Publié le 14 août 2013 à 22h32 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2022 à 16h07
Manuel Valls, le ministre de l’intérieur, était ce mercredi 14 août à Marseille, pour faire le point sur la lutte contre la drogue et cela, alors que la veille une opération de police avait été menée dans la cité des Oliviers, dans les quartiers Nord de Marseille. « Un lieu tristement célèbre pour avoir été le théâtre, en février dernier, d’un règlement de compte mortel lié au trafic de drogue ». Le ministre, alors que l’affaire ne cesse de prendre de l’ampleur, n’a pas manqué de répondre aux questions concernant ses rapports conflictuels avec Christiane Taubira, la ministre de la Justice (*). « J’ai tenu à venir saluer le travail des policiers qui ont démantelé un réseau très actif, générant des ventes quotidiennes de plusieurs kilos de cannabis. Six personnes, parmi lesquelles les responsables du trafic, des revendeurs et des guetteurs, ont été interpellées. Elles seront bientôt présentées à la justice. Je relève que trois de ces trafiquants sont mineurs ou tout jeunes majeurs ».
« Il faut le dire et le répéter : oui la drogue détruit »
Pour le ministre, le contexte de cette affaire illustre bien « les dégâts causés par la drogue. Des jeunes qui n’hésitent plus à s’entretuer pour le contrôle du marché. Des habitants des quartiers déjà lourdement frappés par la paupérisation, pris en otage par des dealers qui s’approprient l’espace public et imposent la loi du silence. Des mineurs appâtés par l’argent facile, qui désertent les salles de classe, s’engagent dans la criminalité et compromettent gravement leur avenir. Et, derrière cela, des familles brisées par l’addiction, par le repli sur soi, ou pire par le décès de l’un des leurs ».
Et Manuel Valls d’assurer: « Il faut le dire et le répéter : oui la drogue détruit. Elle détruit le vivre-ensemble, elle détruit la jeunesse, elle détruit ce qui fonde note pacte républicain. Face à ce fléau, aucune résignation n’est possible ».
Puis de préciser que ce travail contre la drogue s’effectue à tous les niveaux : « Il cible les trafics de quartier. C’est un travail d’investigation de proximité très difficile à mener. Les forces de l’ordre s’attaquent également aux réseaux de grande envergure. Je viens également de féliciter les policiers qui ont démantelé en juin dernier, à la cité de la Castellane, le trafic le plus actif de Marseille ».
Trafic qui rapportait « au moins 50 000 euros par jour à ses organisateurs ». Au total « 23 interpellations ont été effectuées, dont 14 ont donné lieu à des incarcérations, tandis que 100kg de cannabis et 1 340.000 euros- un record – ont été saisis ». Il tient alors à souligner : « Cette affaire consacre la nouvelle stratégie d’intervention de la police judiciaire, dont l’action est dorénavant ancrée au cœur des quartiers ».
« 26 millions d’euros ont été saisis sur ces six premiers mois de l’année 2013 »
Puis de mettre en avant un certain nombre de chiffres afin de signifier la pertinence de sa politique : « sur le premier semestre de l’année 2013, le nombre de trafiquants et de revendeurs mis en cause par les services a augmenté de 12% par rapport à la même période de l’année précédente. Les saisies suivent la même tendance : pour le cannabis, par exemple, l’augmentation est de 36%, soit 10 tonnes supplémentaires. J’ajoute que 26 millions d’euros ont été saisis sur ces six premiers mois de l’année 2013 ». Il met un bémol à son propos : « Je me garderai de tout triomphalisme. Les trafiquants mettent en place de nouvelles stratégies qui nous demandent de nous adapter en permanence ».
Et d’appeler à une mobilisation générale face à un enjeu tel celui de la jeunesse : « Je pense à ces mineurs qui, dès l’âge de 11 à 12 ans sont happés dans les trafics pour y jouer le rôle de guetteur». Avant d’ajouter : « Sur l’ensemble du territoire national, en 2008, moins de 10% des mis en cause dans les affaires de trafic et de revente de stupéfiants étaient mineurs. Fin 2012, on en comptait 14,5%. Les données concernant la ville de Marseille sont encore plus accablantes : les mineurs représentent plus du tiers des trafiquants interpellés… ».
Puis de signifier que la violence baisse à Marseille : « Hormis les vols à main armée qui augmentent de 3%, tous les autres chiffres sont à la baisse. Sur les sept premiers mois, les violences physiques crapuleuses ont diminué de 17%, les violences physiques non crapuleuses de 8%, les atteintes aux bien de 17%… ». Et d’affirmer : « Même si toute la ville n’est pas en zone prioritaire, nous nous préoccupons de toute la ville, et notamment de l’hyper-centre, où, une fois n’est pas coutume, mon prédécesseur avait plutôt fait du bon travail. Maintenant j’attends que la ville tienne tous ses engagements, notamment en terme de police municipale : de renforcement des effectifs, de travail sept jours sur sept, de travail de nuit et, en étant, pourquoi pas, armée ».
Et in fine de rappeler : « Le cannabis présente un risque sanitaire important. Un joint contient 8 fois plus de goudrons cancérigènes qu’une cigarette. Les principes actifs sont bien plus puissants. Leurs effets sont établis avec certitude : isolement, difficulté de concentration, perte de motivation, risques d’installation de troubles schizophréniques à long terme ».
Alors, pour le ministre, « la drogue est toujours une perte de chance ».
Michel CAIRE
(*)Valls-Taubira : Je t’aime moi non plus
Le texte publié par le Monde mettant en lumière les désaccords tant sur le fond que sur la forme entre Manuel Valls et Christiane Taubira, le ministre de l’intérieur réclamant l’arbitrage du président de la République, a été abordé lors de conférence de presse. Ce 14 août, la Ministre a regretté la publication de ce document qui devait rester interne. « Nous avons effectué avec Christiane Taubira plusieurs déplacements en commun, notamment à Marseille. Elle, comme moi voulons éviter un affrontement mortifère entre le ministre de la Justice et celui de l’Intérieur car il faut un travail en commun de la police et de la justice. Et c’est ce qui se fait au quotidien. Après, il est normal qu’il y ait des débats, qu’il y ait recherche des meilleurs solutions, et je regrette que cette note soit sortie dans la presse ».
Rencontre avec les parents du jeune Jérémie Labrousse
Manuel Valls a rencontré, ce 14 août, la famille de Jérémie Labrousse. « Je leur ai fait part de la compassion du gouvernement, de la mienne. J’ai été frappé par la dignité de cette famille qui vient de perdre un enfant, un frère extraordinaire. Une famille qui a maintenant besoin de se retrouver loin du tumulte ».