Publié le 14 juin 2021 à 7h00 - Dernière mise à jour le 31 octobre 2022 à 19h14
Exposer les plantes aux UV-C pour booster leurs défenses naturelles contre les bioagresseurs. C’est cette idée issue des recherches de Laurent Urban, professeur en agronomie et écophysiologie végétale et Jawad Aarrouf, maître de conférences HDR en biologie et pathologies végétales, en poste à l’université d’Avignon, qui a conduit à la fondation de la start-up UV-Boosting en 2017.
Aujourd’hui installée à Saint-Nomla-Bretêche, dans les Yvelines, avec une antenne notamment dans le Vaucluse, cette petite société qui compte une vingtaine de salariés a débuté il y a quelques mois la commercialisation d’une solution innovante destinée à permettre aux viticulteurs de réduire leur dépendance aux produits phytopharmaceutiques de synthèse, et en particulier aux fongicides utilisés pour lutter contre le mildiou et l’oïdium.
L’utilisation des UV-C n’est pas en soi une nouveauté. Peu, voire pas présents dans la nature pour la bonne raison qu’ils sont filtrés par la couche d’ozone, ces ultraviolets à longueur d’onde très courte sont utilisés depuis déjà des années à des fins de désinfection, dans le secteur médical, notamment.
Une réduction de l’usage des fongicides de 30 à 60 %
D’ailleurs, « avec le Covid-19, c’est une industrie qui connaît une forte croissance car tout le monde est à la recherche de procédés pour tuer le virus », indique Baptiste Rouesné, directeur général d’UV-Boosting. Ce que Laurent Urban et Jawad Aarrouf ont découvert, en revanche, c’est que « des flashs d’UV-C d’une à deux secondes sont plus efficaces que des expositions conventionnelles à dose et longueurs d’onde égales, pour stimuler les défenses des plantes contre les maladies fongiques. Cette découverte rend possible une application industrielle puisque l’on peut équiper des tracteurs avec nos lampes ».
Une technologie qui a de fait montré son efficacité lors des essais effectués sur des vignobles en condition de production pour lutter contre les champignons pathogènes. Le signal UV génère une production d’acide salicylique (une multiplication par trois de la concentration d’acide salicylique dans les feuilles quatre heures est observée après le flash UV), qui joue le rôle de signal d’alerte et prépare la plante à se défendre plus rapidement et plus efficacement contre le mildiou et l’oïdium. Le procédé permettrait ainsi de réduire de 30 à 60 % l’usage des fongicides et se veut donc particulièrement en phase avec la politique de transition agroécologique défendue par le gouvernement.
Démocratiser le dispositif à d’autres cultures
Ces résultats ont d’ailleurs valu à la start-up d’être lauréate en 2018 du concours d’innovation i-Nov du Programme d’investissements d’avenir opéré par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). « Ce projet se distinguait des autres parce qu’il n’apporte aucun intrant et agit en préventif. Il n’existe aucune technologie comparable sur le marché. Ses effets ont été reconnus dans le cadre des certificats d’économie de produit phytopharmaceutiques », explique Thomas Eglin, coordinateur R&D – Agriculture, forêt et gestion durable des sols à l’ADEME, sur le site web de l’agence.
La solution proposée pour traiter la vigne est disponible pour tracteurs enjambeurs ou interlignes un rang et deux rangs. « Le principe est simple : l’outil est fixé sur la prise de force du tracteur, ce qui fournit l’énergie nécessaire pour allumer les lampes, auxquelles les plantes ne sont exposées qu’une à deux secondes. Cela permet d’aller relativement vite, de l’ordre de 4 à 5 km/h dans les vignes », précise Baptiste Rouesné. Après les vignes, puis les fraises, la start-up travaille actuellement à l’adaptation de sa solution pour l’arboriculture fruitière et d’autres cultures dans le secteur du maraîchage.
Stéphane Martin pour L’Espace Alpin
[(L’Espace Alpin est le journal agricole et rural des Alpes-de-Haute-Provence et des Hautes-Alpes. Ce journal bimensuel est disponible sur abonnement sur lespace-alpin)]