Publié le 16 mars 2017 à 21h40 - Dernière mise à jour le 28 octobre 2022 à 15h56
Le club Ethic Eco, présidé par Mohamed Laqhila, président d’honneur du Conseil Régional de l’Ordre des Experts Comptables Marseille-Paca vient de recevoir Jean-Pierre Cossin, Conseiller Maître à la Cour des Comptes, Professeur associé à l’Université de Paris 12 et Alain Trannoy, économiste, Aix Marseille Economic School, auteur du livre «Il faut une révolution fiscale – qu’en pensent les économistes ?» pour un débat sur: «la fiscalité est-elle éthique?»
Mohamed Laqhila évoque les raisons qui ont conduit les experts-comptables à organiser un tel débat: «La fiscalité est le cœur de métier de l’expert-comptable qui est reconnu comme un acteur qui contribue à la fiabilisation de la base fiscale et en tant que citoyen, il est aussi un contribuable…». Jean-Pierre Cossin avoue avoir les plus grands doutes sur le fait que la fiscalité soit éthique. Et cela pour une simple raison: «La morale relève du devoir, l’éthique de l’amour. On consent à l’impôt, de là à parler d’amour…». Pour lui: «L’impôt est d’autant plus accepté qu’il est juste et équitable, des notions très suggestives. Un impôt juste, dans l’esprit de beaucoup c’est celui que paie les autres… Et pourtant le caractère juste et équitable est un concept constitutionnel».
Alain Trannoy tient à souligner: «Nous sommes dans une société d’économie mixte, la distribution est modifiée par l’activité des pouvoirs publics». Il insiste sur l’importance d’avoir plusieurs impôts «car cela minimise le caractère nocif de l’impôt». Puis d’indiquer: «Il est des impôts incitatifs, tel que la taxe carbone et d’autres qui ont un objet de redistribution». Il rappelle: «C’est la révolution qui a inventé la taxe sur les revenus mobiliers et a inscrit une notion de progressivité qui s’est affirmée tout au long du XIXe siècle avec l’apparition de l’impôt sur le patrimoine». Ajoute que c’est le monde anglo-saxon qui a inventé, au XIXe, l’impôt sur le revenu. La Grande-Bretagne en 1842, les États-Unis vingt ans plus tard. Puis de revenir à l’actualité: «Si notre déficit extérieur ne s’était pas accru en 2015-2016 nous aurions eu le même taux de croissance que l’Allemagne. Notre problème ne relève pas de la demande mais de l’offre. Et cela nous conduit aux problèmes de chômage et de remboursement de la dette. La campagne devrait tourner autour de questions telle: est-ce que la fiscalité ne décourage pas l’offre? Sachant que l’impôt sur les sociétés est le plus élevé d’Europe après la Belgique». Pour lui, il importe de s’interroger «sur la taxation de l’épargne, de la rente immobilière plutôt que sur celle du profit dû à l’esprit d’initiative, la créativité et, pour une part, de la chance quand on ne taxe que la chance en matière de valeurs foncières.» Jean-Pierre Gossin revient sur la justesse de l’impôt pour considérer: «Les impositions indirectes, qui représentent la plus grande partie des rentrées fiscales, ne sont pas justes mais elles sont plus faciles à collecter». Les deux intervenants déplorent la complexité de la fiscalité. Jean-Pierre Gossin considérant à ce propos: «C’est d’autant plus regrettable que la meilleure façon d’avoir une approche civique c’est d’appliquer scrupuleusement la loi fiscale qui doit être simple, spontanée».
Michel CAIRE