Publié le 6 août 2016 à 20h26 - Dernière mise à jour le 28 octobre 2022 à 15h32
Tchaïkovsky, Copland et Gershwin au programme d’un même concert pouvait étonner. Si la deuxième partie, 100% américaine, était logique, quel était le lien avec le compositeur russe ? Réponse apportée au public par le maestro Foster après la pause: le 5 mai 1891, c’est Tchaïkovsky qui inaugurait le Carnegie Hall, à New-York. Une fois la connexion effectuée, il n’en fallait pas plus pour offrir aux mélomanes ce programme original qui allait permettre à certains de découvrir quelques pièces d’Aaron Copland.
Pour sa première au cœur du parc de Florans, mythique salle en plein air du festival de La Roque d’Anthéron, sous la direction de son directeur attitré Lawrence Foster, l’Orchestre Philharmonique de Marseille allait plus que séduire ; il prouvait définitivement qu’il était entré dans la cour des grands, confirmant sa qualité à tous les pupitres et sa cohésion. Tant et si bien qu’à l’issue du concert, René Martin, le directeur de la manifestation, confirmait qu’il avait l’intention de travailler à nouveau avec lui et avec son directeur musical dans les années à venir. De quoi réjouir Maurice Xiberras, le directeur de l’Opéra de Marseille, Ilaria Bandieri, l’administratrice de l’orchestre et Sophie Duffaut, bras droit «artistique» de Maurice Xiberras, tous enchantés de la soirée qu’ils venaient de vivre.
Soirée débutée par le concerto pour piano et orchestre n°1 de Tchaïkovsky avec David Kadouch en soliste. Lawrence Foster avait oublié les bouteilles de sirop à la maison, décidant de livrer une interprétation hyper dynamique et très tendue de cette œuvre, profitant de la cohésion de son orchestre, attentif et totalement aux ordres. Une densité à laquelle a adhéré David Kadouch, éclairant la partition avec les couleurs de son Steinway, en évitant d’être couvert par la puissance de l’orchestre. Cette interprétation du concerto de Tchaïkovsky, puissante et serrée, fut très bien accueillie par le public, David Kadouch faisant ensuite apprécier la délicatesse de son toucher avec un merveilleux «Clair de lune» de Debussy et une pièce de Schumann, donnés en bis.
La deuxième partie de la soirée fut donc américaine et débutait par l’interprétation de «Rodeo» de Copland. Billet simple pour les plaines de l’Ouest et pour écouter cette musique qui allait inspirer les compositeurs chargés de travailler pour les grands westerns portés à l’écran. Cinémascope et pop corn au parc de Florans où, sous la baguette du maestro Foster, les musiciens marseillais se sont beaucoup amusés. Rythme, puissance et précision ont présidé cette livraison du ballet de Copland donné en première audition pour beaucoup. Un peu désarçonné, ce qui est normal en matière de «Rodeo», le public saluait poliment l’interprétation. Suivait «Un Américain à Paris» de Gershwin. Un sommet ! «Je pense que c’est la plus belle interprétation de l’œuvre que j’ai dirigée dans ma vie », nous confiait Lawrence Foster à l’issue du concert. Une interprétation généreuse, lumineuse, élégante servie par des cuivres étincelants, des percussions précises, des bois puissants et des cordes tendres, colorées, enivrantes. Depuis sa plus tendre enfance, le maestro Foster a biberonné du Gershwin, et sa lecture de la partition est idéale, sensuelle et spirituelle. Un très original et beau moment de musique pour cette première de l’Orchestre Philharmonique de Marseille sous le ciel de la Roque d’Anthéron.
Michel EGEA