Publié le 17 avril 2021 à 12h43 - Dernière mise à jour le 31 octobre 2022 à 15h52
En mars, à Revest-du-Bion, les agents du Centre régional de la propriété forestière (CNPF) Provence-Alpes-Côte d’Azur, venaient à bout d’une plantation d’un millier d’arbres-test. Occasion pour le Centre national de mettre en lumière le projet MedForFutur, dont le pôle expérimental le plus conséquent s’enracine ainsi en cette terre revestoise.
À la fin des années 1970, la FAO (organisation des Nations-Unies pour l’Agriculture et l’Alimentation) instituait la journée mondiale de la forêt, afin de promouvoir l’importance des différentes fonctions des écosystèmes forestiers. En quatre décennies l’accélération du dérèglement climatique et des périodes prolongées de stress hydrique, n’ont pas épargné les étendues méditerranéennes et alpines. Les deux principales essences de la région sont notamment en souffrance : le chêne pubescent et le pin sylvestre.
Soutenu par le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation dans le cadre de l’appel à projet « Innovation et investissements pour l’amont forestier », MedForFutur est le fruit d’un partenariat entre le CNPF Paca, l’Office national des forêts (ONF), l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) et les propriétaires forestiers. L’objectif étant de promouvoir l’adaptation et la résilience des forêts par la diversification de nouvelles essences. Parmi elles : le calocèdre dont les graines ont été importées de Californie, vers la pépinière ONF de Cadarache.
S’adapter au changement climatique
Pour faire face au changement climatique, les arbres ont deux options : migrer, en se disséminant par graines au-delà des bornes de leur territoire habituel vers des conditions environnementales plus clémentes, ou s’adapter à ce nouvel environnement.
«Cette adaptation se fait en avançant leur début de croissance au printemps, leur floraison et la maturité de leur fruit, en augmentant la profondeur de leurs racines et en réduisant leur hauteur, la taille de leurs feuilles et le diamètre des vaisseaux conducteurs de sève par exemple, indique Michel Vennetier, spécialiste des forêts à l’Inrae. Lorsqu’une espèce est incapable de migrer ou de s’adapter, c’est l’extinction locale, partielle ou totale. Le pin sylvestre notamment est en grande souffrance : 50 % des peuplements de cette espèce sont en dépérissement. Le chêne liège, le chêne blanc et le sapin sont également en forte régression en zone méditerranéenne. Le chêne vert et le pin d’Alep en revanche se portent bien. La mortalité chez les arbres est cependant un processus difficile à comprendre dans le fonctionnement des forêts car plusieurs causes se conjuguent en général : la chaleur, le froid, la soif, la faim, les agressions (insectes, champignons, maladies), et parfois une gestion inappropriée».
L’opération MedForFutur touche à sa fin après plus de trois ans de travaux pour l’adaptation des forêts aux changements climatiques. Forestiers et chercheurs ont proposé des solutions pour accompagner une gestion forestière appropriée à ces conditions évolutives, diversifier les ressources génétiques avec des plantations d’espèces plus adaptées au climat futur, sur l’arrière-pays méditerranéen et le début de la zone alpine.
Augmenter les connaissances
« Les plantations ‘en condition de gestion’ sont réalisées sur de petites surfaces, appelées ‘îlots d’avenir’, en plein ou sous couvert des peuplements existants, explique Camille Loudun, ingénieur Communication & Projets environnementaux au CNPF Paca. Quelques dispositifs de recherche sont également mis en place comme celui que nous installons à Revest-du- Bion. La démultiplication des tests permet d’augmenter les connaissances sur le comportement des espèces dans différents milieux. Tous les dispositifs seront suivis dans le temps pour voir comment s’adaptent les arbres plantés.»
Cette action de Recherche & Développement participe à l’éventail des solutions qui peuvent être apportées pour faire face aux changements climatiques. «Les douze espèces choisies ont déjà été testées dans la région et semblent avoir un certain potentiel pour résister aux évolutions climatiques. Parmi elles, des essences locales comme le chêne vert, que l’on remonte en altitude, ou des essences venant de zones plus sèches comme le chêne faginé du Portugal ou le calocèdre de Californie. Ce projet permet de rendre les gestionnaires et les propriétaires acteurs de l’adaptation des forêts en leur fournissant de l’information utilisable et en les impliquant dans une démarche expérimentale d’acquisition de connaissances. Il permet également d’impliquer des entreprises soucieuses de l’environnement et de l’avenir des forêts régionales » précise Camille Loudun.
Nadia Ventre
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10 000 plants installés
En forêt privée, une vingtaine de propriétaires se sont engagés sur les trois saisons de plantation du projet. Près de 10 000 plants ont été installés et protégés du gibier, issus de douze essences différentes que sont pour les feuillues : l’aulne de Corse, le chêne faginé, le chêne vert, le cormier, l’érable à feuille d’obier, le frêne à fleur et pour les résineuses : le calocèdre, le cèdre de l’Atlas, le douglas vert, le pin de Bosnie, le pin de Salzmann, le sapin de Céphalonie. )]
[(L’Espace Alpin est le journal agricole et rural des Alpes-de-Haute-Provence et des Hautes-Alpes. Ce journal bimensuel est disponible sur abonnement sur lespace-alpin )]