Publié le 20 avril 2014 à 0h09 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2022 à 17h48
Monseigneur Georges Pontier, Archevêque de Marseille, Président de la Conférence des évêques de France revient sur le sens de Pâques, la fête la plus importante pour les Chrétiens.
Destimed : Quel est le sens de cette fête de Pâques?
Monseigneur Georges Pontier : Pour moi, il réside dans le fait que notre existence humaine n’est pas enfermée dans ce périmètre de la vie ici-bas. Il y a un Autre qui a donné la vie ici-bas. Il y a un Autre qui a donné la vie, ce monde, ce n’est pas pour que cela finisse dans la mort mais dans la vie, la résurrection. Et cette espérance doit permettre de traverser les échecs, les trahisons, les pépins de santé. Elle permet de rester humain dans les épreuves. Pâques, c’est d’autre part ce qui nous permet de mesurer que l’autre, notre prochain, est notre égal, qu’on ne peut donc le maltraiter. C’est enfin une invitation à ne pas nous livrer à nos espoirs matériels. Il est tout à fait concevable d’avoir des envies, mais il faut bien mesurer que le matériel ne nous comblera jamais, ne pourra jamais combler les besoins les plus profonds de l’Homme. Alors, soignons le relationnel : ce qui est soutien, compassion, action associative, mais aussi, tout simplement, le respect de la qualité des relations dans la vie quotidienne.
Au fond de la souffrance, il y aurait un espoir ?
Dans ce Dieu fait homme, trahi, qui doute, qui meurt sur la Croix avant de ressusciter, il y a le message que, même lorsque l’on est au fond du puits, un autre s’occupe de nous. Seul on ne peut pas s’en sortir. Et notre Foi nous dit : Un est avec nous, il nous sortira du puits comme il a sorti son fils. Et puis, l’être humain est éminemment relationnel. S’il veut avancer seul, construire pour lui seul, il se fragilise. Mais quelqu’un est avec nous. Alors, les échecs ne doivent, ne peuvent gagner en nous même s’il gagne à l’extérieur. Le Christ a subi la trahison, la violence, les infidélités, il ne s’en est remis ni à la haine ni à la violence, il est resté humain.
Vous soulignez l’importance de la rencontre avec Dieu mais aussi avec l’Autre…
Effectivement, on ne peut être soi, solide, que dans la rencontre avec l’Autre, c’est là que ce crée ce que je ne peux créer par moi-même. La rencontre du plus pauvre nous fait prendre conscience de la dignité humaine, de la force de l’Homme. Et combien de témoignages avons-nous de gens qui, s’investissant dans le rapprochement des cultures, en reviennent renouvelés. Alors que celui qui s’enferme dans les peurs ou ses certitudes, se perd. Judas s’est laissé idéologiser, enfermer, et c’est cela qui le conduit à trahir mais, cette trahison le conduit au suicide, c’est lui qui meurt. Alors que l’ouverture à l’Autre fait vivre.
Le Pape François marque les esprits, qu’est-ce qui fait qu’il touche autant, les Catholiques comme d’autres, croyants ou pas ?
Il nous invite à cette ouverture à l’Autre. Il nous révèle tout ce qu’il a reçu des plus pauvres. Et, ce n’est pas que des mots. Il pose des actes. Il s’est rendu à Lampedusa; il a été en prison pour Jeudi saint; puis, auprès de personnes handicapées. Il ne vit pas dans une tour. Il ouvre grand les portes, il va vers l’Autre. Et c’est en cela qu’il touche, les Catholiques et bien au-delà. Après, qu ‘il y ait chez certains une nostalgie d’une Église hiérarchisée, enfermée, c’est dommage pour eux. Le Pape François touche par sa simplicité, sa défense des plus faibles, des plus pauvres. Il a dénoncé les dérives d’un libéralisme excessif. Et il ne cesse de nous dire de réduire l’écart entre nos propos et notre façon de vivre. Enfin, il a su, malgré l’importance de sa fonction, garder une spontanéité et parle toujours avec des mots que tout le monde peut comprendre.
Propos recueillis par Michel CAIRE