Publié le 10 février 2021 à 18h29 - Dernière mise à jour le 31 octobre 2022 à 14h55
La réponse de la Mairie aux recommandations formulées par la Chambre régionale des comptes sous la précédente mandature a entraîné quelques échanges vifs entre l’actuelle majorité et la précédente qui entend faire du passé table rase.
Le 25 novembre 2019 était présenté au conseil municipal le rapport de la Chambre régionale des comptes, un document extrêmement critique envers la gestion de la majorité Gaudin qui avait généré des passe-d’armes dans l’hémicycle. Le document est aujourd’hui repris par la nouvelle majorité, Joël Canicave, Olivia Fortin, Pierre-Marie Ganozzi et Eric Méry rappellent les recommandations de la Chambre et les réponses apportées par la nouvelle majorité. Les voix de l’opposition s’élèvent notamment celle d’Yves Moraine (LR) qui se fera l’avocat de la défense de l’ex-majorité tandis que Lionel Royer-Perreaut (LR) profitera, une nouvelle fois de la situation pour affirmer sa différence, se positionner pour prendre le leadership à Droite. Deux interventions qui entraîneront une nouvelle salve de la part de la majorité.
«comptes partiellement insincères»
C’est Joël Canicave, adjoint aux finances qui ouvrira le débat en parlant d’une précédente majorité qui s’est comporté, non seulement comme «un mauvais élève» mais qui plus est «récidiviste puisqu’il avait déjà eu une mauvaise note en 2013», se référant au précédent rapport de la Chambre. Il en vient aux 9 recommandations «strictement financières» sur les 28 formulées par la Chambre. Il rappelle: «La Chambre parlait « d’absence de stratégie claire » de « défauts de coordination » de « comptes partiellement insincères » de « recommandations non suivies »». Il ajoute encore que la Chambre mettait en exergue la dette «qui atteignait 2023 euros par habitant à Marseille étant ainsi deux fois supérieure à la moyenne des villes comparables et les frais financiers en résultant étaient plus élevés que ceux cumulés de Lille, Lyon, Nantes, Nice, Montpellier et Toulouse». Joël Canicave annonce: «Notre réponse à la Chambre se fera dans le cadre de la stricte orthodoxie financière».
«un retard considérable»
Olivia Fortin, chargée de la modernisation, du fonctionnement, de la transparence et de la qualité des services municipaux revient sur les ressources humaines: «Marseille a un retard considérable et il porte sur des questions fondamentales telles que l’absence de tableaux des emplois ou le non-respect des règles de recrutement des agents contractuels. Des sujets centraux ont été délibérément ignorés les recommandations formulées par la Chambre n’ayant pas connues les suites qui s’imposaient… ». Elle annonce à son tour: «Nous souhaitons tourner cette page, et donner suite aux recommandations de la Chambre en les inscrivant dans un projet plus ambitieux».
«remettre le Titanic à flot»
Pierre-Marie Ganozzi, en charge du plan école et bâti scolaire aborde l’absence de stratégie, le Partenariat public-privé (PPP) des écoles inadapté et un budget insuffisant. Pourtant, insiste-t-il en s’adressant à l’ancienne majorité: «Vous avez vous-même commandé un audit de 2,2 millions d’euros remis en décembre 2019. Seulement 20% des problèmes soulevés ont été traités lorsque nous sommes arrivés aux affaires». Le budget était de 20 millions par an « lorsque les audits indiquaient la somme de 250 millions d’euros pour remettre le Titanic à flot.» Une situation à laquelle la nouvelle majorité s’attaque «avec le Plan École Avenir qui est en train d’être finalisé». Pierre-Marie Ganozzi précise à ce propos: «L’argent ne suffit pas, il faut également un vrai pilotage que nous mettons en place (…) pour conduire une politique construite autours de trois axes: priorité pour la sécurité des enfants, rattrapage du retard, ambition pour les écoles et les enfants de Marseille».
«Présentez vos excuses aux Marseillaises et aux Marseillais»
Eric Méry , conseiller municipal délégué à la stratégie patrimoniale, la valorisation et la protection du patrimoine municipal et des édifices cultuels met à son tour en avant des points soulevés par la Chambre: «L’absence d’inventaire précis du patrimoine», «l’absence de schéma directeur immobilier» sans oublier que «les ventes consenties à des prix dramatiquement bas sans mise en concurrence sont majoritaires». Eric Méry ajoute: «Le bilan réalisé par la Chambre ne relève pas la totalité du désastre. On peut y ajouter des cadeaux en nature avec des mises à disposition de locaux à des associations pour un montant de 10 millions d’euros lesquels s’ajoutent aux subventions, 40 millions. Des biens sont abandonnés jusqu’à devenir dangereux». S’adressant à l’ancienne majorité, il lance: «Les seuls responsables de ce marasme c’est vous. Et cela ne relève pas seulement de l’incompétence mais aussi d’une politique assumée. Vous avez sciemment bradé, abandonné, souillé notre patrimoine. Présentez vos excuses aux Marseillaises et aux Marseillais».
«Nous n’avons jamais été aidés par l’État, la Région et le Département»
«Après les procureurs il fallait bien donner la parole à la défense», attaque Yves Moraine depuis le banc de l’opposition qui tient à préciser: «La campagne électorale est finie. Jean-Claude Gaudin n’est plus le Maire de Marseille et vous n’êtes plus, monsieur le Maire le chef de l’opposition socialo-communiste, vous êtes le chef de cette majorité composite. Vous devez décider, avancer. C’est ce qu’attendent les Marseillais. Votre posture du naïf découvrant la réalité ne peut pas tenir. Pendant six ans vous avez vilipendé notre politique sur les écoles que vous feignez de découvrir. En fait, l’audit que vous avez réalisé c’est une dépense inutile de 70 000 euros». Il poursuit en s’appuyant sur l’ex-député PS Philippe Sanmarco pour dire que «Marseille a une dette structurelle importante créée par la municipalité Deferre»; évoque la baisse des dotations de l’État et de fait juge que dans contexte que la municipalité Gaudin ne s’en est pas si mal sortie d’autant que «Nous n’avons jamais été aidé par l’État, la Région et le Département. Il a fallu l’élection de Martine Vassal dans cette dernière institution pour que les choses changent». Avant de juger que derrière ce dossier se cache «une hausse des impôts qui risque de casser la dynamique économique de notre ville qui sort d’une année terrible».
«Cette majorité est un parc éolien»
Lionel Royer-Perreaut s’adresse à son tour à la majorité:«vous avez cédé à la tentation de l’exploitation politicienne de ce document». Et soudain de transition énergétique il est question puisqu’il considère: «Cette majorité est un parc éolien tellement elle brade de l’air». Cela risque fort d’électriser les débats. Bref, le maire des 9/10 enchaîne: «Notre rôle n’est pas de s’envoyer de grandes leçons de morale. Et n’en doutez pas vous commencez à avoir un passé et bientôt un passif. La gestion appelle de l’humilité et là où nous avons des convictions vous avez des certitudes». Puis d’affirmer: «Vous ne voulez pas travailler avec nous, les Marseillais en seront les premières victimes». Une intervention qui fera réagir Yannick Ohanessian adjoint
en charge de la Tranquillité publique, de la Prévention, du Bataillon de Marins-Pompiers et de la Sécurité: «Comment osez-vous donner des leçons ? Vous êtes les artisans de la banqueroute municipale, les champions de la dette. Vous auriez dû vous excusez».
«C’est un déni de démocratie»
Jean-Marc Coppola, l’adjoint à la culture s’adresse à Yves Moraine: «Le pire dans votre propos c’est votre aveux d’impuissance. Vous considérez que personne ne pourra changer les choses. Mais si vous ne croyez pas à l’art de la politique, à l’art de trouver des solutions, allez faire le tribun dans d’autre hémicycles». Patrick Amico, adjoint en charge de la politique du logement constate: «Ne pas avoir trouvé de plan stratégique du patrimoine» puis de signaler que, pour lui, la question du logement indigne passait avant les 50 millions de la patinoire…
Sébastien Barles, adjoint, en charge de la transition écologique, met en exergue les «inactions coupables en matière de sobriété énergétique» et les manques à gagner que cela représente. Tandis que Mathilde Chaboche, adjointe en charge de l’urbanisme ne cache pas sa colère: «L’opposition donne un spectacle désolant, accusant la majorité de ne pas travailler avec les institutions restées aux mains d’une droite qui refuse de prendre en compte le résultat du vote des Marseillais.es alors que c’est elle qui s’y refuse. Elle vient d’inscrire une question en Conseil de territoire en signifiant que c’était « à la demande de la ville de Marseille » alors que tel n’était pas le cas. C’est un déni de démocratie».
Michel CAIRE