C’est un endroit dont on ne voudrait pas parler pour le garder très égoïstement pour soi. Une terrasse au bord de l’eau avec vue sur les pointus et quelques embarcations plus modernes, loin des bruits de la ville et, dans l’assiette, la cuisine ensoleillée comme on l’aime.
A Marseille, le petit port de la Madrague, à Montredon, sur la route des Goudes, est typique de ces endroits qui sont là depuis la nuit des temps. Et même si quelques verrues modernes ont poussé, de part et d’autre, à la place des cabanes de pêcheurs qui devaient y être légion, le charme et la tranquillité du lieu en font un petit coin de paradis. Côté terre, le port est fermé par une grande terrasse, celle du restaurant « Au bord de l’eau », et sa véranda vitrée pour affronter les jours de mistral.
Les habitués connaissaient Nicolas, l’ancien propriétaire ; c’est aujourd’hui Bruno Berengier qui lui a succédé. Les deux hommes sont amis et la cession s’est faite naturellement. Passé par l’École Hôtelière d’Avignon, Bruno Berengier a appris les bases du métier auprès du chef étoilé Franck Gomez à La Table du Comtat, à Séguret sous les dentelles de Montmirail, avant de poursuivre comme chef Chez Le Garde à Vauvenargues. Après avoir redonné vie à des institutions marseillaises comme La Bonne Mère et Chez Sauveur, il a repris les commandes du restaurant en ce début d’année avec une idée en tête: proposer une cuisine sincère, conviviale et pleine de soleil; une cuisine marseillaise, quoi !
La soupe de poisson est exemplaire de cette volonté. Les poissons de roche, c’est Eric, un des pêcheurs de la Madrague, qui les fournit ici deux fois par semaine. Ils sont travaillés à l’ancienne et offrent une soupe riche de matière et de saveurs. On est loin des erzats liquides servis parfois en lieu et place de « la » soupe traditionnelle. Croûtons et rouille maison l’accompagnent et, si elle n’est pas là, n’hésitez pas à demander votre gousse d’ail pour frotter les croûtons… Moules farcies, supions frits, salade de poulpe : ne cherchez pas la faille, tout est frais et fait maison. Quant au loup, certes, il est d’élevage, mais pas n’importe lequel, celui du Frioul, bio ! Et tout le reste est à l’avenant…
Bien entendu, Bruno Berengier a importé ici les pizzas « comme Chez Sauveur » avec une moitié-moitié qui est une dinguerie, anchois goûtus marinés, et non au sel, d’un côté et emmental de Savoie de la « Meulerie » estampillé alpages, délectable, de l’autre.
En cuisine, c’est chef libanais Khalil Harb, passé par « Louloute » et « Beyit Jedo » à Paris, qui officie. Maître de la cuisine au grill, l’homme de l’art est ici comme chez lui, surfant sur les influences méditerranéennes pour en tirer le meilleur. Et ce meilleur, c’est dans l’assiette qu’il est !
Les desserts sont aussi de la même veine et le service joyeux et efficace. What else ? Y aller, simplement.
Michel EGEA
«Au bord de l’eau» , Port de la Madrague de Montredon – 15, rue des Arapèdes, Marseille (8e) – Tél. : 04 91 72 68 04. Plus d’info: auborddeleau.eu
