Publié le 10 novembre 2018 à 20h21 - Dernière mise à jour le 1 décembre 2022 à 14h54
A la suite de la venue du Président de la République de Turquie, Recep Erdoğan, le Conseil de Coordination des organisations Arméniennes (CCAF) a tenu à s’exprimer dans une lettre adressée au Président de la République française, Emmanuel Macron
« Monsieur le Président de la République,
Vous avez annoncé au début de l’année 2018 que 80 chefs d’État et de gouvernement représentants tous les pays belligérants de la Grande Guerre seront conviés en France le 11 novembre 2018 pour célébrer le centième anniversaire de la fin de la Première Guerre mondiale, sans toutefois préciser lesquels. Vous avez déclaré : «Je souhaite qu’une grande rencontre soit organisée pour que l’histoire ne bégaye pas». Vous avez évoqué l’importance du devoir de mémoire et annoncé que «2018 ne sera pas une année de triomphalisme, mais un miroir tendu à notre monde d’aujourd’hui qui si souvent choisit la radicalité, la brutalité, la violence, comme réponse». Si le CCAF ne peut que souscrire à ces propos, il s’inquiète cependant que leur portée ne soit dénaturée par la présence à cet événement d’autorités qui, plutôt que de tirer les leçons du passé et d’en condamner les crimes, s’enferment dans le non-dit, voire le déni. Tel est en particulier le cas de la Turquie dont on connait le négationnisme d’État, à l’intérieur comme à l’extérieur de ses frontières, à l’égard du premier génocide du XXe siècle perpétré à la faveur de la Première Guerre mondiale. Aussi nous paraît-il que sa présence contredirait l’esprit de ce centième anniversaire dédié au devoir de mémoire et constituerait au contraire une caution à cette attitude outrageante envers les victimes. Elle serait à n’en point douter vécue comme une ultime offense au million et demi de morts de l’entreprise d’extermination, qui n’ont pour sépultures que la mémoire des rescapés et de leurs descendants, dont les 500 000 Français d’origine arménienne.
Monsieur le président,
Nous voulons espérer que la célébration du 11 novembre ne sera pas entachée par la venue d’un dirigeant de cet État, dont la présence ne ferait, dans ces conditions, que jeter du sel sur les plaies déjà à vif, parce que rouvertes en permanence par le négationnisme turc qui s’exporte jusque sur le territoire national. Nous vous demandons de tout mettre en œuvre pour prévenir de nouvelles brûlures, sauvegarder l’esprit de cette commémoration et empêcher qu’elle ne se transforme, à son corps défendant, en une sorte de sacre des assassins. »