Publié le 22 mai 2018 à 10h12 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h46
Elle fait partie intégrante de la culture locale au même titre que la bouillabaisse et Pagnol. Elle est exhibée comme un étendard dans les cités des quartiers Nord alors que d’autres brandissent des livres en espérant un jour sortir de cet enfer des cités difficiles. Elle crépite parfois pour rappeler aux autochtones qu’ils sont condamnés à vivre là avec la peur au ventre que leur enfant ou petit-enfant tombe sous les rafales aveugles des dealers. Elle vient des Balkans pour faciliter en la cité phocéenne des règlements de compte laissant à terre des victimes à peine sorties de l’enfance et confronter des policiers à une saloperie que leurs interventions peinent à éradiquer.
Hier encore, elle a chanté son refrain effrayant à la Busserine. Hier encore, elle a hurlé en pleine cité pour que les Marseillais n’oublient pas qu’après leur équipe de football il existe, dans le folklore local, cette arme bien trop connue sans jamais vraiment montrer son sale visage.
Elle est une rumeur, un mythe que les Parisiens et les Lyonnais ont vite fait d’assimiler comme la marque de fabrique de nos cités. Oubliés les Panisses et les chichis frégis, délaissés la bouillabaisse et les pieds paquets au profit de cette satanée arme automatique. Elle est si populaire que je propose qu’elle apparaisse sur la bannière de notre ville, qu’elle se substitue à la croix bleutée ou vienne se placer en haut à droite ou plutôt à gauche, à la place du cœur. Ce serait lui rendre justice puisqu’elle contribue largement à faire connaître notre ville, à valoriser notre culture et comme les autorités semblent dépassées voire non concernées autant qu’elle montre fièrement son visage et qu’elle soit utilisée comme vecteur d’une qualité de vie. Après tout pourquoi pas … ?
Mais voilà à Paris, au Palais Bourbon il y a d’autres priorités, d’autres motifs d’inquiétude bien plus légitimes que la recherche d’armes automatiques dans un pan entier de la deuxième ville de France. Voyez Marlène Schiappa défendre mordicus un projet de verbalisation d’attitudes, de regards et de gestes obscènes comme si cette loi devait changer subitement les pervers en représentants de vertus et rassurer la jeune femme en goguette. Chacun ses priorités allez vous me dire ! Certes mais j’aimerais bien voir le ministre de l’Intérieur aussi actif que la jeune secrétaire d’État à l’égalité entre les femmes et les hommes. Je rêve de le voir poser son chapeau, se retrousser les manches et prendre à bras le corps cette recrudescence d’armes automatiques. En fait je rêve simplement de le voir prendre des décisions, je rêve qu’un jour cette Place Beauvau puisse abriter une vrai ministre au fait des problématiques de nos cités, un homme courageux qui ne soit pas aux ordres d’une politique, hypocrite et malsaine, identique à celle que pratique notre amie emplumée de la famille des Struthionidae.
Mais voilà «La Mola vous êtes un rêveur», m’avait dit un haut fonctionnaire de la police Marseillaise bien trop obnubilé par ses résultats et ses primes de fin d’année. «Nous n’avons plus le temps de lutter contre ces phénomènes, il faut vivre avec …», rajouta-t-il en approuvant ma démission vécue comme un soulagement par une grande partie des policiers élimant de leurs fessiers charnus leur fauteuil de moleskine. Rêveur, je le suis en effet puisque aujourd’hui lorsque l’on pense différemment de la majorité des autres, lorsque nos idées viennent bousculer les certitudes et les couleuvres que l’on fait avaler au peuple on est qualifié ainsi et mis au ban d’une certaine caste aux accointances politiques assumées voire même revendiquées.
Alors braves gens des quartiers Nord, il faut faire un effort, encore un, eh oui ! Pour vous, cela ne doit pas être bien difficile puisque l’on ne vous demande jamais rien, puisque l’on vous a même oubliés et parqués dans des quartiers sordides. Allez bon sang faites un effort pour vivre avec cela, pour cohabiter avec des armes automatiques en quasi libre-service ! Après tout est-ce trop vous demander que de donner parfois l’un des vôtres, d’offrir un jeune homme de 16 ou 17 ans en guise de sacrifice sur l’autel du je-m’en-foutisme d’État ?
Visiblement entre votre mauvaise volonté et l’incompétence de l’État, il va falloir patienter encore un peu avant de laisser vos minots jouer librement aux pieds des bâtiments, de les laisser déambuler sur leur bicyclette. Va falloir attendre encore un peu avant que l’on s’occupe de vous et de vos conditions de vie !
Dans six mois ce sera Noël …
Pensez à commander au vieux barbu des gilets pare-balle pour vos enfants !
Dormez braves gens, l’État se moque de vous !
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