Publié le 14 juin 2014 à 20h45 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2022 à 17h53
Intermittents du spectacle, personnels permanents du Festival international de Musique et d’Art lyrique d’Aix-en-Provence, ils étaient plus de 300, ce samedi 14 juin en fin de matinée, à participer à une manifestation qui, de la place de l’Archevêché jusqu’à la cour du Grand Théâtre de Provence les a conduits à la rencontre des Aixoises et des Aixois, mais aussi des -déjà- nombreux touristes. But de la manœuvre: faire savoir au public que les intermittents ne sont pas les privilégiés que certains veulent faire croire qu’ils sont; expliquer les répercussions que pourrait avoir la signature de la nouvelle convention réglant le régime des intermittents; et, enfin, informer des répercussions dramatiques que pourrait avoir une annulation du Festival d’Aix sur la structure elle-même mais aussi sur toute l’économie locale.
« Une annulation du Festival et ce serait la faillite… » Pour Bernard Foccroulle, le directeur cela ne fait aucun doute. « Il n’y a pas d’assurances qui couvrent les conséquences d’une grève et, contrairement à 2003, les collectivités, et en particulier l’Etat, n’ont pas les moyens de renflouer le navire s’il coule. » Nul doute que Bernard Foccroulle, qui était la veille en compagnie d’Olivier Py, son homologue d’Avignon, dans le bureau d’Aurélie Filipetti, la ministre de la Culture, sait ce dont il parle. Il est intéressant de savoir, aussi, que les quelque 80 000 spectateurs du Festival génèrent 65 millions d’euros de retombées économiques dont 30 millions sur le territoire du pays d’Aix, notamment dans les secteurs du tourisme et du commerce.
Ce qui est quand même étonnant, c’est que depuis 2003 les ministres de la Culture se sont succédé et les problèmes de l’intermittence sont restés. Chaque année, ou presque, à l’occasion de grands shows télévisuels : Victoires, César, Molière, on a droit à des alertes, à des sourires figés de l’autorité compétente puis, plus rien. Jusqu’à en arriver à la situation de crise que l’on connait, à l’extrême bord du précipice.
On entend dire beaucoup de choses, sur le statut des intermittents et sur les abus parfois constatés. Qui abuse ? Certainement pas les machinos, régisseurs, éclairagistes, costumières et autres métiers pratiqués par les 668 intermittents qui travaillent aujourd’hui au festival d’Aix (70% du personnel). Leur salaire moyen tourne autour de 1 200 euros par mois. Et sur cette base la nouvelle convention voudrait rogner leurs indemnités lorsqu’ils ne travaillent pas, jusqu’à la perte d’un mois de revenu. Alors, si ceux que nous avons rencontré ce samedi, tout au long de la manifestation nous ont dit leur attachement au Festival d’Aix, leur envie de poursuivre le travail entamé depuis plusieurs semaines déjà pour certains, c’est la décence de leur vie quotidienne qui compte avant tout. Et une grande majorité d’entre eux est prête à aller jusqu’au bout. Simon McBurney, était hier dans la manifestation, tout comme de nombreux artistes. Pour le metteur en scène de La Flûte enchantée, qui devrait ouvrir le festival ce 2 juillet prochain, c’est une cause juste que celle des intermittents. Mais au-delà, il disait combien il était inquiet pour l’avenir de la culture un peu partout dans le monde. Un autre cri d’alarme.
Pour l’heure, en ce qui concerne le conflit des intermittents, la semaine qui va s’ouvrir s’annonce cruciale. Souhaitons que toutes les parties soient conscientes des enjeux qui sont liés à la résolution, ou non, de ce conflit.
Michel EGEA