Publié le 10 juin 2021 à 13h20 - Dernière mise à jour le 31 octobre 2022 à 18h02
Autour du Premier Président et de la Procureure générale de la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence, une vingtaine de chefs de juridictions du ressort de la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence ont participé le 2 juin à un séminaire proposé par la Fondation du Camp des Milles-Mémoire et Éducation
Ce temps de réflexion et d’échange, co-construit par la Fondation et la Cour d’Appel, visait, en s’appuyant sur les valeurs de la République, à proposer des clés de compréhension sur des phénomènes de société auxquels les magistrats sont confrontés tous les jours, notamment les racismes, l’antisémitisme et les extrémismes qui peuvent menacer la démocratie.
Renaud Le Breton de Vannoise, Premier Président de la Cour d’Appel a déclaré qu’il avait été «impressionné de constater que ce lieu n’est pas seulement un lieu de mémoire, il est aussi un lieu de réflexion. Et une réflexion qui nous concerne, nous magistrats au premier chef, puisque notre métier repose sur une grande loyauté Républicaine et la garantie des droits et libertés. Notre rôle peut s’affiner ou évoluer en fonction du contexte et cette visite inoubliable permet de revenir sur des fondamentaux, en dépit de nos charges quotidiennes».
«Émotion, réflexion et action»
«Trois mots m’ont traversée durant cette journée : émotion, réflexion et action. Le lieu lui-même est porteur d’émotion. Il interroge aussi sur les mécanismes qui font que le pire pourrait se reproduire et comment entrer en résistance. Cette réflexion est utile pour nos actions, qui appellent à une grande vigilance intellectuelle en particulier quand nous sommes confrontés à des actes de qualification raciste», a souligné Marie-Suzanne Le Quéau, Procureure Générale. Et de conclure qu’il faut « faire vivre ce lieu de mémoire au nom de l’humanité».
Les hauts magistrats ont d’abord suivi le parcours historique, mémoriel et réflexif du Site-mémorial. Ils ont ainsi pu découvrir la force d’un patrimoine historique et mémoriel unique en France et rare en Europe. Ils ont ensuite participé à un module de réflexion présentant les engrenages pouvant menacer la République et mener au pire ainsi que les résistances possibles, sur la base de l’approche pluridisciplinaire et intergénocidaire développée par la Fondation du Camp des Milles.
«Les résistances à ces mécanismes mortifères sont toujours possibles»
Ce moment d’approfondissement a été l’occasion d’explicitations sur la combinaison des processus individuels, collectifs et institutionnels qui alimentent et accélèrent les mécanismes vers le pire. De même, ont été analysées des notions telles que stéréotypes, préjugés, discriminations, extrémismes identitaires, en soulignant également le potentiel explosif des racismes et de l’antisémitisme dans les engrenages sociétaux anti démocratiques.
L’histoire montre en effet que les résistances à ces mécanismes mortifères sont toujours possibles de la part de tous les acteurs de la société et en particulier des acteurs institutionnels. Dans un tel contexte, le rôle de la justice est particulièrement décisif pour sauvegarder l’état de droit, les libertés, la sécurité et la paix civile.
Ensuite, une présentation d’expériences psychosociales a permis de décrypter certains mécanismes humains impliqués dans ces processus, comme la soumission aveugle à l’autorité, le conformisme de groupe, la passivité, ou le conditionnement à la violence. La pédagogie participative de ce séminaire a permis l’implication de chacun et l’interaction entre tous.
Plusieurs pistes ont été enfin évoquées afin de poursuivre et développer le travail commun. «Le Site-mémorial du Camp des Milles est une maison citoyenne pour tous ceux qui souhaitent comprendre et résister aux engrenages qui peuvent conduire au pire», a déclaré Alain Chouraqui, Président de la Fondation du Camp des Milles.
La rédaction