Publié le 30 septembre 2018 à 14h03 - Dernière mise à jour le 28 octobre 2022 à 18h59
«Connectée, économe, adaptée aux exigences de notre temps, plus sûre, respectueuse de notre environnement, la mobilité de demain est un futur à inventer ensemble». Dans le cadre de la semaine européenne de la mobilité, Renaud Muselier, président de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, Député européen, a souhaité organiser, à l’Hôtel de Région, une conférence «Demain le Sud, la mobilité du Futur». A cette occasion, des représentants d’entreprises internationales telles que Airbus Helicopters, Cisco, CMA CGM, Facebook, GPMM, Groupe La Poste, GRTGaz, Orange, Renault Software Lab, Thalès Alenia Space, Uber (…) ont échangé sur différents thèmes comme la mobilité connectée dans la Smart-city, la logistique urbaine et les véhicules de demain. Un enjeu d’avenir mais aussi pour aujourd’hui lorsque l’on sait la pollution, les embouteillages, dans la région et tout particulièrement sur la métropole Aix-Marseille-Provence.
Renaud Muselier explique les raisons qui l’ont conduit à cette démarche de rencontres: «L’exercice du pouvoir exige plusieurs choses: le respect du programme, ce qui est facile. Il impose également d’assumer ses responsabilités dans le cadre de la loi». Il rappelle à ce propos: «La région a des responsabilités importantes en matière de transport, de formation, de développement économique à l’international et nous sommes pris dans une énorme machine qui empêche de réfléchir. Nous avons donc besoin de temps tel celui-là pour poser sereinement les problématiques afin d’avancer. Dans ce sens nous allons organiser d’autres réunions sur des thèmes tels: l’éducation, la jeunesse, la formation, l’énergie».
«Maintenant nous sommes tous espionnés de notre plein gré»
C’est peu dire que le champ des possibles est immense en matière de mobilité et point question de science-fiction, demain s’inscrit pleinement dans le présent. Anton Maria Battesti, responsable des affaires publiques de Facebook explique qu’en matière de transport les informations sont un outil de mobilité. «Nous travaillons également sur l’Intelligence Artificielle (IA), avons investi massivement sur la reconnaissance de formes savoir s’il s’agit d’un arbre, d’une personne… s’avérera utile pour la voiture autonome». Renaud Muselier ne manque pas de réagir: «Il est des pays où existait la Stasi et on luttait contre les dictatures maintenant nous sommes tous espionnés de notre plein gré. Comment nous protégez-vous?». Anton Maria Battesti: «C’est une question primordiale pour nous car nous savons bien que si les utilisateurs perdaient confiance il n’y aurait plus de réseau. De plus, il existe des lois très strictes avec des amendes importantes en cas de non respect de la vie privée. Après il faut savoir que nous nous y retrouvons dans un échange: vous savez ce que vous donnez et ce que vous en retirez».
«Le Groupe CMA CGM et Klaxit, leader français du covoiturage domicile-travail, ont lancé un service de covoiturage»
Cécile Achouiantz, directrice des ressources humaines de CMA-CGM rappelle que le siège du groupe se trouve à Marseille, ce qui représente 2 500 personnes avant de constater: «L’offre de transport public n’est pas adaptée». Point question de rester dans le constat pour ce géant des transports: «Nous avons mené trois actions en partenariat avec des start-up». En premier lieu, à l’occasion de la semaine européenne de la mobilité, le Groupe CMA CGM et Klaxit, leader français du covoiturage domicile-travail, ont lancé un service de covoiturage pour les collaborateurs du Groupe basés à son siège de Marseille. Ce partenariat marque également l’implantation de Klaxit à Marseille. Dans le cadre de ce partenariat les collaborateurs du Groupe CMA CGM bénéficieront de trajets gratuits jusqu’à 40 kilomètres par trajet deux fois par jour, dans la limite des 20 000 premiers kilomètres. Ils bénéficieront également de la nouvelle garantie de retour lancée par Klaxit pour permettre à un passager de rentrer chez lui en VTC et gratuitement en cas d’annulation du trajet retour par son conducteur. En outre, l’application mobile développée par Klaxit prend en compte les contraintes spécifiques des salariés sur les trajets domicile-travail. Elle propose ainsi aux conducteurs inscrits dans l’application, des passagers à moins de 5 minutes de détour. Les passagers bénéficiant quant à eux de trajets en porte-à-porte. L’application gère également le partage des frais avec un virement automatique en fin de mois. Et Cécile Achouiantz de poursuivre en mettant en avant les deux autres solutions à destination des employés : l’optimisation des places non utilisées pendant les périodes d’absences au sein des parkings CMA CGM grâce à l’application C-Park et un système de voiture électrique en libre-service avec Totem Mobi.
«Solar Smart Mobility vise à développer des films photovoltaïques souples et transparents intégrés au vitrage des véhicules de transport»
Avec Franck Edme, directeur technique de Sunpartner Technologies, ce sont d’autres pistes qui sont explorées, d’autres réponses qui se construisent. «Nous avons d’abord travaillé sur les montres et les téléphones portables puis sur les bâtiments et maintenant Sunpartner a une nouvelle corde à son arc, avec Armor et Vision Systems le projet Solar Smart Mobility qui vise à développer des films photovoltaïques souples et transparents intégrés au vitrage des véhicules de transport». Nouvelles pistes avec Sébastien Capelle, directeur marketing transport chez Orange Business Services: «L’époque où il y avait d’un côté la voiture et de l’autre les transports en commun est révolue du fait de l’arrivée du numérique. Un foisonnement d’idées se fait jour. Des innovations technologiques vont arriver: véhicules autonomes, véhicules volants…». Et, d’autre part, on va bientôt payer avec le smartphone et le mode d’information va évoluer; il ne s’agira plus de connecter des réseaux techniquement et initialement indépendants, mais de partager en amont des données sur une aire géographique la plus large possible. L’usager pourra ainsi, en fonction de son trajet, son horaire, avoir le panel de réponses le plus large possible.
«Nous investissons 20M€ sur cinq ans pour un Centre de recherche sur un transport aérien propre»
Benjamin Martin, directeur de affaires publiques Uber France, explique: «Notre objectif est de proposer sur notre application différents moyens de transports aux côtés de la voiture afin d’offrir un maximum de solutions aux usagers ». Alors l’entreprise Uber a acquis une start-up spécialisée dans les vélos électriques partagés, Jump. Puis, s’associant à une autre « PME », Google, a investi dans un fabriquant de trottinettes électriques lesquelles pourront être réservées sur l’application Uber. Avant d’ajouter: «Nous investissons 20M€ sur cinq ans pour un Centre de recherche sur un transport aérien propre». Puis de prédire: «La propriété de la voiture va disparaître dans les années à venir».
Pour Philippe Dumont, directeur général Cisco France, le bon sens est aussi une réponse à la question de la mobilité: «La première solution réside dans le fait de ne pas bouger avec le télétravail…». Laurent Vergely invite à prendre de la hauteur. Directeur industriel d’Airbus Helicopters son jugement est sans appel: «Le sol et le sous-sol sont saturés, il faut donc utiliser l’air pour fluidifier la mobilité». Pour lui, un marché est en train de naître: «Si on prend Londres 299 heures sont perdues par personne et par an dans les transports soit une perte de 12,5M€. Et, d’ici 2030, il existera 41 mégacités de plus de 10 millions d’habitants. Nous sommes persuadés que des personnes voudront se déplacer d’un point à un autre avec un service d’hélico-partage. Le problème réglementaire se pose, tout comme une interrogation réside dans la capacité de nos concitoyens à être survolés. Nous allons mettre en place une expérimentation sur notre site à Marignane pour acheminer nos pièces d’un point à un autre». Concernant le business modèle, il explique: «Cela passe par la création d’objets spécifiques, nous devrions à ce propos faire voler un prototype léger, électrique et autonome d’ici la fin de l’année. Notre objectif est d’être prêt pour le jour où le marché sera mature».
Il n’y a pas que les informations, les personnes à transporter, il y a aussi les objets, Mustapha Kasbary est le président de Atechsys, la première entreprise au monde à avoir réalisé une ligne régulière de livraison par drones, entre Pourrières et Saint-Maximin, validée par la Direction générale de l’Aviation civile. un système qui réduit l’empreinte carbone, permet des livraisons rapides, par tous les temps, dans des zones isolées voire dangereuses.
«Ce dirigeable stratosphérique autonome sera placé à une altitude de 20 kilomètres au-dessus de son théâtre d’opérations»
André Soulage, directeur du programme dirigeables du Pôle Safe élabore une réponse pour les problèmes de sécurité, de télécommunication pour le moins gonflée: les ballons de haute altitude. Thales Alenia Space annonce que les premiers essais de Stratobus auront lieu l’an prochain. Ce dirigeable stratosphérique autonome sera placé à une altitude de 20 kilomètres au-dessus de son théâtre d’opérations, en couche basse de la stratosphère offrant une densité de l’air suffisante à la portance du ballon. Le Stratobus embarquera des missions de type surveillance des frontières, de sites critiques sur terre comme sur mer (vidéo protection des plateformes off-shore), de la sécurité militaire (lutte contre le terrorisme, les trafics de stupéfiant), mais aussi de contrôle environnemental (feux de forêts, érosion des plages, pollutions …) et télécommunications (internet, 5G). Vincent Rousseau, directeur du projet mobilité durable de GRTGaz présente les avantages du GNV (Gaz Naturel Véhicule). Il précise que ce dernier rejette moins de CO2 que l’essence (-25 %) et le diesel (-10 %). Le GNV est par ailleurs 100 % renouvelable lorsqu’il est issu du biométhane (bioGNV), gaz issu de la fermentation des déchets organiques. Et, avec 70 % de rejet d’oxyde d’azote en moins et une quasi-absence de particules fines, le GNV émet peu de polluants. Il ajoute que l’autonomie est de 350 à 400 km et que le nombre de stations ne cessent de se développer, 250 sont prévues d’ici 2020.
«Nous disposons aujourd’hui de la première flotte électrique au monde»
Daniel Dubost, directeur adjoint projet prioritaire commun logistique urbaine La Poste souligne: «Nous sommes les spécialistes du premier et du dernier kilomètre et nous avons pris en compte les enjeux de la pollution et du réchauffement climatique puisque nous disposons aujourd’hui de la première flotte électrique au monde». Il ajoute que la Poste travaille à la mise en place d’un réseau pour les commerçants et les artisans.
Christine Cabau-Woehrel, directrice générale du Grand port maritime de Marseille (GPMM) déclare: «Un port n’est pas une vieille infrastructure, c’est un espace où nous réalisons continuellement des améliorations dans un but de développement économique et environnemental car les deux sont complémentaires. Nous sommes d’ailleurs le premier port de la Méditerranée à avoir un armateur branché à quai, nous avons également mis en place un lavage des fumées à l’intérieur des cheminées. Nous nous inscrivons dans une démarche d’économie circulaire à Fos et nous travaillons sur la distribution ferroviaire, domaine qui peut fortement se développer en France».
Bruno Bocaert, chef du département stratégie et opérations ramène le débat à la voiture, lui qui travaille pour Renault Software Lab installé à Sophia Antipolis. Avec ses équipes, spécialisées dans le logiciel embarquées, il travaille sur le véhicule autonome et l’assistance à la conduite.
«Nous avons tous les ingrédients pour réussir la transition énergétique»
Chez JC Decaux ça roule à vélo et aujourd’hui au vélo électrique ce qui fait qu’outre l’offre historique du dernier kilomètre le groupe passe à la proposition de circuit bien plus long, un plus dans une alternative à la voiture individuelle. Yasir Siddiqui, directeur de la mobilité de thecamp, campus international d’innovation numérique orienté vers la ville de demain. indique que «la question des mobilités est un des axes de travail du site». Olivier Payraud, directeur du secteur industrie d’IBM présente la plateforme qui entend donner de la lisibilité aux acteurs publics, de donner des moyens pour piloter la ville. Une plateforme qui doit permettre de cartographier les zones accidentogènes. «La Belgique étudie comment le verglas modifie la dangerosité des routes». Un ensemble d’informations qui, selon Olivier Payraud, «doit permettre aussi de modifier les comportements quotidiens des automobilistes». Alors, Dominique Robin, Atmosud (ex AirPaca), apprécie la volonté de la région d’avoir «une Cop d’avance». Il considère: «Nous avons tous les ingrédients pour réussir la transition énergétique avec l’électromobilité, le gaz naturel, le bio gaz, l’hydrogène… Puis, il y a la révolution digitale qui génère de nouvelles façons de comprendre et relever les défis environnementaux. Tout cela doit nous permettre de vivre la ville autrement». Une première réunion qui en appelle d’autres pour que la COP avance, que des connexions se créent, en Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Michel CAIRE