Publié le 20 avril 2016 à 23h57 - Dernière mise à jour le 28 octobre 2022 à 15h13
Marseille, il est midi, le 5 avril 2016. Nouvelle mobilisation contre le projet de loi qui doit réformer le droit du travail. Plus d’un millier de personnes défilent entre la Canebière et la Préfecture. Puis, un groupe se détache et remonte la rue Paradis pour s’arrêter devant le Consulat général d’Israël à Marseille. Alors des manifestants se mettent à crier : « Vive la Palestine ! Palestine vaincra, Israël mourra ! » Dans le même temps, et à moins d’une centaine de mètres, c’est le siège de la fédération socialiste des Bouches-du-Rhône qui est violemment pris à parti. La façade en porte encore les stigmates, avec des inscriptions telles que « socioterroristes ».
Des droits et des devoirs !
La France est une démocratie où les citoyens ont le droit de manifester et de marquer leur désaccord avec le gouvernement. Mais si l’on a des droits en tant que citoyen, on a également des devoirs. On ne peut ni tout dire ni tout faire. Après les violences de la semaine dernière, les mots prononcés comme les amalgames ne sont pas neutres et ne servent en rien la cause des manifestants.
Quel rapport existe-t-il entre la loi sur la réforme du code du travail et le terrorisme ?
Le terrorisme, malheureusement, est une réalité. Il a laissé sa marque terrifiante chez nous en France à plusieurs reprises, et de par le monde en ce sanglant mois de mars. Et les forces de police déjouent régulièrement des projets d’attentats sur notre sol car nous sommes en guerre, raison de l’instauration de l’état d’urgence. On ne peut donc pas invoquer impunément ce drame en vain, même si l’on est en désaccord profond avec ce projet de loi.
Pourquoi y mêler le conflit israélo-palestinien ?
J’ai beau chercher, je ne trouve absolument aucun lien rationnel entre un projet de loi français et un conflit se déroulant sur un autre continent. Quand bien même, y en aurait-il un, et que l’on soutienne la cause palestinienne, pourquoi appeler à la destruction d’un État démocratique reconnu par l’ONU ?
N’y-a-t-il pas d’autres drames sur la planète auquel faire référence ? La liste est pourtant longue, il n’est qu’à penser à la Syrie avec ses 4 millions de réfugiés, aux Kurdes, aux chrétiens d’Orient, en Europe également, avec la Crimée ou Chypre membre de l’UE et dont une partie du territoire est occupée par la Turquie depuis 1974.
NON à la division et OUI au vivre ensemble !
Le progrès social ne peut s’édifier par la violence et la division, en montant les Français les uns contre les autres. Les leaders des manifestations contre la «loi travail» ne peuvent en aucun cas cautionner de tels agissements. Aussi, pour rester crédibles, ils doivent le plus rapidement possible se désolidariser et condamner ceux qui en sont les auteurs.
A ceux qui divisent, je préfère les femmes et les hommes de bonne volonté qui prônent le vivre ensemble. A l’image du dîner républicain de l’amitié judéo-musulmane du 30 mars 2016, où l’Imam Hassan Chalghoumi a remis, « l’olivier de la Paix » à Benjamin Amsellem, l’enseignant juif, victime d’un attentat à la machette, peu de temps auparavant. C’est un acte fort et courageux qui dit non à la violence, non au terrorisme et oui au vivre ensemble. Et comme l’a dit très justement le Préfet de Police, présent à la cérémonie, «c’est cela le vrai visage de Marseille» !
(*) Hagay Sobol est Médecin et Professeur des Universités. Très investi dans le monde associatif, il milite depuis de nombreuses années pour le dialogue interculturel. Élu, il est conseiller PS dans les 11e et 12e arrondissements de Marseille, et Secrétaire Fédéral chargé des coopérations en Méditerranée.