Areva TA (ex-Technicatome) qui conçoit les chaudières nucléaires du porte-avions Charles-de-Gaulle et des sous-marins nucléaires français (SNA et SNLE), va passer sous le contrôle direct de l’Etat. L’Agence des participations de l’Etat (APE) va racheter à Areva 50% de sa filiale, le groupe naval DCNS va monter en capital en passant de 6,5% à 20% tandis que le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) prendra lui aussi une participation de 20%, et EDF reste à hauteur de 10%. Les quelques mois de réflexion qui ont suivi l’annonce de la restructuration du groupe Areva ont abouti à un autre schéma que celui annoncé par le ministre de l’Économie Emmanuel Macron qui avait affirmé contre toute logique à l’Assemblée nationale que Technicatome ne serait pas concernée par le chambardement et resterait «sous Areva, sans aucune interaction supplémentaire avec EDF, et en liaison directe avec le CEA et DCNS – comme c’est déjà le cas aujourd’hui».
La direction d’Areva ne voyait pas l’intérêt, ni la logique, à conserver les réacteurs de sous-marins et de recherche, alors qu’il avait été décidé que les réacteurs de puissance allaient lui échapper pour passer sous le contrôle d’EDF. La Défense ne cachait pas sa volonté de mettre la main sur cette société éminemment stratégique, le CEA et DCNS se seraient bien vus, chacun de leur côté, prendre le contrôle de cette filiale au fonds de commerce défense. Finalement l’État met tout le monde d’accord : il s’approprie la majorité et met les deux rivaux à égalité. Mais certains murmurent qu’il ne s’agirait que d’une position d’attente avant de confier à DCNS les 50%.
Les administrateurs salariés élus de Areva TA n’ont pas tardé à faire connaître leur hostilité à ce schéma répandu par voie de presse. Dans un communiqué du 17 décembre, ils ont fait connaître leur position unanime: la répartition capitalistique envisagée est «potentiellement dangereuse». Le CEA ne serait actionnaire qu’à 20% alors qu’il compte pour 80% du chiffre d’affaires de TA ; en outre le CEA est propriétaire de l’INB-S, des ateliers de fabrication de combustible, de la poudre d’uranium, des boucles d’essais, des ateliers de remise à niveau des composants majeurs des sous-marins et porte-avions des codes de calcul, du procédé de fabrication des éléments combustibles, etc.; il apparaît donc risqué de le reléguer à un rôle subalterne. Les élus estiment par ailleurs que sur le terrain, les contrats vont devenir plus difficiles à exécuter «sans un adossement suffisant à un référent nucléaire français parmi les trois existants : EDF, Areva et CEA ».
Et de fait la pilule doit être particulièrement amère pour le CEA : outre que Areva TA est née et s’est développée au sein du CEA avant d’être filialisée sous le nom de Technicatome ; puis d’intégrer le groupe Areva comme Areva TA. Ce qui explique que le CEA soit encore propriétaire de l’essentiel. Par ailleurs les performances de DCNS dans le chantier du RJH laissent d’aucuns d’autant plus perplexes que les contrats de celle-ci sont en voie d’être résiliés à l’amiable pour un montant de quelque € 130 millions au bénéfice du CEA qui va reprendre ces marchés et contrats (ventilation nucléaire et fluides). Comprenne qui pourra!
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