Publié le 9 mai 2020 à 10h06 - Dernière mise à jour le 31 octobre 2022 à 11h35
Nous avons décidé de poser les mêmes questions à plusieurs acteurs de la société civile de Provence-Alpes-Côte d’Azur pour savoir comment ils vivent le confinement, et surtout ce qu’ils entendent proposer concrètement comme mesures à prendre au plus vite pour combattre les autres crises qui vont apparaître -après l’actuelle sur le plan sanitaire -à savoir économique, sociale… Régis Guerbois, le président fondateur du Festival Marseille Jazz des Cinq Continents, a accepté de se prêter à l’exercice. Pour rappel, la démarche de cette rubrique, lancée par Daniel Boccardi, est que les lecteurs puissent comparer les différentes visions.
Destimed, comment vivez-vous le confinement depuis les dernières semaines sur un plan personnel et familial ?
Régis Guerbois: Entre début mars et la mi-mars, l’emballement des annonces puis des mesures qui nous ont été imposées, le confinement m’a projeté rapidement dans un monde irréel, un monde où, tout en perdant nos repères, nous avons dû nous adapter rapidement à de nouvelles pratiques. Le télétravail s’est mis en place la 1ère semaine de confinement et au début le rythme journalier, accentué par les incertitudes quant à la tenue du Festival, est resté le même du lever au coucher. Puis petit à petit les mails se sont faits de plus en plus rares, les appels téléphoniques également et enfin la vague habituelle des informations et du traitement des engagements journaliers s’est éteinte. N’est restée alors que la coordination de l’équipe du festival en relation avec l’actualité changeante sources d’anxiété et de spirale infernale vers le néant. Sur le plan personnel la famille est les amis au travers les réseaux sociaux et la visioconférence ont été d’un grand réconfort pour évacuer cette solitude qui s’installait. Je n’ai toutefois pas changé de rythme pour mes journées entre les heures de lever et de coucher même si le contenu lui a beaucoup changé avec lecture, musique, balade d’une heure et maintien de la condition physique.
Quelles sont les 3 principales mesures que vous attendez du gouvernement dès la sortie de la crise sanitaire ?
Il faut absolument que le gouvernement prenne la mesure dans laquelle le monde du spectacle, et plus spécialement le monde du spectacle vivant, est en danger. Ce danger il existe pour les intermittents du spectacle qui se retrouvent sans ressources de vie et pour les structures qui n’ont pas vocation à générer des bénéfices. Elles sont de ce fait sans trésorerie et n’auront probablement pas la capacité de survivre. Nous avons en France un lien fort entre culture et économie. La culture fait partie des attraits de la France pour tous ceux qui la visitent et tout spécialement dans notre région ou le tourisme est source importante de retour financier vers nos entreprises. Si la culture devait souffrir de cette pandémie c’est à terme une grande partie de l’écosystème de notre région qui serait en danger. Il faut donc que l’État à l’instar des institutions Région, Département, Métropole et Ville, prenne la mesure de ce qui est en train de se passer et mette rapidement un plan de sauvegarde pour aider toutes les associations et structures qui font la richesse de nos territoires. Sauver les structures et associations culturelles c’est sauver la création artistique et sauver l’ensemble des intermittents du spectacle sans qui nous ne pourrions pas exister. S’il fallait ajouter un point ce serait de faire en sorte que l’Etat soit un peu moins Jacobin en aidant beaucoup plus les villes notamment au niveau de ses musées, théâtres et opéras, ce qui redonnerait aux villes plus de moyens pour leurs animations culturelles en général.
Comment voyez-vous le monde de demain : des grands changements seront-ils obligatoires, ou alors n’y croyez-vous pas ?
J’imagine que ces semaines de confinement seront utiles à la réflexion de chacun sur beaucoup de plans, vie personnelle, travail, déplacements, environnement, rapport à l’autre, etc. A court terme j’espère qu’une réflexion s’installera dans chaque lieu de vie qui fonde notre société pour revisiter nos façons d’être et de faire, socialement et économiquement. Ce sera un début mais ce ne sera pas dans un premier temps une révolution, du moins c’est ce que je pressens même si je la souhaite. Avec ce confinement nous nous sommes remémorés que nous faisions partie d’un tout et que chacun d’entre nous avait sa responsabilité à jouer au sein de la société non seulement pour soi mais également vis-à-vis des autres. C’est cette notion que je retiendrai et j’espère que beaucoup d’entre nous le feront.
Propos recueillis par Bruno ANGELICA