Publié le 1 mai 2019 à 22h28 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 11h44
«Souvenez vous que cela fut ! … A vous d’assumer la relève. A vos enfants, à vos amis, transmettez-leur notre message.» Denise Toros Marter, déportée à 16 ans à Auschwitz, dans son poème Hantise, lance un appel solennel à l’ensemble des invités présents à la cérémonie organisée au Wagon du Souvenir du Site-mémorial du Camp des Milles à l’occasion de la Journée Nationale du souvenir des victimes et des héros de la déportation devant de nombreux porte-drapeaux et personnalités.
Une transmission aussi pour ces jeunes du Conseil municipal d’Aix-en-Provence, des adolescents présents à ce temps de recueillement et qui ont souhaité ainsi «ne pas oublier, se souvenir pour ne pas reproduire les horreurs passées. Celles qui déshumanisent l’Homme. Celles qui lui font perdre sa raison, sa compassion. Les jeunes se souviennent». Ces mots ont pris une intensité particulière après la lecture, toujours bouleversante, des noms de la centaine d’enfants juifs déportés du Camp des Milles vers Auschwitz par Lucas Maffr, jeune lycéen, dont l’émotion était palpable. Pour ne pas les oublier, avec leurs parents, soit plus de 2000 hommes, femmes et enfants juifs, partis du Camp des Milles. Et pour rendre hommage également à tous ceux qui ont su réagir avec courage et humanité, les noms des Justes ayant œuvré au Camp des Milles furent lus par la jeune Valentine Sacquiepée. Alain Chouraqui, président de la Fondation du Camp des Milles-Mémoire et Éducation, insista sur «l’atout que n’avaient pas nos anciens car nous savons que cela est arrivé et, si nous regardons bien, nous savons aussi comment c’est arrivé. (…) notre chance aujourd’hui est de pouvoir réagir avant». Il alerta également sur «le développement rapide des menaces contre la paix en Europe à partir du moment où les extrémismes nationalistes sont au pouvoir». Et s’adressant aux jeunes gens présents : «Il n’y a pas d’outil miracle contre ce mal, il y a la somme de tout ce que vous, nous pouvons faire. Il dépend de chacun d’entre nous que les horreurs soient à nouveau possibles…ou pas». Dan Amiach, Président de la communauté Israélite d’Aix-en-Provence déclara : «Nous devons faire ce travail de compréhension -réalisé au Mémorial des Milles- et pas simplement de mémoire, parce qu’autrement, comme le dit Elie Wiesel, ‘’les forces d’Auschwitz sont toujours à l’œuvre’’…Elles frappent aujourd’hui contre les synagogues mais aussi contre les églises et les mosquées». Avant la cérémonie de dépôts de gerbe, Serge Gouteyron, au nom de l’État, lut le message des Associations et Fondations nationales d’anciens Internés, Déportés et Résistants, faisant part de leur «légitime inquiétude à l’égard d’une Europe aujourd’hui divisée, traversée et habitée par la résurgence de mouvements nationalistes». «sauvegarder la mémoire de la déportation où la souffrance se mêle à l’espérance, doit faire prendre conscience, avant qu’il ne soit trop tard, de l’indispensable solidarité entre les peuples épris de liberté, pour l’emporter sur toutes les formes d’obscurantisme, de fanatisme, de racisme, d’antisémitisme, de xénophobie». Message d’autant plus d’actualité alors que la veille un nouvel attentat antisémite faisait des victimes en Californie. Cette commémoration s’est poursuivie par un autre temps de recueillement au Centre-ville d’Aix où un hommage particulier fut rendu place des Martyrs de la Résistance aux déportés et fusillés de la Résistance aixoise. Afin d’apprendre de l’expérience du pire que furent les génocides du XXe siècle, le Site-mémorial du Camp des Milles développe chaque jour ses actions de mémoire, d’éducation et de culture. Avec, par exemple, ces derniers jours, la représentation de l’opéra l’Empereur d’Atlantis de Victor Ullmann, assassiné à Auschwitz, devant plus de mille quatre cents élèves. Point d’orgue d’une action de médiation culturelle et éducative de grande ampleur contre l’antisémitisme, les racismes et les extrémismes.
O.B