Publié le 26 avril 2013 à 4h00 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2022 à 16h06
L’enivrant défi historique du RCT
En Pro D2 il y a encore cinq ans, le RCT est à 80 minutes d’une finale historique de H-Cup, la plus prestigieuse des compétitions européennes, le 18 mai prochain à l’Aviva Stadium de Dublin. Mais pour y parvenir les « rouge et noir » devront battre les Saracens de Londres, le meilleur club anglais du moment, dans la mythique enceinte de Twickenham ce dimanche après-midi (16h). Un défi majuscule pour un groupe programmé pour la gagne depuis le début de la saison.
Alors que l’on entre dans le « money time » de la saison rugbystique, puisqu’il reste tout au plus cinq matches à disputer aux « rouge et noir », dont quatre à élimination directe, c’est un défi historique qui attend le RCT ce dimanche 28 avril dans le temple du rugby anglais de Twickenham sur les coups de 16h. Présent pour la première fois dans le dernier carré de la H-Cup, la plus prestigieuse des compétitions européennes, Toulon est à 80 minutes d’une finale historique le 18 mai prochain à l’Aviva Stadium de Dublin. Forcément, la perspective fait saliver sur les bords de la rade alors que le RCT ne participe cette année que pour la deuxième fois de son histoire à la grande Coupe d’Europe créée en 1995-96.
Mourad Boudjellal, qui a repris en 2006 les rênes du club varois alors en Pro D2, n’est pas homme à se retourner sur le passé. Mais à la veille de ce rendez-vous majuscule, il ne peut s’empêcher de mesurer le chemin parcouru depuis cette demi-finale de Pro D2 perdue en 2007 sur le terrain de La Rochelle (21-17) qui clôturait sur un échec sa première saison de présidence. Et son regard se porte plus particulièrement sur l’ascension suivie par le RCT au cours des douze derniers mois. « Je me souviens l’an passé quand on jouait la finale du Challenge européen (NDLR : perdue contre Biarritz 21-18 au Twickenham Stoop Stadium couramment appelé « The Stoop », une enceinte de 14 800 places distante de seulement 1 km de la mythique arène de Twickenham de 82 000 places), je me suis retrouvé avec Hubert Falco (NDLR : le sénateur-maire de Toulon), à l’hôtel face au stade de Twickenham, et on se disait : « Le jour où on pourra jouer dans un stade comme ça, on sera une grande équipe ». C’est venu vite », s’étonne presque le président toulonnais.
Mais comme dit le dicton « l’appétit vient en mangeant ». Aussi celui qui se réjouit d’avoir fait entrer la culture H-Cup à Toulon, cité d’ovalie jadis plus prompte à s’enflammer pour la conquête du sacro-saint légendaire Bouclier de Brennus, ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. « Mais pour être une grande équipe, il faut y jouer et y gagner. C’est notre challenge de dimanche, c’est notre karma. Et c’est le destin d’une équipe qu’on a annoncée au début de saison programmée pour gagner et qui maintenant doit prouver qu’elle n’a pas perdu son rugby et ses ambitions au fil de la saison », analyse Mourad Boudjellal.
« Si on gagne, on serait à un match d’un titre historique qui nous permettrait d’envoyer une équipe en bois en demi-finale de Top 14… Si on gagne la finale bien sûr ! »
Pour autant, le président toulonnais refuse, avec son franc-parler habituel, de dramatiser l’enjeu de cette demi-finale historique pour le RCT. « On n’a pas une pression énorme puisqu’ on se dit que si on est battu, on aura trois semaines de récupération pour le Top 14. Et si on gagne, on serait à un match d’un titre historique qui nous permettrait d’envoyer une équipe en bois en demi-finale de Top 14… Si on gagne la finale bien sûr ! », ironise même Mourad Boudjellal (NDLR : les demies-finales du Top 14 sont programmées les 24 et 25 mai, une semaine après la finale de la H-Cup). Car aux yeux du président toulonnais, ce parcours en Coupe d’Europe n’est pour l’heure que du bonus. « On a pris la H-Cup comme une extra-ball au flipper c’est-à-dire que chaque fois qu’on passe un tour, c’est « same player shoot again » en se disant « espérons que ça aille jusqu’au bout ». Mais c’est vraiment le fait d’avoir deux chances de gagner quelque chose. Est-ce que le « same player shoot again » va durer ce week-end ou pas ? On le saura dimanche soir. Mais si on gagne encore une extra-ball, on sait que la fois d’après, on ne pourra plus gagner d’extra-ball mais gagner un titre », résume-t-il.
Le président « rouge et noir » est cependant conscient que pour aller au bout de son rêve, c’est un Everest que le RCT devra franchir ce dimanche dans le temple du rugby anglais. En face des « rouge et noir » se dresseront en effet les Saracens de Londres, ce qui fait de mieux actuellement outre-Manche en matière de rugby de clubs. Leaders de leur championnat, avec quatre points d’avance sur Leicester une équipe qui a donné beaucoup de fil à retordre aux « rouge et noir » en quarts de finale de H-Cup (victoire étriquée 21-15 à Mayol), les Saracens sont l’équipe qui a le moins souvent perdu cette saison sur le vieux continent : 5 défaites seulement au compteur, quatre en championnat d’Angleterre et une en H-Cup, toutes concédées sur terrain adverse. Et comme on peut considérer qu’à Twickenham cette équipe basée à Londres sera quelque part chez elle dimanche, même si ce n’est pas l’enceinte dans laquelle elle a l’habitude d’évoluer, c’est donc à un véritable exploit qu’est condamné le RCT s’il veut continuer à écrire son histoire en s’ouvrant les portes d’une finale historique. « On n’y va pas battu mais on sait quand même que ce qui nous attend, ce sont des montagnes qui sont autrement plus difficiles que celles de Grenoble », résume Mourad Boudjellal.
« Vous allez voir la composition d’équipe : certains n’y seront pas ! »
« Grenoble » : le mot est lâché. Car c’est peu dire que le RCT n’a pas préparé de la meilleure des manières cette demi-finale historique en s’inclinant la semaine passée au stade des Alpes dans les dernières secondes (25-24) alors que les « rouge et noir » menaient 24 à 6 à une demi-heure de la fin. Une défaite qui a fait perdre à Toulon son fauteuil de leader du Top 14, qu’il occupait depuis de longs mois, au profit de Clermont. Même si l’équipe alignée était largement remaniée, en donnant du temps de jeu à des habituels remplaçants, cette défaite n’a pas du tout été du goût de Bernard Laporte, le manager toulonnais. Et « Bernie le barge » ne s’est pas fait prier pour le faire savoir aux intéressés. « C’est l’attitude de certains qui sont entrés en cours de match qui m’a un peu déçu parce que j’avais l’impression qu’ils n’avaient pas envie de se faire mal avec certainement en tête la demi-finale. Mais quand on fait partie d’un groupe, on privilégie l’intérêt général et pas son intérêt particulier. C’est ce que j’ai dit à 3 ou 4 joueurs. C’est pour ça que ça a duré un petit peu de temps », lâche-t-il.
Le manager toulonnais ne cache pas que pour certains le couperet va tomber. « Ils n’ont pas mis l’enthousiasme nécessaire quand on rentre en cours de match. Je n’ai pas dit qu’ils avaient levé le pied mais je n’ai pas vu non plus qu’ils s’étaient envoyés en l’air. Je n’ai pas dit qu’ils avaient levé le pied mais qu’ils n’avaient peut-être pas tout donné. Vous allez voir la composition d’équipe : certains n’y seront pas ! », assène-t-il sans ménagement.
Ils sont donc huit, ceux qui sont entrés en cours de jeu à Grenoble, à figurer au banc des accusés : l’arrière Delon Armitage, le demi de mêlée Sébastien Tillous-Borde, le deuxième ligne Nick Kennedy, les troisième ligne Steffon Armitage et Juan Martin Fernandez-Lobbe, les piliers Davit Kubriashvili et Xavier Chiocci, et le talonneur Mickaël Ivaldi. Si les deux derniers ne figurent pas sur la liste de 29 noms (lire ci-dessous) retenue par le staff toulonnais pour disputer cette demi-finale de H-Cup, difficile pour l’heure de parler de sanctions : Mickaël Ivaldi est en effet victime du retour de blessure de Jean-Charles Orioli qui l’a supplanté cette saison dans l’esprit des entraîneurs, tandis que Xavier Chiocci ne figurait dans le groupe à Grenoble qu’en raison de la mise au repos des habituels titulaires Andrew Sheridan et Carl Hayman.
« Toulon doit montrer que c’est aussi une grosse équipe »
Alors pour qui ce fameux couperet va-t-il tombé ? On peut imaginer qu’avec le retour de Frédéric Michalak, de nouveau opérationnel après sa blessure contractée avec le XV de France dans le Tournoi des VI Nations, le demi de mêlée Sébastien Tillous-Borde est l’un des plus menacés. Au même titre que le deuxième ligne Nick Kennedy et les deux troisième ligne entrés en cours de jeu au stade des Alpes, des postes où le RCT dispose d’une grande richesse d’effectif.
Quels que soient ses choix, Bernard Laporte sait que cette fois-ci il n’aura pas à longtemps chercher ses mots pour motiver ses joueurs. « On va y aller avec beaucoup d’enthousiasme, beaucoup d’envie. C’est une demi-finale de H-Cup. Peu de joueurs en ont joué chez nous même s’ils ont joué d’autres compétitions plus relevées comme la Coupe du Monde. Il y a une véritable ambition. Je sens qu’il y a véritablement de l’enthousiasme, de l’envie dans la préparation des joueurs, dans l’attitude des joueurs cette semaine. Tout le monde est sur le pont, tout le monde a envie de jouer et c’est normal », souligne le manager toulonnais. Et même si les Saracens sont un gros morceau, « Bernie le barge » y croit : « C’est une très grosse équipe, c’est sûr, mais Toulon doit montrer que c’est aussi une très grosse équipe. »
Pour parvenir à tenir la dragée haute au leader du championnat d’Angleterre, le RCT devra tout d’abord contrer l’alignement des Anglais, le plus performant d’outre-Manche avec 90% de réussite. Pénalisés 16 fois en mêlée au stade des Alpes, les « rouge et noir » devront aussi se montrer disciplinés afin de ne pas s’exposer à la botte de l’ouvreur Owen Farrell, le successeur de Sir Jonny Wilkinson sous le maillot du XV de la Rose. Il faudra également se méfier du redoutable triangle d’attaque composé par les ailiers Chris Ashton et David Strettle et l’arrière Alex Goode, ou de la tonicité du talonneur sud-africain Schalk Brits, un joueur atypique disposant d’appuis incroyables qui court aussi vite qu’un trois-quarts centre. Sans oublier que les Saracens disposent de la meilleure défense du championnat d’Angleterre à égalité avec Leicester contre qui les « rouge et noir » n’étaient pas parvenus à inscrire le moindre essai il y a trois semaines à Mayol. C’est dire si la moindre erreur se paiera cash.
Mais le RCT a aussi des atouts à faire valoir et des motifs d’espérer : les Saracens se sont en effet inclinés le week-end passé à Gloucester (28-23) avec une équipe beaucoup moins remaniée que celle que le staff « rouge et noir » a alignée à Grenoble. En tout cas, c’est au prix d’un exploit que Toulon gagnera le droit de fouler la pelouse de l’Aviva Stadium le 18 mai à Dublin, pour le plus grand bonheur de son président et de ses supporters…
Marc BESAGNE
La composition du groupe toulonnais :
Vingt-neuf joueurs ont été retenus par le manager Bernard Laporte et les entraîneurs Olivier Azam et Pierre Mignoni.
Avants (17) : S. Armitage, Botha, Bruni, Bruno, Elsom, Fernandez-Lobbe, Hayman, Jenkins, Kennedy, Kubriashvili, Masoe, Orioli, Rossouw, Shaw, Sheridan, Suta, Van Niekerk.
Arrières (12) : D. Armitage, Bastareaud, Durand, Giteau, Martin, Mermoz, Michalak, Palisson, Wilkinson, Smith, Tillous-Borde, Wulf.