Conseil municipal : la campagne électorale démarre sur les chapeaux de roues à gauche comme à droite

Publié le 18 juin 2013 à  1h00 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  15h38

Comme lors de la précédente séance du conseil municipal de Marseille le 25 mars dernier, la campagne des élections municipales 2014 s’est invitée ce lundi matin dans l’hémicycle du pavillon M. A gauche comme à droite, plusieurs solistes ont tenté de faire entendre leur partition.

La campagne électorale des municipales 2014 s'est, comme en mars dernier, invitée ce lundi 17 juin dans l'hémicycle du pavillon M où se tenait une séance marathon du conseil municipal de Marseille qui aura duré 5 heures et demie. (Photo S.P.)
La campagne électorale des municipales 2014 s’est, comme en mars dernier, invitée ce lundi 17 juin dans l’hémicycle du pavillon M où se tenait une séance marathon du conseil municipal de Marseille qui aura duré 5 heures et demie. (Photo S.P.)

C’est une nouvelle fois un conseil municipal de Marseille marathon qui était programmé ce lundi 17 juin dans l’hémicycle du pavillon M, avec pas moins de 360 délibérations au menu, parmi lesquelles l’approbation du compte administratif, la révision du Plan de local de l’urbanisme (PLU), des délibérations concernant les piscines de la ville, l’étude de faisabilité du téléphérique par câble entre le Vieux-Port et Notre-Dame de la Garde ou encore les projets de Casino et d’Arena. Or, bien qu’appelée à durer – cinq heures et demie au final -, c’est au sprint que la séance a débuté ce lundi sous les coups de 8h30 sur fond de campagne électorale qui bat plus que jamais son plein, et cela aussi bien au PS qu’à l’UMP.
Dès le premier rapport pourtant a priori anodin (versement de la cotisation annuelle à l’association nationale des Villes et Pays d’Art et d’Histoire et des Villes à Secteurs Sauvegardés et Protégés), c’est Christophe Masse (PS), président du groupe « Faire gagner Marseille », qui tirait le premier. « C’est le lancement de votre campagne électorale pour les élections municipales. Ce n’est pas un conseil municipal auquel nous sommes conviés, mais un meeting de campagne », lançait-il d’emblée à l’adresse du sénateur-maire de Marseille Jean-Claude Gaudin (UMP). Et le président de groupe de pointer des « rapports gadgets », à commencer, selon lui, par le rapport numéro 2 portant sur l’étude de la faisabilité du téléphérique par câble en centre-ville, sans oublier « d’autres perles » présentes parmi les 364 rapports à l’ordre du jour. « A l’heure où il y a des problèmes de mal-logement, d’emploi, on va parler téléphérique, casino, Arena. Vous avez sorti des projets qui auraient dû nous faire rire si l’heure n’était pas aussi grave », lâche-t-il toujours en direction du maire.
Christophe Masse, qui nourrirait des ambitions pour les primaires socialistes, poursuit en évoquant la récente visite dans la cité phocéenne de François Hollande. « Le président de la République n’est pas seulement venu à Marseille pour inaugurer le Mucem, mais pour évoquer l’ambition pour notre ville en termes d’emplois, avec notamment les contrats de génération. Cela doit nous amener à être inventifs », plaide-t-il, d’autant qu’à ses yeux, tant en matière de développement économique que de sécurité, « l’Etat est redevenu un partenaire ». « L’Etat a tenu ses engagements avec la création de deux zones de sécurité plus efficaces que les interventions RoboCop », assène-t-il. Estimant que « l’union fait la force », Christophe Masse souligne aussi que « François Hollande a réaffirmé le projet de métropole ». « Voilà ce que nous aurions aimé aborder. A cela vous privilégiez téléphérique, casino, Arena : ce ne sont pas des réponses à la hauteur de nos attentes. Il vous fallait meubler et promettre ce que vous n’avez pas fait en 18 ans », conclut le président du groupe socialiste.

« Les seuls en campagne électorale, ce sont les socialistes »

La réponse viendra d’Yves Moraine (UMP), président du groupe de la majorité municipale. « Les seuls en campagne électorale, ce sont les socialistes lancés dans des primaires où l’intérêt de Marseille n’est jamais présent, où on assiste à un combat des égos, et où s’affiche la haine des uns pour les autres », réplique-t-il d’entrée, qualifiant l’intervention de Christophe Masse de « déclaration de candidature aux primaires, violant ainsi la promesse que vous avez faite à l’ancien président du groupe socialiste », à savoir Patrick Mennucci.
Yves Moraine n’est pas en reste avec l’Etat. « Le gouvernement aide Marseille ? 30 M€ pour le Grand Paris, rien pour la métropole de Marseille. Cette métropole que vous avez refusée sous Sarkozy », assène-t-il en direction des rangs socialistes avant de se tourner vers Jean-Claude Gaudin : « Métropole que vous avez sauvée en tant que maire de Marseille et président du groupe UMP au Sénat ».
Citant la Transhumance ou le Château Borély, le président du groupe de la majorité municipale estime que « la réalité est là » : « Marseille se transforme, les Marseillais le disent, et si vous ne l’entendez pas c’est que vous ne les écoutez pas ». Avant de passer une deuxième lame à l’attention du gouvernement. « Quant aux emplois d’avenir, ce ne sont pas des emplois subventionnés qui permettront de combattre la chômage. Il faut relancer la croissance économique », martèle Yves Moraine.
Il en vient ensuite aux trois délibérations pointées par Christophe Masse. « Une ville doit sans cesse aller de l’avant sinon elle recule. C’est ce qui s’est passé entre 1975 et 1995. Comme ce sont de bonnes idées que vous n’avez pas eues, alors vous n’êtes pas vraiment pour, pas vraiment contre. Et vous qualifiez de gadgets des investissements de plusieurs centaines de millions d’euros », ironise-t-il. Et de rappeler que « l’opposition avait déjà parlé de gadget au sujet de la Capitale européenne de la Culture » et qu’elle avait voté « contre les Terrasses du Port et l’Hôtel Intercontinental ». « Comme si on gagnait les élections avec un téléphérique. Ces projets, on les inscrit dans une réalité administrative car nos chantiers touchent à leur fin », plaide Yves Moraine, avant de conclure : « Pour « Faire gagner Marseille », élevons-nous un peu et sortons de cette vision « Primaire ». »

Guy Teissier sort du bois…

Mais les candidats, déclarés ou potentiels, à la primaire citoyenne organisée par le PS n’étaient pas les seuls en campagne ce lundi matin. Et cette dernière se poursuivait dans les rangs de la majorité municipale avec la sortie du bois de Guy Teissier (UMP). « Je voudrais profiter de ce rapport consacré à une étude de faisabilité d’un transport par câble en centre-ville pour m’exprimer, tant ce rapport est symbolique d’une signature politique et le reflet d’une volonté. S’agissant d’un conseil riche en rapports structurants (PLU-Arena-Casino), je me bornerai à une seule prise de parole », précise d’entrée le député-maire des 9e et 10e arrondissements de Marseille. Mais quelle intervention ! Car en prenant pour cible le président de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole (MPM), Eugène Caselli (PS), comme il en a pris l’habitude depuis quelques séances, celui à qui on prête des ambitions municipales ne va pas manquer d’égratigner, par ricochet, le bilan des trois mandatures de Jean-Claude Gaudin.
Guy Teissier commence toutefois par louer ce rapport qui « consacre la volonté d’inscrire Marseille dans la modernité, de dynamiser notre politique touristique, de valoriser notre potentiel d’attractivité, d’améliorer l’offre de transport dans un quartier très difficile d’accès ». « Finalement, que ce soit ce rapport, celui sur l’Arena, celui sur le casino, ceux multiples sur les équipements sportifs de proximité ou celui sur le PLU, cela met en évidence la cohérence que nous portons pour le devenir de Marseille. Non seulement, nous nous donnons les moyens de réhabiliter Marseille dans le cœur des Marseillais, mais en agissant ainsi nous reconstruisons une image injustement détériorée par une certaine presse avide de sensationnel. Bref, je me retrouve dans ces options stratégiques », exprime-t-il.

… le temps des bémols mais des convergences de vue avec Jean-Claude Gaudin…

Puis vient le temps des bémols. « Certes, je pourrais m’étonner de voir un rapport sur un nouveau mode de transport être soumis à notre approbation alors qu’il n’est pas compris dans le Plan de Déplacement Urbain que nous avons voté récemment. Certes, je pourrais m’étonner que nous votions un rapport qui manifestement relève plus de la compétence de la communauté urbaine d’aujourd’hui, demain future métropole. Certes, je pourrais m’interroger sur la pertinence d’engager 320 000 € d’études sur une Arena qui a déjà fait l’objet d’une étude de faisabilité par Euroméditerranée, et qui a vocation à devenir, par essence, un équipement métropolitain… Je ne le ferai pas car je sais trop bien l’interprétation politique que certains dans cet hémicycle ne manqueraient pas de faire à quelques mois des élections », explique le député-maire du 5e secteur, non sans avoir déjà fait entendre sa différence.
Et de justifier également cette attitude en égrenant ses convergences de vue actuelles avec le sénateur-maire de Marseille. « Je ne le ferai pas non plus car je note avec satisfaction que tous ces projets qui émergent rejoignent les propositions que j’ai faites en faveur du « dynamisme urbain » que je souhaite pour notre ville et dont les uns et les autres vous avez été les destinataires. Je ne le ferai pas car je constate que mes propositions en faveur de la sécurité commencent à être reprises. Je note avec satisfaction, monsieur le maire, que vous faites vôtre mes suggestions pour qu’il y ait plus de policiers municipaux et que ceux-ci soient armés. Je note avec tout autant de satisfaction que mes appels à une présence de caméras de vidéo protection en faveur des quartiers périphériques aient été entendus, puisque d’ici la fin de l’année les premières caméras vont arriver dans nos noyaux villageois. Je note avec satisfaction également que vous avez décidé d’abandonner, à ma demande, l’idée de créer des salles de shoot ou encore que vous avez souhaité relayer mon appel désespéré sur la situation inacceptable du camp de rom de la Capelette, conséquence de l’inertie coupable de l’Etat socialiste. Je ne le ferai pas également car votre proposition d’Arena n’est ni plus ni moins que la réponse à un besoin identifié depuis bien longtemps par Euroméditerranée, et que j’appelle de mes vœux, tant cet équipement est nécessaire à l’offre événementiel », souligne Guy Teissier.

… puis celui des critiques visant Eugène Caselli, et par ricochet la gestion municipale

Mais les bons points s’arrêtent là. Car « si tous ces grands projets finissent par former un tableau cohérent, il n’en demeure pas moins qu’ils seront appréciés à leur juste valeur par nos administrés que si nous nous donnons les moyens de répondre à ce qui fait le quotidien des Marseillais », observe le député-maire du 5e secteur. « Or, à ce niveau-là, le compte n’y est pas », tranche-t-il, avant d’ajouter à l’attention de Jean-Claude Gaudin : « Et cela n’est pas forcément de votre fait ».
Guy Teissier se livre alors à un réquisitoire contre le président de la communauté urbaine. « Marseille est toujours aussi sale. Il faut avoir la chance d’une visite d’Eugène Caselli dans un quartier pour espérer voir les balayeuses et les cantonniers à l’œuvre. On multiplie les réformes, on change les cadences de travail des agents, on perturbe les habitudes de nos administrés, on oublie de les informer de ces changements, mais la situation reste la même. Les 9e et 10e arrondissements n’ont jamais été aussi mal entretenus que depuis le début de l’année au point que je me demande si je ne vais pas finir par porter l’affaire devant les tribunaux », dénonce-t-il.
Le député-maire du 5e secteur estime aussi que « Marseille est toujours aussi embouteillée ». « Car au lieu de faire des choix prioritaires, la communauté urbaine préfère dépenser des millions d’euros à développer des moyens de transports qui se juxtaposent à ceux existants », accuse-t-il. Une critique qui ne manque d’égratigner par ricochet la gestion municipale puisque, sur ce rapport sur la faisabilité du téléphérique, origine de son intervention, les priorités de la communauté urbaine sont… partagées par la Ville.
Et Guy Teissier de monter une nouvelle fois au créneau sur le Boulevard Urbain Sud (BUS). « Repousser le projet à 2020 au moment où l’Etat relance le projet de L2 est une faute politique grave d’autant plus condamnable qu’elle est la conséquence d’autres choix très discutables. C’est d’autant plus irresponsable que l’Etat annonce une livraison de la L2 pour 2017avec pour voie de conséquence l’arrivée de milliers de voitures qui viendront s’agglutiner sur le pont Florian », assène-t-il.

« La séance du conseil municipal est polluée par les futures élections »

Enfin, le député-maire du 5e secteur juge que « Marseille manque d’une véritable politique de l’emploi », domaine dans lequel Jean-Claude Gaudin met pourtant en avant son bilan positif depuis de longues années. Certes Guy Teissier date ses réserves de l’arrivée d’Eugène Caselli aux manettes de MPM. Mais le bilan du sénateur-maire de Marseille n’en sort pas pour autant indemne quand Guy Teissier relève, en s’appuyant sur des chiffres de l’Agence d’urbanisme de l’agglomération marseillaise (Agam), que « depuis 2008 près de 20 000 Marseillais sont venus s’inscrire à Pôle Emploi, soit une augmentation de 32% de la demande d’emploi à Marseille ».Une évolution en partie dû selon lui « au morcellement des compétences avec les différentes collectivités ». Et de s’avouer « frappé de constater qu’en ce domaine il n’y a pas de véritables lignes directrices qui se sont dessinées pour corriger une tendance très structurelle » : une critique qui là encore pourrait tout autant viser Eugène Caselli aux commandes de MPM… que Jean-Claude Gaudin, aux commandes de la Ville.
Eugène Caselli, tout en se déclarant désireux de ne « pas rentrer dans le défilé de mode des candidats aux municipales, je laisse ça à M. Teissier », ne manquera pas de rétorquer que « la date de 2020 est de sa seule responsabilité ». Et de déplorer au sujet du député-maire du 5e secteur : « Il vient chercher chaque fois la communauté urbaine toujours en aval, toujours à contretemps ».
Ce qui n’empêchera pas la députée Valérie Boyer (UMP) de rallumer la mèche. « Le BUS pourrait intervenir en 2020, martèle-t-elle. Le seul projet ANRU (Agence nationale de rénovation urbaine) des quartiers Sud prévoit le BUS. C’est une faute politique majeure de reporter ces travaux. A quoi ça nous a servi d’avoir des millions du plan de relance pour la L2, que nous sommes allés chercher avec Roland Blum auprès de Patrick Devedjian ? C’est d’autant plus n’importe quoi que les propos qui sont tenus ici sont différents de ceux tenus ailleurs. »
Des passes d’armes auxquelles n’a que peu goûté Frédéric Dutoit, président du groupe Communiste, Républicain & Citoyen. « Je constate la spontanéité des interventions concertées de mes collègues. La séance du conseil municipal est polluée par les futures élections. C’est dommageable pour l’image de notre ville », regrette-t-il, tout en observant que « les uns et les autres ont été ou sont en poste à responsabilité au plan national et local ». Ce qui le conduit à asséner : « Nous devrions tous balayer devant notre porte ».
Même désapprobation chez Karim Zéribi (EELV). « Ce piètre spectacle me donne envie de m’en aller », dénonce-t-il. Ce qui amènera Jean-Claude Gaudin à tempérer les ardeurs des uns et des autres : « Calmons-nous ».

Serge PAYRAU

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