La force dramatique de Madame Butterfly à l’opéra de Marseille…

A l’occasion du centenaire de la mort de Puccini, l’opéra de Marseille s’offre l’un des chefs-d’œuvre du répertoire : Madame Butterfly. Une histoire d’amour entre une jeune geisha et un lieutenant américain. Ce dernier l’abandonne mais l’adolescente l’attend, est persuadée de son retour. Il reviendra mais pas dans les conditions espérées. Tout le drame se joue là.

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(Photo Joël Barcy)

 Deux cultures

Madame Butterfly confronte deux cultures : nippone et américaine. Après une longue période d’isolationnisme le Japon s’ouvre à l’occident au milieu du XIXe, les bateaux américains croisent dans les ports. Les jeunes geishas, qui veulent échapper à une vie misérable, fréquentent souvent les marins US. Les choses ne vont pas beaucoup plus loin. Dans le cas de la jeune Cio Cio San (Butterfly) la situation est plus complexe. Elle renie sa famille et les traditions pour épouser un officier américain qui finalement la délaisse.

Un double aveuglement

« La force dramatique de Madame Butterfly repose sur un double aveuglement, résume Emmanuelle Bastet, metteuse en scène. Celui de l’officier américain inconséquent. Il est jeune, fougueux, amoureux. Il épouse Butterfly mais c’est une passion volage ». De son côté Butterfly est aveuglé par l’homme qui l’aime et va la sauver et lui permettre d’échapper à la misère. « Son aveuglement fait qu’elle ne voit pas l’inconséquence de sa conduite. Elle est enfermée dans sa foi, dans la volonté de croire au retour de son mari américain ». Elle l’attend des années. Une attente qui confine à une sorte de folie.

Butterfly n’entend plus rien

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(Photo Joël Barcy)

Persuadée du retour du lieutenant Pinkerton, Butterfly est sourde à tous les conseils. Elle éconduit des amants potentiels. Refuse d’écouter sa précieuse servante Suzuki. « Suzuki a complètement conscience de ce qui se passe, analyse Eugénie Joneau qui incarne Suzuki.  Elle sait, voilà, que les Américains sont comme cela. Elle est plus vieille que Butterfly et elle a plus d’expérience. C’est très tragique, Suzuki est présente durant tout l’opéra et elle assiste à cette passion, à ce délire dans lesquels s’enferme Butterfly ».

Un décor épuré

Reniée par ses parents, Butterfly retombe dans la pauvreté mais continue de croire que l’officier la rejoindra. « J’ai voulu mettre en scène l’attente, confie Emmanuelle Bastet. Le décor est dépouillé, pure comme au Japon. La scénographie transcrit le voyage dans l’univers mental de Butterfly, proche de la folie ». Au bout de 3 ans Pinkerton est finalement annoncé. La jeune geisha croit qu’il vient la rejoindre. Elle revêt sa robe nuptiale, enveloppe son appartement de fleurs, entre presque en transe.

Une fin tragique

Hélas Pinkerton n’est pas seul. Il est venu avec sa femme américaine et compte récupérer le fils qu’il a eu avec Butterfly. Tout s’effondre. Son amour n’est pas venu pour elle et il lui emporte le bien le plus cher. Désespérée et voulant offrir une meilleure vie à son fils, Butterfly accepte. Dès lors elle n’a plus qu’une solution : la mort. Les cloisons ajourées se referment. Butterfly se tue selon le rite japonais. Elle puise dans ses dernières forces et rejoint Pinkerton avant de mourir dans ses bras.

Puccini avait été touché par ce fait divers. Il en a fait une grande tragédie. « Ma Butterfly est l’opéra le plus sincère et le plus expressif que j’aie jamais conçu », dira-t-il.

Reportage Joël BARCY

Madame Butterfly, opéra de Marseille du 14 au 24 novembre – Plus d’info et réservations : opera.marseille.fr/

Il est à noter qu’Eugénie Joneau (Suzuki)  se produira le 23 novembre au foyer de l’opéra à 12 heures. Révélation « artiste lyrique » aux victoires de la musique 2022, la mezzo-soprano invite à un voyage au cœur de la musique classique et du répertoire espagnol.

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