Publié le 24 novembre 2019 à 22h10 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h26
Qui connaît Lewis Caroll ? Que sait-on de la personnalité de ce personnage singulier ? En proposant avec «Lewis versus Alice» la confrontation, sur scène, de l’écrivain et de sa principale Héroïne, Macha Makeïeff apporte-t-elle des réponses à ces questions ? Ou éclaire-t-elle simplement quelques lumignons pour faciliter à chacun l’entrée dans le terrier et le passage à travers le miroir ? Son spectacle, créé au Festival d’Avignon l’été dernier, est présenté à La Criée à partir de mercredi. «Parler de Lewis Caroll, c’était parler d’enfance», confie-t-elle. Troisième d’une fratrie de onze, élevé rigoureusement dans un presbytère, il y a chez lui une volonté d’arrêter le temps ; quelque chose se noue dans cette enfance qu’il ne veut pas quitter, un peu comme si c’était à partir de cet arrêt du temps que l’on devait regarder le monde.» Gaucher, bègue, à moitié sourd, mal dans sa peau, Lewis Caroll aimait la société des enfants beaucoup plus que celle des adultes. «D’ailleurs, lorsqu’il était avec les enfants, il ne bégayait plus, poursuit Macha Makeïeff. Il avait aussi un effroi de la métamorphose, celle du corps des enfants, celle du corps de la mère enceinte qui produit des êtres. Puis il était traversé par des fantasmagories de tous ordres. En travaillant sur la pièce, je n’ai pu m’empêcher de penser au tableau du Greco que l’on peut voir à Tolède, « L’enterrement du comte d’Orgaz ». Il y a le mort, encore jeune, les notables derrière le corps et devant il y a un enfant qui nous regarde et nous montre le corps en questionnant est-il endormi ou est-il mort, est-ce la vie ou est-ce un rêve ? Et au dessus il y a un bazar absolu, liberté, fiction, rêverie… Alors se pose la question de savoir quelle est la part d’échappatoire dans le surnaturel.» Macha Makeïeff n’hésite pas, à parler de son enfance et de ce frère, Georges, aux côtés de qui elle se trouvait et qui a sombré dans une psychose enfantine, basculé dans le silence et le refus du monde, ne faisant qu’écrire. «Pour moi, il était impossible de faire l’impasse sur le surréalisme. On se souvient qu’Antonin Artaud, jaloux, avait accusé Lewis Caroll de plagiat par anticipation. Ce spectacle, c’est le récit de la traversée de la vie de Lewis Caroll ; c’est un objet qui ne conclut jamais, un éclatement du rêve qui fait que le public reste en suspension, désorienté, le jeu est cassé, les codes aussi ; blanc veut dire noir et réciproquement si on est le maître des mots. J’ai aussi essayé de rester dans la légèreté et la musicalité… Et que le rêve soit un lieu de liberté.»
Michel EGEA
Pratique. « Lewis versus Alice » Un spectacle de Macha Makeïeff du 27 novembre au 7 décembre à la Criée Théâtre National de Marseille.
Renseignements et réservations au 04 91 54 70 54 theatre-lacriee.com