La 77e édition du Festival d’Aix-en-Provence se tiendra du 4 au 21 juillet 2025. Cinq opéras mis en scène, dont deux créations mondiales, deux opéras en version concertante, douze concerts et récitals représenteront 44 levers de rideau. Après avoir esquissé les grandes lignes à Paris à l’automne, Pierre Audi, le directeur de la manifestation, et ses collaboratrices et collaborateurs ont présenté le programme détaillé sur le plateau de l’Archevêché aixois.
Avant de céder la parole à Pierre Audi, c’est Pierre Hermelin, le Président du Conseil d’Administration du Festival qui ouvrait le feu en rappelant qu’il avait fallu faire face à une « situation financière très compliquée» ces derniers mois. Il remerciait l’État, les collectivités et les mécènes qui, pour préserver la pérennité de l’un des principaux, voire du principal festival de musique et d’art lyrique au monde, n’ont pas hésité à augmenter leurs contributions. « Il nous faut tirer les leçons de la crise », poursuivait Pierre Hermelin qui soulignait que Pierre Audi et ses équipe œuvraient en ce sens.
Entre « désir » et « métamorphose », entre « continuité » et « renouvellement » le directeur du festival soulignait que cette édition 2025 avait été conçue avec un « budget plus resserré », et avec la volonté de « renforcer l’image et la présence du festival dans la région » et de « développer des collaborations comme celle existant déjà avec Luma Arles et celle qui voit le jour cette année avec les Chorégies d’Orange». C’est une évidence, la Culture vit des heures difficiles, parfois dramatiques comme on a pu le voir ces derniers jours avec le licenciement abrupt du chœur de l’Opéra de Toulon, et la pérennité des structures et manifestation existantes, quelles que soient leurs dimensions, nécessite des modes opératoires différents de ceux qui existaient jusqu’alors avec des mises en commun de moyens, des visions moins égocentriques, des coordinations plus efficaces… Entre autres.
Charpentier pour une première
Si Mozart est toujours en sainteté dans sa villégiature aixoise, son sulfureux « Don Giovanni » ouvrant le festival avec Sir Simon Rattle à la direction musicale et une première mise en scène à l’opéra pour Robert Icke, « Louise » de Charpentier devrait créer l’événement le lendemain à l’Archevêché. Nouvelle héroïne féminine (après Mélisande, Anaï, Lucie, Iphigénie et Dalila) à entrer au répertoire du festival, Louise sera incarnée par Elsa Dreisig, le metteur en scène Christof Loy avouant signer une mise en scène « sur mesure » pour elle. Adam Smith sera Julien, le poète bohème Sophie Koch et Nicolas Courjal donnant vie aux parents. Signalons la participation des enfants de la Maîtrise des Bouches-du-Rhône à cette production. « La Calisto » de Cavalli, métamorphose baroque tragi-comique sera incarnée à l’Archevêché par Lauranne Oliva, la néerlandaise Jetske Mijnssen signant la mise en scène, Sébastien Daucé et son ensemble Correspondances assurant la direction musicale et la partie instrumentale.
Créations mondiales
Deux créations opératiques mondiales marqueront cette 77e édition : « The Nine Jewelled Deer » (La Biche aux neuf bijoux) une composition de Sivan Eldaar avec des textes (et la voix !) de Ganavya Doraiswamy, opéra de chambre mis en scène par Peter Sellars donné à Luma Arles puis au théâtre du Jeu de Paume et « The Story of Billy Budd, sailor » (L’histoire de Billy Budd, marin), un opéra de chambre d’après Benjamin Britten qui sera donné au théâtre du Jeu de Paume; c’est aussi une création mondiale. « Les Pêcheurs de perles » de Bizet, au Grand Théâtre de Provence et « La Forza del destino » de Verdi au Théâtre Antique d’Orange sont les deux opéras donnés en version concert.
L’orchestre des Jeunes de la Méditerranée innove
Douze concerts et récitals sont aussi programmés en juillet prochain. Parmi eux ceux de l’Orchestre des Jeunes de la Méditerranée toujours placé sous la direction d’Ewan Rogister. Cette année, l’OJM innove et participera aussi à l’ouverture régionale en donnant un programme au Théâtre Antique d’Orange avec de jeunes artistes issus de la Grande Scène émergente des Chorégies et un autre programme au Grand Théâtre de Provence ainsi qu’au Festival de Vauvenargues créé en 2022 par Bilal Alnemr. Point commun de ces soirées, la Symphonie n°1 de Mahler « Titan » qui sera travaillée par les jeunes musiciens de la Méditerranée. Quant au programme d’Aix en Juin il fera la part belle aux artistes réunis sous l’égide de l’Académie, sans oublier les trois rendez-vous des Voix de Silvacane et le concert Parade(s) le 30 juin sur le cours Mirabeau. Signalons enfin qu’une soirée spéciale Cézanne aura pour cadre la Bastide du Jas de Bouffan dans le cadre de « Cézanne 2025 », là même où Clara Haskil se produisit en récital lors de la première édition du Festival en 1948. Depuis ce moment, et pendant 77 ans, le Festival a vécu de désirs et de métamorphoses, de continuité et de développement et il entend bien renouveler le bail. Pour terminer, reprenons la chute de l’édito de Pierre Audi : « Quand tout semble instable et transitoire, l’art demeure, tel une boussole fiable. « J’étais perdu sur la mer infinie, mais j’ai aperçu une voile dans la tempête, la voile qui brille tout là-bas et je suis satisfait », confie Vere à la fin de Billy Budd. Je vous souhaite une très belle édition 2025 ! »
Michel EGEA
