionne avec le même logiciel y compris pour le foncier qui a longtemps été la poule aux œufs d’or pour les propriétaires». «C’est extrêmement grisant de ressentir cet enthousiasme et cette exigence de la part de la Ville. On est vraiment challengés», remarque Guillaume Dujon de la société Architectes singuliers. «Plus on partage, plus on a une conception holistique sur les problématiques notamment dans la concertation des riverains. La charte impose cela. S’implanter dans un quartier, c’est comme entrer chez des amis. On n’arrive pas comme un sauvage».
Aymeric De Alexandris et Guillaume Dujon
Métropole /Ville : deux visions du logement
Une chose est sûre Mathilde Chaboche et Martine Vassal ne partiront pas en vacances ensemble. Leur vision du logement, leur idéologie sont trop divergentes. «La Métropole envisage le logement comme un produit, un objet d’investissement et de transaction financière qui doit, dans un cadre dérégulé, se monnayer comme bon semble aux propriétaires et aux acteurs, et notre vision qui est celle qu’avant d’être un produit financier, le logement est avant tout un droit et qu’il faut lutter contre la financiarisation de la ville à travers la régulation des prix. Il faut encadrer le prix des loyers comme à Paris, Lyon ou Lille». (Vidéo Chaboche encadrement)
La guerre sur la mixité sociale
Le dossier de l’abaissement des seuils pour la mixité sociale est toujours l’objet d’affrontements avec la Métropole. Cette dernière doit donner son avis et ne valide pas totalement les choix de la municipalité. «On avance mais à petits pas. Nous on veut que tout programme qui a plus de 30 logements puisse en réserver 30% au social», indique Mathilde Chaboche. La Métropole nous a enfin entendus mais sur 12% du territoire de la ville dans les lieux les mieux desservis ! Nous on veut créer de petites unités avec du logement social partout. Il en manque énormément à Marseille et c’est très déséquilibré. Certains arrondissement en compte 10%, d’autres plus de 50%».
Combien de temps durera le face à face entre Métropole et municipalité ? Le moins possible serait le mieux, dans l’intérêt des Marseillais. Reportage Joël BARCY