Publié le 18 juin 2013 à 4h00 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2022 à 15h38
Affichant un excédent budgétaire global de près de 20 M€, le compte administratif 2012, le dernier de la mandature, a été approuvé ce lundi malgré les abstentions des groupes « Faire gagner Marseille » et « Communiste, Républicain et Citoyen ». Une délibération qui a été marquée par une annonce retentissante de Roland Blum (UMP) sur le dossier de la SNCM.
L’approbation du compte administratif 2012 était l’un des morceaux de choix inscrits au menu de la séance du conseil municipal de Marseille de ce lundi 17 juin. Une délibération placée sous la présidence de Roland Blum (UMP), 1er adjoint au maire : ne pouvant pas prendre part au vote au regard de la loi, Jean-Claude Gaudin avait en effet, comme le veut la tradition dans l’hémicycle phocéen, fait le choix de quitter la salle avant le début des débats. D’emblée Jean-Louis Tourret, adjoint au maire délégué aux Finances, ne manque pas de replacer cette délibération dans son contexte. « Après les orientations budgétaires qui définissent les grandes lignes et le comment, le vote du budget qui est le détail des prévisions, le compte administratif décrit ce qui a été fait », rappelle-t-il. Et de se féliciter de « la cohérence totale » entre les deux dernières étapes. « Les prévisions sont respectées, il n’y a pas de fausse note », assure Jean-Louis Tourret. L’adjoint aux Finances cite notamment les dépenses de fonctionnement réalisées « à un million près » (1,09 Md€) puisqu’elles ont été exécutées à 100,3% par rapport à la prévision de l’exercice.
Il relève aussi l’augmentation contenue des frais permanents (+1,38%) « alors que nous avons recruté 100 policiers municipaux », ou encore la baisse des frais financiers. « La maison Gaudin est bien tenue, martèle Jean-Louis Tourret. Cela marque une volonté de transparence, et démontre la technicité et la compétence des services financiers. C’est une gestion sincère et sérieuse. » Il se félicite également de l’excédent global de 19,909 M€ affiché par ce compte administratif (avant restes à réaliser) et du maintien d’un haut niveau d’investissement, « 214,5 M€ sans compter les budgets annexes ». « C’est la raison du développement de Marseille, ce qui explique qu’elle résiste mieux à la crise que d’autres : la fiabilité de la prévision, le sérieux de notre gestion, le choix de préparer l’avenir », conclut l’adjoint aux Finances.
« Une augmentation de 36,5% en euros constants pour la taxe foncière et de plus de 44% pour la taxe d’habitation »
Nathalie Pigamo (PS), vice-présidente du groupe « Faire gagner Marseille », saisit l’occasion de la présentation de ce dernier compte administratif de la mandature pour dresser un bilan de l’action de la municipalité. « Durant votre mandat, vous avez suivi le principe de Orwell : « répétez mille fois un mensonge suffit souvent à le rendre vrai » ! », lance-t-elle à Jean-Claude Gaudin, en pointant le chômage annoncé à 12,5% « alors que le pôle emploi donne un chiffre de 13,2% pour Marseille-Aubagne et que pour l’Insee on est à 17,5% », et la dette qui n’aurait pas augmenté depuis 1989 « alors que les chiffres sont pourtant de 1,3 Md€ en 1989 et 1,8 Md€ en 2012, soit une hausse de 500 M€ ». « Vous oubliez aussi de comptabiliser la dette que la Ville a transférée à MPM en finançant son tramway ou son incinérateur, soit la modique somme de 1 Md€. Au total les contribuables marseillais devaient 1,3 milliard aux banques en 1995 ; ils doivent aujourd’hui plus du double et avec le PPP (NDLR : partenariat public-privé) du stade, ils en devront encore 130 millions de plus dès 2014. A part ça, tout va bien, la dette n’a pas augmenté », ironise Nathalie Pigamo.
La vice-présidente du groupe « Faire gagner Marseille » remet également en cause la politique fiscale du maire de Marseille. « Les impôts n’auraient augmenté que de 2% par an, dites-vous. Mais ceci correspond à une augmentation de 36,5% en euros constants pour la taxe foncière et de plus de 44% pour la taxe d’habitation avec la diminution de l’abattement appliqué à tous les contribuables, même les plus modestes. Pensez-vous que les revenus des Marseillais ont augmenté dans les mêmes proportions sur la même période ? Pensez-vous encore que les services publics (je pense aux piscines, aux espaces verts, aux écoles…) se soient autant développés pour justifier une telle hausse ? », interroge-t-elle à haute voix.
« Les chiffres démentent clairement vos affirmations »
A ses yeux, l’examen approfondi du compte administratif 2012 révèle « d’autres aspects intéressants de votre gestion ». « Vous parlez d’économies des dépenses de personnel. Or, elles constituent 58% des dépenses de fonctionnement, ce qui est un record. A Toulouse comme à Lyon ce chiffre est de 54%, il est de 50% à Bordeaux. J’espère qu’à Marseille, ces chiffres incluent les indemnités des 3 800 voire 6 000 vacataires dont parle la Chambre régionale des comptes et qui mettent un peu à mal vos déclarations sur la parfaite maîtrise de ces dépenses », assène Nathalie Pigamo. Sans oublier de pointer les frais financiers qui « grèvent 6% de notre fonctionnement », alors qu’« à Lyon, à Montpellier comme à Bordeaux, c’est moins de 3% », quand dans le même temps « nos dépenses d’investissement se montent à 271 € par habitant » tandis qu’« à Toulouse elles s’élèvent à 333 € et à Bordeaux à 329 € ». « Je précise pour M. Tourret que tous ces chiffres viennent de la Direction des Collectivités Locales et non du groupe « Faire gagner Marseille » », insiste l’élue socialiste.
Et d’en terminer « par quelques comparaisons chronologiques révélatrices », selon elle, « des véritables priorités de l’action municipale ». « 75 M€ étaient consacrés au domaine sport/jeunesse en 2008, 70 M€ en 2012, soit une baisse d’environ 20% en 5 ans. L’action éducative mobilisait 186 M€ en 2008 et à peine 148 M€ en 2012, soit une baisse de plus de 25% ! Pourtant, la soi-disant priorité donnée aux écoles fait aussi partie de vos refrains favoris. Les chiffres démentent clairement vos affirmations, M. le Maire. La Ville a consacré 31 M€ aux travaux des écoles en 2008 et 9,7 M€ en 2012 », énumère Nathalie Pigamo. Sans compter que « la sécurité et la salubrité publique mobilisaient 121 M€ en 2008 et 133 M€ en 2012, soit une quasi-stagnation des crédits sur 5 ans en euros constants ce qui n’a rien d’étonnant vu votre peu d’empressement, jusqu’en 2012, à augmenter les effectifs de la police municipale ».
« Un plan de licenciement de 800 personnes » pourrait être annoncé à la SNCM selon Roland Blum
Quant à l’action culturelle, si les crédits sont en hausse, Nathalie Pigamo juge que « « l’après MP2013 » risque d’apporter beaucoup de déconvenues dans ce secteur vu la rigueur financière qui nous attend ». Et d’en conclure : « Vous m’en voyez désolée mais la maison Gaudin n’est pas bien tenue ! », tranche l’élue socialiste en indiquant que son groupe s’abstiendra sur ce rapport.
Frédéric Dutoit (PCF), président du groupe Communiste, Républicain & Citoyen, sera beaucoup plus succinct. « J’attire l’attention sur le fait que les dépenses qui augmentent régulièrement alors que les recettes beaucoup plus difficilement. Cela concerne l’investissement de la puissance publique et, avec la métropole, cela risque de s’accentuer encore. C’est un budget de rigueur et des choix politiques que nous ne partageons pas, contraires à ce que nous voulons pour les Marseillais, mais bien appliqués budgétairement. Dont acte sur les bons comptes », résume-t-il en indiquant que son groupe s’abstiendra sur cette délibération.
Le mot de la fin reviendra à Roland Blum, président éphémère de la séance. « Nous avons une réalisation à 100% des recettes de fonctionnement, une excellente maîtrise des dépenses, une bonne gestion de la dette, et un haut niveau d’investissement.t si on fait le bilan ne serait-ce que sur 15 ans, vous constaterez que la ville de Marseille a investi plusieurs milliards dans notre économie de manière à la soutenir et à créer des emplois », se félicite le 1er adjoint. En matière d’emploi, il assure que « les statistiques que nous utilisons sont celles de l’Insee, donc je ne vois pas comment nous pouvons travestir ces chiffres ». Roland Blum réaffirme aussi que « la dette n’a pas augmenté, elle est toujours la même qu’en 1995 en euros constants ».
Avant de pointer le dossier SNCM en réponse à Nathalie Pigamo. « Nous avons demandé à être reçus par le Premier ministre et nous attendons toujours la date de cette réunion. Et, peut-être vous l’ignorez, mais cette semaine, le plan qui va être présenté au conseil de surveillance prévoit déjà le licenciement de 800 personnes, lâche Roland Blum. Donc je pense que ça devrait interpeller les socialistes, visiblement ça les laisse froid, l’Etat étant quand même, je le rappelle, actionnaire à 66% de cette entreprise. » (NDLR : En réalité, 25% en direct, et 58% si on intègre la part de Caisse des dépôts et consignation (CDC), émanation de l’Etat, qui détient la moitié de Transdev, actionnaire à hauteur de 66% de la SNCM).
Et de conclure sur les critiques visant les hausses d’impôts à Marseille. « Là, c’est quand même le comble ! Le gouvernement que vous soutenez bat les records d’augmentation de la Ve République. On n’a jamais vu ça. Toutes les couches de la société sont atteintes, et en plus ces augmentations d’impôts touchent maintenant les entreprises. Les critiques que vous nous faîtes, vous devriez peut-être les faire aussi à vos amis ça serait mieux pour Marseille et même pour toute l’économie française », réplique le premier adjoint au maire.
Serge PAYRAU