Publié le 30 novembre 2019 à 8h48 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h27
Ce réseau trentenaire, spécialisé dans l’appui à la création d’entreprises, s’est fixé en Provence-Alpes-Côte d’Azur un objectif : doubler son activité. Il y parvient de fait en captant davantage de subventions, lesquelles accroissent le volume du fonds de prêt et permettent de soutenir davantage de porteurs de projets. Mais aussi, en évoluant au rythme des enjeux de demain : transition écologique et numérique, nouveaux usages, nouvelle façon de vivre l’entrepreneuriat.
Voilà une trentaine d’années qu’il existe et fait sentir son action au plus près des territoires. Trois décennies qu’Initiative France joue les effets leviers, en soutenant financièrement et en accompagnant les porteurs de projets… Un acteur qui a véritablement sa place dans l’écosystème -fourni- des structures d’appui à la création d’entreprises. « L’Adie se positionne sur un public non pris en compte dans les circuits traditionnels et de petits tickets d’entrée, le réseau Entreprendre, lui, vise pour beaucoup les projets innovants et propose des prêts d’honneur plus importants que les nôtres, la BGE, quant à elle, accompagne surtout dans la phase amont et ne dispense pas de soutien financier », dépeint Thomas Deglaire, délégué régional du réseau, fort en Région d’une vingtaine d’associations estampillées Initiative et donc, de plateformes. Parmi tous ces acteurs, force est de constater qu’il sait jouer de ses spécificités. «A l’échelle régionale, nous dotons les associations de fonds, afin qu’elles octroient des prêts d’honneur aux porteurs de projet. Le but est de permettre à ces derniers de décrocher ensuite un prêt bancaire. Et la force de notre réseau, c’est sa proximité. Puisque ces associations, qui mobilisent par ailleurs des entrepreneurs bénévoles (soit près de 700 à l’échelle régionale) et société civile, sont implantées partout sur le territoire». Bref, un acteur bien identifié, ne souffrant pas de problèmes de visibilité, vers lequel les candidats à la création d’entreprise sont bien souvent guidés. Bouche à oreille ou recommandation de prescripteurs, tous les chemins mènent visiblement à Initiative France ! «Localement, les gens connaissent toujours l’association du coin. 25% des entreprises créées sont financées par une plateforme Initiative. Et suivies par ces dernières, ce qui permet de sécuriser les parcours : le taux de pérennité à trois ans de ces entreprises atteint les plus de 80% ». Trois ans étant aussi la durée de l’accompagnement prodigué par Initiative France.
Une activité multipliée par deux
De fait, le réseau a un rôle moteur localement, ce qui lui a valu un soutien renforcé de la part de la Région Provence -Alpes-Côte d’Azur . En effet, le fonds prêt d’honneur qu’elle gère s’avère être un outil délégué par la collectivité. «Elle a souhaité créer des produits financiers et a cherché des opérateurs pour les porter. Pour ce qui est du budget d’accompagnement, la Région est aussi l’un de nos principaux pourvoyeurs. Depuis la loi NOTRe, elle représente beaucoup dans nos financements…» Les subventions de fonctionnement qu’elle alloue au réseau en région ont été augmentées de 72%, «ce qui a permis d’accroître notre activité de 50% depuis 2015 ». C’est justement l’objectif d’Initiative localement, et il est en passe de le réussir. «En 2014, nous nous sommes réunis à l’aube d’une nouvelle mandature au Conseil régional, avec la volonté de déterminer comment on l’interpellait, qu’est-ce qui pouvait faire sens… Il s’agissait de construire un projet, avec, donc, cette volonté de croissance identifiée. Or, d’après les chiffres du mois d’août, nous étions la première région de France en termes d’activité», se félicite Thomas Deglaire. Et pour continuer à performer, il n’y a pas 36 recettes, mais une seule : une augmentation substantielle du fonds permettra de soutenir davantage de porteurs de projets. «La cible c’est la TPE. Elle représente plus de 94% des entreprises sur le territoire. Et nous avons bien la volonté de donner les moyens au plus grand nombre». Voilà pourquoi Initiative Paca travaille à capter davantage de subventions. « Nous sommes allés également chercher des financements européens avec le FSE. De leur côté, des associations ont fusionné pour atteindre une taille critique…» Tout cela donc, pour concourir au résultat positif que l’on sait.
Des métiers qui se complexifient
Le revers de la médaille, c’est plus de paramètres à prendre en compte et de fait, une complexité accrue dans la gestion. «Gérer des fonds publics il y a 5 ans et aujourd’hui, ce n’est plus la même chose. Il faut notamment tenir compte de la RGPD, de la lutte contre le blanchiment…» Et puis, manier des fonds européens nécessitent aussi de répondre à des impératifs stricts en termes de reporting, de traçabilité, de retours sur la façon dont ces enveloppes ont été investies. «Tout cela complexifie nos métiers, mais les sécurisent aussi». A l’échelle régionale, la délégation Initiative, c’est 3,5 équivalents temps pleins qi interviennent en soutien des plateformes locales. «Nous accompagnons les associations dans la gestion du FSE (Fonds Social Européen NDLR). Nous prenons donc en charge tout un volet accompagnement GPEC (Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences NDLR) et formation du réseau, avec près d’une vingtaine de formations liées à la stratégie. Nous nous focalisons également sur des questions de prospective, par exemple en analysant comment la data fait évoluer nos métiers.» Par ailleurs, Initiative France entend moduler le contenu de son accompagnement en tenant compte des enjeux de demain. Parmi ceux-ci, forcément, la façon d’aborder les transitions environnementale et numérique. Certaines associations du réseau se positionnent d’ailleurs déjà en ce sens… «5 à 6 plateformes se sont regroupées pour répondre à l’appel à projet régional label Sud Labs, et organiser des formations sur le digital». Autre question d’avenir, celle des tiers lieux. Puisque les entrepreneurs, notamment ceux des services, sont de plus en plus nombreux à s’intéresser à cette nouvelle tendance, et à intégrer les espaces de coworking dans leurs usages. L’idée, c’est donc de voir «comment ces lieux répondent à leurs besoins, notamment aux besoins d’implantation sur le territoire». C’est justement pour être au fait de ces questionnements-là que la délégation régionale du réseau a élu domicile à Cosens… Mais aussi, qu’il a répondu à l’appel à manifestation d’intérêt lancé en juillet dernier par le gouvernement, souhaitant voir se créer en France 300 «fabriques de territoires». Bref, des évolutions prises en compte par le réseau, qui observe par ailleurs que même la façon d’entreprendre se repense: quête de sens plus prégnante, respect des valeurs liées à l’environnement, notamment chez les jeunes, propension à être multitâches, besoin d’espaces de coworking (surtout dans les métiers de services), mais aussi nécessité exprimée d’une réduction des interlocuteurs… «On tente de répondre à ça… Voilà pourquoi que nous œuvrons aujourd’hui à un rapprochement, une fusion entre Initiative France et France active à l’échelle nationale. Cela évitera aux entreprises de multiplier les démarches». Et puis, observe Thomas Deglaire, il y a cet ultime paradoxe: «L’entrepreneur a besoin de plus de rapports humains pour contrebalancer le numérique, mais a contrario, également, d’outils numériques plus performants que par le passé».
Carole PAYRAU