Publié le 22 janvier 2019 à 23h13 - Dernière mise à jour le 28 octobre 2022 à 20h44
«Nous mettons en place de multiples initiatives pour répondre au besoin de requalification en profondeur du grand centre-ville et il va falloir inscrire ces efforts dans la durée», lance Julien Denormandie, ministre de la Ville et du Logement en revenant, ce 22 janvier sur sa visite à Marseille commencée la veille, la troisième depuis le drame de la rue d’Aubagne. Une visite lors de laquelle il a réaffirmé auprès de Jean-Claude Gaudin, le maire de Marseille et Martine Vassal, la présidente de la métropole Aix-Marseille Provence et du département des Bouches-du-Rhône, le soutien de l’État dans ce dossier, tant pour répondre à l’urgence du relogement que sur le long terme. Il précise à ce propos: «Marseille est une ville populaire qui doit le rester. Il y a des enjeux très fort en matière de localisation des logements sociaux et nous y prêtons une très grande attention. Le projet urbain doit conforter le logement social dans l’ensemble de Marseille. Nous appelons la mixité sociale de nos vœux». Il a également rencontré les propriétaires privés, les bailleurs sociaux et les assureurs qu’il surveille tout particulièrement. Il insiste aussi sur les réformes entreprises avec la ministre de la Justice pour rendre plus efficace la lutte contre les marchands de sommeil.
Julien Denormandie a insisté sur une situation à Marseille qui reste aujourd’hui «très préoccupante». Près de 1400 personnes sont encore aujourd’hui dans l’attente d’une réponse. «Je pense également aux entreprises qui étaient abritées dans ces immeubles et également aux propriétaires concernés car la plupart sont certainement de bonne foi. C’est d’abord à toutes ces personnes, à tous les Marseillais meurtris par les événements que nous devons apporter des réponses rapides».
«Le rôle de l’État est de s’assurer que tout soit fait»
Face à cette situation, il considère que «le rôle de l’État est de s’assurer que tout soit fait, je dis bien que tout soit fait, pour trouver des solutions adaptées à chacun. Ce contexte difficile appelle à la mobilisation de tous, chacun dans le respect de ses compétences. Mais ces compétences doivent être également pleinement exercées».
Puis aborde la question de l’accompagnement vers un relogement. «l’État a mis en place avec la mairie de Marseille une mission d’accompagnement des ménages, ce qu’on appelle une Mous, pour leur trouver des logements susceptibles de les accueillir, de façon pérenne ou pour quelques mois, en relais des services municipaux. Près de 3M€ sont consacrés à cette mission, menée par Soliha Provence». Il note que plus de 200 propositions de relogement ont ainsi été faites au cours des dernières semaines, «même si les ménages ne les acceptent pas toujours puisque environ 80 propositions ont été acceptées à ce stade, pour une soixantaine de ménages relogés, et 60 refusées». Il importe donc à ses yeux: «d’amplifier ce mouvement, formuler des propositions plus en phase avec les besoins des sinistrés». Il se félicite du travail accompli par les bailleurs sociaux du département qui ont mis à la disposition de la Mous et donc des sinistrés plus de 300 logements : «Ils ont pleinement joué le jeu depuis le début de la crise». Puis aborde la question du parc privé et de la rue de la République avec les «75 logements que nous allons mobiliser à très court terme auprès de Primonial et Covivio pour effectuer des relogements temporaires ou pérennes, en attendant plusieurs dizaines d’autres dans les prochains mois, qui sont actuellement l’objet de travaux». Il en appelle «à tous les propriétaires qui disposent d’un logement vide ou qui va se libérer dans le centre-ville, qu’ils se fassent connaître auprès de nos services pour que nous puissions voir s’ils répondent aux besoins d’une famille».
«Renforcer l’accompagnement»
Il met en avant ses rencontres avec les associations de sinistrés. «Nous maintenons un cadre d’écoute et de travail mutuels (…). Ces discussions ont été très constructives, et viennent utilement compléter les points hebdomadaires qui sont organisés à ma demande par la Préfète Madame Assidon». Il constate à ce propos: «Toutes les associations insistent sur la nécessité de renforcer l’accompagnement. J’ai ainsi pu leur annoncer que nous finalisions, sous l’égide de la Ville, la mobilisation de l’association France Horizon, qui prendra le relais des équipes sur le site de Beauvau à compter du 1er février avec une montée en charge progressive dans les semaines suivantes».
Le ministre a également pu rencontrer des assureurs «Je leur ai demandé de faciliter et d’accélérer les contacts et les indemnisations, et lorsque les procédures prennent du temps d’apporter un premier soutien matériel aux sinistrés, dans l’attente de la détermination des diverses responsabilités». Il en vient à sa rencontre avec Jean-Claude Gaudin et Martine Vassal lors de laquelle il a été question d’enclencher une dynamique partenariale de long terme avec l’ensemble des acteurs du territoire «pour que demain, la situation que nous connaissons ne puisse plus se reproduire et que sur l’ensemble du grand centre-ville de Marseille, tous les îlots à requalifier le soient durablement». Cela doit allier, juge-t-il: «Le logement bien entendu, mais aussi les commerces, l’aménagement des abords des bâtiments et les équipements publics et accompagner les populations concernées». Il met en avant la nécessité «de disposer d’une vision d’ensemble des îlots et des bâtiments dégradés à requalifier, qui ne sont pas uniquement concentrés aux abords de la rue d’Aubagne». Il dévoile avoir proposé hier à Jean-Claude Gaudin et Martine Vassal de poursuivre ce travail et, dès que les expertises seront finalisées sur les 1 300 immeubles déjà signalés, «nous lancerons, en lien avec les collectivités, une seconde phase d’étude visant à cartographier précisément les îlots à enjeux et identifier d’éventuels autres situations de bâtiments dégradés», assure-t-il. Ce sont ensuite des actions immédiates de traitement de l’habitat dégradé, qui seront lancées début février, lorsque la ville en aura délibéré. «Nous signerons en effet une convention avec l’Agence Nationale de l’Habitat, l’Anah, qui permettra notamment de financer 100 % des travaux d’urgence de réhabilitation d’une centaine de bâtiments prioritaires dans les 3 ans qui viennent». Elle devrait, selon le ministre, «enrayer la dégradation du centre-ville, conforter un certain nombre de bâtiments, permettre à leurs habitants de rester chez eux et en reloger d’autres. Elle permettra aussi de lancer des études approfondies pour définir les quartiers prioritaires qui pourront bénéficier de cette aide à plus long terme.»
L’Anru tiendra le 6 février un comité d’engagement
De même, l’Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine (Anru) -qui bénéficie de financements nouveaux passant ainsi de 5 à 10 milliards – est mobilisée pour accompagner les collectivités dans les projets qu’elles développent à l’échelle des quartiers prioritaires de Marseille, dont le centre-ville. «J’ai demandé aux élus que ces projets soient définis au plus tard d’ici la fin de l’année 2019», prévient-il. Un point d’étape sera réalisé dès l’été sur cette programmation. «Nous devons sans attendre, lancer les actions qui peuvent démarrer. L’Anru tiendra donc dès le 6 février un comité d’engagement qui permettra d’examiner les sollicitations d’opérations anticipées qui ont été présentées cette semaine par la Ville et la Métropole». Ce sont près de 50M€ qui devraient pouvoir être d’ores et déjà alloués. «Ils s’ajouteront aux 240 M€ que j’avais annoncés précédemment et financeront notamment des opérations qui sont prêtes à démarrer sur les grandes copropriétés dégradées de Kallisté et de Corot, ou par exemple, sur l’aménagement de deux centres sociaux du centre-ville du quartier de Noailles». Il souhaite une vision d’ensemble des études conduites dès le printemps et qu’une proposition de programme d’action structuré puisse être soumis, «afin qu’avec la Ville et la métropole, nous soyons en capacité d’arrêter notre stratégie d’intervention, ce sera un Programme Partenarial d’Aménagement (PPA)» et de mettre en place les outils pour y parvenir. Il pense notamment à une société d’aménagement commune «dont nous avons défini ensemble les contours». Il déclare également avoir demandé «aux collectivités et à l’Établissement Public Foncier d’État d’accélérer le traitement opérationnel sur de nombreux bâtiments dégradés, quand nous pouvons intervenir dès aujourd’hui». Concernant les tickets de transport dont la ville avait cessé le paiement il cède la parole au Préfet de région, Pierre Dartout : «Nous avons appris cette décision d’arrêter le paiement des tickets de transport, nous l’avons regretté puis nous avons reçu un courrier nous demandant un avis de légalité sur ce paiement, nous n’avons fait aucune observation au titre de la légalité et le système de gratuité reprend donc».
Michel CAIRE
|Accentuation de la lutte contre les marchands de sommeil
Julien Denormandie, a insisté sur la lutte contre les marchands de sommeil, un phénomène qu’il qualifie de «véritable fléau que l’on voit s’accroître dans notre pays». «Depuis plusieurs mois, avec la garde des Sceaux, annonce-t-il, nous travaillons pour renforcer l’arsenal juridique et avoir les mêmes actions contre lui que contre un trafiquant de drogue. Aujourd’hui le sport national consiste à récupérer les loyers en liquide pour dire en cas de contrôle que l’on n' »a pas d’argent. Et bien nous allons pouvoir maintenant utiliser les outils de la présomption de revenus pour les frapper à la caisse. De même, jusqu’à présent, en cas expropriation, un marchand de sommeil recevait une indemnité. A Paris un marchand de sommeil a ainsi perçu 6M€ d’euros. Cela ne pourra plus se produire, les indemnités seront confisquées et les procédures seront accélérées.»|