Publié le 15 mai 2017 à 0h54 - Dernière mise à jour le 29 novembre 2022 à 12h30
Lorsque la pluie s’est mise à tomber on a cru que la malédiction présidentielle allait se poursuivre. Que nenni! elle ne s’est invitée en ce dimanche 14 mai que pour souligner la transition entre François Hollande et son successeur Emmanuel Macron qui, dans son premier discours officiel en tant que Président a considéré que les Français ont choisi le 7 mai dernier, «l’espoir et l’esprit de conquête».
Une cérémonie emplie de dignité et un propos qui a vu le nouveau Président afficher deux ambitions: redonner aux Français confiance en eux et rendre la France forte et prospère mais aussi exemplaire afin qu’elle redevienne un modèle pour le monde. Une intervention lors de laquelle il ira jusqu’à mentionner les excès du capitalisme mondial.
Dans son discours, bref, il a avancé: «Le monde entier a regardé notre élection présidentielle. Partout, on se demandait si les Français allaient décider à leur tour de se replier sur le passé illusoire, s’ils allaient rompre avec la marche du monde, quitter la scène de l’Histoire, céder à la défiance démocratique, l’esprit de division et tourner le dos aux Lumières, ou si au contraire ils allaient embrasser l’avenir, se donner collectivement un nouvel élan, réaffirmer leur foi dans les valeurs qui ont fait d’eux un grand peuple».
Le nouveau Président affiche son ambition de voir la France reprendre sa place sur la scène internationale: «Le monde et l’Europe ont aujourd’hui, plus que jamais, besoin de la France. Ils ont besoin d’une France forte et sûre de son destin. Ils ont besoin d’une France qui porte haut la voix de la liberté et de la solidarité. Ils ont besoin d’une France qui sache inventer l’avenir. Le monde a besoin de ce que les Françaises et les Français lui ont toujours enseigné : l’audace de la liberté, l’exigence de l’égalité, la volonté de la fraternité. Or, depuis des décennies, la France doute d’elle-même. Elle se sent menacée dans sa culture, dans son modèle social, dans ses croyances profondes. Elle doute de ce qui l’a faite».
Insiste sur ses deux exigences: «La première sera de rendre aux Français cette confiance en eux, depuis trop longtemps affaiblie. (…). Ce sera un travail lent, exigeant, mais indispensable». Et d’affirmer: «Je convaincrai nos compatriotes que la puissance de la France n’est pas déclinante, mais que nous sommes à l’orée d’une extraordinaire renaissance, parce que nous tenons entre nos mains tous les atouts qui feront et qui font les grandes puissances du XXIᵉ siècle». Et de prévenir: «Pour cela, je ne céderai sur rien des engagements pris vis-à-vis des Français. Tout ce qui concourt à la vigueur de la France et à sa prospérité sera mis en œuvre : le travail sera libéré, les entreprises seront soutenues, l’initiative sera encouragée. La culture et l’éducation, par lesquelles se construit l’émancipation, la création et l’innovation seront au cœur de mon action».
Au plan national, considère-t-il: «Les Françaises et les Français qui se sentent oubliés par ce vaste mouvement du monde devront se voir mieux protégés. Tout ce qui forge notre solidarité nationale sera refondé, réinventé, fortifié. L’égalité face aux accidents de la vie sera renforcée. Tout ce qui fait de la France un pays sûr, où l’on peut vivre sans avoir peur, sera amplifié. La laïcité républicaine sera défendue, nos forces de l’ordre, notre renseignement, nos armées, réconfortés».
Il en vient à l’Europe« dont nous avons besoin», sera «refondée, relancée, car elle nous protège et nous permet de porter dans le monde nos valeurs». Parle de la France et de ses institutions «décriées par certains» et doivent retrouver aux yeux des Français «l’efficacité qui en a garanti la pérennité. Car je crois aux institutions de la Vᵉ République et ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour qu’elles fonctionnent selon l’esprit qui les a fait naître. Pour cela, je veillerai à ce que notre pays connaisse un regain de vitalité démocratique. Les citoyens auront voix au chapitre. Ils seront écoutés». Il en termine avec cette première exigence en mettant en exergue «le sens profond, la dignité de ce qui aujourd’hui nous rassemble : agir de manière juste et efficace pour notre peuple».
Puis aborde la seconde exigence: «La France n’est forte que si elle est prospère. La France n’est un modèle pour le monde que si elle est exemplaire». Et de rendre, à ce propos, hommage à l’action de ses prédécesseurs: «Je songe au Général de Gaulle, qui œuvra pour redresser la France et lui rendre son rang dans le concert des Nations. Je songe à Georges Pompidou, qui fit de notre pays une puissance industrielle majeure. À Valéry Giscard d’Estaing, qui sut faire entrer la France et sa société dans la modernité. À François Mitterrand, qui accompagne la réconciliation du rêve français et du rêve européen. À Jacques Chirac, nous donnant le rang d’une nation sachant dire non aux prétentions des va-t-en-guerre. À Nicolas Sarkozy, ne comptant pas son énergie pour résoudre la crise financière qui avait si violemment frappé le monde. Et je songe bien sûr à François Hollande, faisant œuvre de précurseur avec l’Accord de Paris sur le climat et protégeant les Français dans un monde frappé par le terrorisme». Il n’en considère pas moins que «leur œuvre, surtout ces dernières décennies, s’est trop souvent vu empêchée sur un climat intérieur délétère, par le découragement de Françaises et de Français s’estimant injustement défavorisés, déclassés ou oubliés. Ce que la France avait à dire au monde s’est parfois trouvé affaibli par une situation nationale percluse d’inquiétude voire de défiance».
Il se fait gaullien en déclarant: « Le temps est venu pour la France de se hisser à la hauteur du moment. La division et les fractures qui parcourent notre société doivent être surmontées, qu’elles soient économiques, sociales, politiques ou morales ; car le monde attend de nous que nous soyons forts, solides et clairvoyants». Il s’inscrit dans la même filiation lorsqu’il avance: «La mission de la France dans le monde est éminente. Nous prendrons toutes nos responsabilités pour apporter chaque fois que cela sera nécessaire une réponse pertinente aux grandes crises contemporaines. Qu’il s’agisse de la crise migratoire, du défi climatique, des dérives autoritaires, des excès du capitalisme mondial, et bien sûr du terrorisme ; plus rien désormais ne frappe les uns en épargnant les autres. Nous sommes tous interdépendants. Nous sommes tous voisins».
«La France, poursuit-il, veillera toujours à être aux côtés de la liberté, des droits de l’Homme mais toujours pour construire la paix dans la durée. Nous avons un rôle immense : corriger les excès du cours du monde, et veiller à la défense de la liberté. C’est là notre vocation. Pour ce faire, nous aurons besoin d’une Europe plus efficace, plus démocratique, plus politique, car elle est l’instrument de notre puissance et de notre souveraineté. J’y œuvrerai».
A ses yeux: «La géographie s’est singulièrement rétrécie. Mais le temps s’est accéléré. Nous vivons une période qui décidera du destin de la France pour les décennies qui viennent». «Rien, assure-t-il, ne sera concédé à la facilité ni au compromis. Rien n’affaiblira ma détermination. Rien ne me fera renoncer à défendre en tout temps et en tout lieu les intérêts supérieurs de la France». Et de conclure: «J’aurai, dans le même temps, la volonté constante de réconcilier et rassembler l’ensemble des Français».
Michel CAIRE