Le Crif Marseille Provence vient d’accueillir Mohamed Sifaoui à l’occasion de la sortie de son dernier ouvrage : «Hamas: Plongée au cœur du groupe terroriste» .
Journaliste, écrivain et réalisateur franco-algérien, Mohamed Sifaoui, menacé de mort a dû quitter l’Algérie pour se réfugier en France. Il suit depuis une trentaine d’années l’évolution de toutes les organisations liées à la mouvance islamiste en général, et djihadiste en particulier. Son nouveau livre est une plongée inédite dans les moindres recoins du Hamas. Mohamed Sifaoui explique dans cet ouvrage, comment cette organisation a réussi à faire main basse sur la «cause palestinienne». Indique quels sont ses desseins à l’échelle régionale, mais aussi mondiale. Evoque les conséquences des attentats du 7 octobre 2023, à la fois pour ce groupe islamiste et pour la région. Ce livre tente ainsi de proposer une lecture de l’avenir des Israéliens et des Palestiniens, et plus particulièrement des habitants de Gaza. Il n’est pas possible, quoi qu’il en soit, d’envisager un hypothétique « processus de paix » sans connaître cet acteur majeur qu’est le Hamas. Et il serait imprudent d’oublier son impact sur la politique intérieure des pays occidentaux, notamment en France. Tout comme il faut comprendre ses répercussions à la fois sur les juifs de la diaspora et sur ceux qui sont attachés, de bonne foi, à la cause palestinienne. Entretien.
Destimed: Quel regard portez-vous sur le Hamas ?
Mohamed Sifaoui: Le Hamas a vu le jour en 1987, il s’inscrit dans la mouvance des Frères Musulmans dont le fondateur, Hassan Al Banna, dès 1925, trois ans avant la création des Frères Musulmans, avançait que la présence juive en Israël (qui n’existait pas encore dans sa forme actuelle) représentait un danger pour la Mosquée Al Aqsa, la mosquée de Jérusalem. Une propagande mensongère toujours utilisée aujourd’hui par l’islam politique. Islam politique qui est un totalitarisme. Il génère des idées, des logiques de guerre qui visent à la destruction de la démocratie, à l’affaiblissement des régimes arabes qui ne pratiquent pas la Charia. Ce mouvement diabolise la laïcité, l’égalité homme/femme, la liberté sexuelle et ne cesse de vouloir la destruction d’Israël. Et Israël ne veut plus jamais connaître une situation similaire à celle du 7 octobre. Plus largement il faut bien voir que depuis que le Hamas a pris Gaza il y a des conflits avec Israël tous les deux, trois ans et, chaque fois, ce mouvement se renforce et obtient des financements supplémentaires. On comprend bien que cela ne peut pas durer, que cette guerre doit aller à son terme.
Mais la guerre ne peut être une fin en soi, il faut de la politique, il faut la paix…
Oui, et cela passe par la destruction du Hamas. Ce mouvement ne doit plus jouer aucun rôle. Quasiment tout le monde est d’accord pour dire qu’il s’agit d’un mouvement terroriste et le laisser diriger ce territoire. Cela est fini, il restera certes une idéologie mais sans moyens politique et militaire. Et le Qatar ne financera pas un mouvement qui n’est plus structuré, n’a plus de dirigeants. L’Iran essaiera de continuer à soutenir le Hamas mais ce sera plus difficile. La guerre est gagnée à Gaza mais il reste encore des actions à mener. Il faut bien mesurer que, toutes organisations confondues, il y avait 100 000 combattants à Gaza sur une population de 2 200 000 habitants et qu’il n’y aura pas de reddition du Hamas. Alors nous sommes à 13 mois de guerre, le Hamas est affecté à 70%, la moitié des tunnels ont été détruits, il faut détruire le reste. Je pense donc que rien ne sera stabilisé avant 2026. Après il sera temps de demander des comptes à Netanyahu mais ce sera après. Par ailleurs, pour en venir à la paix, il faut savoir qu’un travail est mené en direction des grandes familles de Gaza qui sont en désaccord avec le Hamas. Israël dialogue aussi avec l’Egypte, l’Arabie Saoudite, les Emirats Arabes Unis… car Israël envisage une organisation palestinienne rénovée qui pourrait bénéficier de fonds pour la reconstruction et la distribution de richesses sur Gaza.
Et en ce qui concerne le Hezbollah ?
La situation est plus complexe. Il incarne l’Etat au Liban. Mais là aussi ce mouvement qui était puissant a été renvoyé à l’âge de pierre avec l’action de l’Armée israélienne qui visait à empêcher cette organisation à lancer une action similaire à celle du 7 octobre.
Selon vous, quelle est la situation en Iran ?
Sans rien enlever au courage des militants il faut bien mesurer que l’opposition est faible. L’armée pourrait se retourner contre le régime si elle avait le soutien de l’Occident mais il faut bien mesurer que, contrairement à l’époque du Shah elle n’est plus la seule force armée il y a aussi les gardiens de la révolution qui sont extrêmement puissants et le régime a encore un soutien dans les campagnes. Là encore l’action d’Israël est importante puisqu’il est en train de détruire les proxy de l’Iran. Détruire ces proxy c’est affaiblir le régime iranien.
Propos recueillis par Michel CAIRE
«Hamas: Plongée au cœur du groupe terroriste» par Mohamed Sifaoui – Editions du Rocher – 368 pages -22 euros